Maintenant que Carey Price a manqué plusieurs parties en raison d’une blessure et que le Canadien de Montréal a toujours de la difficulté à sortir victorieux de ses parties, la brigade défensive que Marc Bergevin a assemblée pour Claude Julien commence à être pointée du doigt. Shea Weber, même amoché, fut de loin le meilleur défenseur du groupe et sans doute le seul arrière qui ne connait pas continuellement sa part d’ennuis. Ainsi, une grande part du blâme est dirigée vers le joueur qui devrait être le deuxième meilleur défenseur du Tricolore : Jeff Petry.

 

Ces critiques sont en partie méritées. Lors de quelques parties en début de saison, le niveau de jeu de Petry ne fut pas acceptable. Cependant, les problèmes de Petry cette saison s’expliquent en bonne partie par la pression qu’il a sur les épaules, ce qui est attribuable à la façon dont est bâtie la formation du Canadien.

 

Claude Julien préfère que ses défenseurs effectuent davantage de jeux en possession de la rondelle que Michel Therrien. En effet, Julien veut éviter de dégager son territoire défensif lorsque cela est possible, mais la brigade défensive mise en place par Bergevin semble plutôt être taillée au goût de son prédécesseur.

 

Shea Weber peut compléter une longue passe en sortie de zone par moments, mais il préfère dégager son territoire ou que ce soit son partenaire à la ligne bleue qui orchestre la sortie de zone. Ceci a bien fonctionné pour une courte période de temps pendant laquelle Victor Mete jouait très bien en début de saison. Toutefois, comme c’est la norme chez les jeunes défenseurs, Mete a eu plus de difficulté par la suite. Cela a mis encore plus de pression sur Weber.

 

Le reste du corps défensif du Canadien a également plus de difficulté que le défenseur moyen de la LNH au moment d’organiser une sortie de zone. Jakub Jerabek pourrait être d’une aide précieuse dans cette facette du jeu, tout comme le retour de David Schlemko.

 

À ce jour, Petry est le seul joueur qui orchestre constamment les sorties de zone de la façon que Julien préfère. Puisque ses partenaires ne sont pas en mesure de faire de même, Petry a eu à faire face à encore plus de pression en échec-avant que normalement.

 

Malgré tout, le Canadien est à son meilleur au niveau de la possession de la rondelle lorsque Petry se trouve sur la glace. Il affiche le meilleur Corsi (54,56 %) chez les défenseurs, ce qui est normalement un indice comme quoi un joueur fait bien les choses. Toutefois, une donnée brute telle le Corsi peut toujours louper un élément, donc allons plus loin.

 

Une facette du jeu où les défenseurs peuvent connaître des ennuis est la gestion du disque. Sachant que Petry a connu une très bonne saison l’année dernière, comparons ses données pour cette année à celles cumulées la saison dernière à la même date.

 

Tableau Jeff Petry

 

Les changements les plus importants quant à la gestion de la rondelle par Petry cette saison se situent en zone centrale. Il y réussit moins fréquemment ses jeux et il y commet plus de revirements. Bien qu’il soit important de bien jouer en zone neutre, c’est aussi la zone où un défenseur se trouve le moins souvent en possession du disque. De plus, Petry ne laisse pas ses partenaires défendre seuls des surnombres, donc je crois qu’il s’agit davantage d’un problème au moment de créer de l’attaque qu’un souci défensif.

 

À l’exception de la zone neutre, Petry est approximativement au même niveau que l’année dernière. Son jeu de passes est légèrement meilleur, il commet beaucoup moins de revirements et il rate moins de jeux en zone défensive. Cela signifie qu’il réalise moins d’erreurs dans les zones dangereuses lorsque la rondelle est sur son bâton, ce qui est une bonne chose.

 

Globalement, les taux de passes complétées et de revirements de Petry comparativement à ses coéquipiers sont tous meilleurs que ceux de l’an dernier en raison de son travail en zone défensive, même si le club lui en demande davantage. La saison dernière, Petry a réalisé 84,7 jeux en possession de la rondelle pour 20 minutes de jeu à forces égales, menant l’équipe chez les défenseurs. Cette saison, il effectue 93 de ces actions pour 20 minutes de jeu, une hausse importante. Ceci lui permet d’être le septième défenseur le plus actif dans la LNH.

 

Sans la rondelle, Petry est encore une fois le défenseur le plus actif chez le Canadien. Il soutire le disque à son adversaire 12,2 fois pour chaque tranche de 20 minutes de jeu à égalité numérique. Ce nombre est de 7,8 fois dans sa zone défensive.

 

Ce style de jeu agressif amène son lot de conséquences. Cela explique que Petry fasse plus souvent les faits saillants que les autres joueurs qui restent en retrait et défendent passivement leur territoire. Si vous défiez un joueur, vous êtes beaucoup plus susceptible de vous faire déjouer. Lorsque P.K. Subban était à Montréal, son jeu défensif était perçu de la même manière.

 

Alors que ces erreurs menant à des faits saillants nous restent en tête, ultimement, elles ne sont pas aussi importantes que les chances que Petry parvient à contrer en jouant de façon agressive. Ce n’est peut-être pas apparent pour le téléspectateur ordinaire, mais jouer de façon passive mène à plus de chances de marquer et de buts accordés, alors que l’adversaire a plus de temps et d’espace pour travailler.

 

Il est difficile pour les gens d’accepter cette réalité, surtout qu’après le premier quart de la saison, Petry affiche le pire différentiel de l’équipe à cinq contre cinq (moins-9). Ces mauvais résultats ne sont pas imputables aux chances de marquer de qualité accordées, comme Petry présente le meilleur différentiel quant aux chances de marquer chez tous les défenseurs du Tricolore. Il est victime du plus faible taux de conversion de tirs en buts de l’équipe (5,38 %) et du plus faible pourcentage d’arrêts lorsqu’il est sur la glace (89,18%).

 

Aussi mauvais ces pourcentages soient-ils pour le Canadien cette saison, ils ont fait mal à Petry, malgré son jeu solide. Une part de ses ennuis est imputable à son manque de chimie avec Karl Alzner. Ces deux joueurs sont désastreux lorsqu’ils évoluent ensemble sur la patinoire, même s’ils affichent des chiffres décents quant à la possession. Pourtant, Alzner est le partenaire défensif de Petry depuis le début de la saison.

 

Chez le Canadien, aucun défenseur n’a passé plus souvent la rondelle à son partenaire défensif qu’Alzner, alors qu’aucun défenseur n’a réalisé cette action aussi peu fréquemment que Petry. Clairement, c’est quelque chose que les adversaires ont noté et dont ils tentent de tirer avantage, ce qui provoque beaucoup d’erreurs.

 

À l’opposé, lorsque Petry a joué avec Brandon Davidson au lieu d’Alzner, les chances de marquer accordées à l’adversaire furent réduites de moitié. Je doute que ce soit attribuable au fait que Davidson soit deux fois plus efficace qu’Alzner défensivement. Davidson a tout simplement une meilleure chimie avec Petry.

 

Petry n’est pas parfait. Il est un très bon défenseur qui ne mérite même pas la moitié des roches qui lui furent lancées dernièrement. Alors que le Canadien continue d’enchaîner les défaites, il pourrait être temps que le personnel d’entraîneurs et l’état-major apportent des changements à leur plan. L’une des choses les plus faciles qu’ils peuvent faire, c’est de séparer Petry et Alzner.