Le Canadien a mieux joué que samedi. Beaucoup mieux. Mais bien qu’il ait perdu 3-1 au lieu d’être lessivé 7-2 comme ce fut le cas lors du premier match de la finale de l’Est l’opposant aux Rangers, cette deuxième défaite fait beaucoup plus mal que la première. Et pas seulement parce qu’il se retrouve à deux revers des vacances.

Ce qui fait le plus mal dans ce deuxième revers c’est que le Canadien, même en jouant beaucoup mieux qu’il ne l’avait fait samedi, n’a pas été en mesure de percer Henrik Lundqvist qui a été rien de moins qu’excellent encore une fois.

« Hank » a signé une cinquième victoire de suite lundi : deux contre le Canadien, trois contre les Penguins. S’il n’a rien à voir, ou si peu, avec le fait que ses coéquipiers ont enfilé 20 buts lors de ces cinq matchs, le Suédois a eu plus que son mot à dire dans le fait que ses adversaires ne l’ont déjoué qu’à six reprises au cours de ces cinq parties. Des statistiques qui ont de quoi effrayer n’importe quelle équipe. Surtout si cette équipe est privée de son gardien numéro un et que ce gardien numéro un s’appelle Carey Price. Car si Lundqvist a été à la hauteur de sa réputation d’être l’un des meilleurs gardiens de la LNH, à l’autre bout de la patinoire, Dustin Tokarski n’a pas été en mesure de s’imposer avec autant d’aplomb.

Pas question de jeter le blâme de la défaite sur les jambières d’un jeune gardien qui disputait son tout premier match de séries éliminatoires en carrière dans la LNH. Ça non! D’autant que Tokarski n’a pas si mal fait.

Mais pendant que Lundqvist multipliait les arrêts aussi importants que nécessaires pour permettre à une équipe de se rendre à la finale de la coupe Stanley, Tokarski n’a pas fait ces arrêts. Impossible de blâmer le gardien des Bulldogs sur le premier but puisque la rondelle a dévié sur Josh Gorges. Sur le deuxième toutefois, Tokarski a été trop lent dans son déplacement vers la gauche et Rick Nash a su en profiter. Tokarski n’est pas le seul à blâmer sur ce but. Loin de là. Trop lents en repli défensif, les attaquants ont laissé Nash libre comme le vent ce qui lui a permis de tirer sans le moindre ennui. Et comme il demeure un marqueur phénoménal en dépit de sa disette depuis le début des séries – il a deux buts en deux matchs – Nash n’a pas donné de chance à Tokarski. Sur le troisième but, Tomas Plekanec est coupable alors qu’il donne beaucoup trop d’espace à Martin St-Louis dans la zone payante. En plus, le gros Chris Kreider – encore lui – était campé devant Tokarski pour lui compliquer la vie.

Loin de moi l’intention de prétendre que Peter Budaj aurait stoppé ces deux rondelles si Michel Therrien lui avait montré un brin ou deux de confiance en l’envoyant en relève à Carey Price plutôt qu’en faisant appel à un gardien de la Ligue américaine. Mais Carey Price aurait fait l’arrêt aux dépens de Nash. Et à défaut d’un arrêt, on l’aurait accusé d’avoir accordé un mauvais but.

Je ne sais pas si Price aurait stoppé le tir de St-Louis, mais ses chances de réussite auraient été meilleures que celles de Tokarski. Ça, c’est sûr. Et bien qu’il soit impossible de parler ici d’un mauvais but, c’est le genre d’arrêt qu’un gardien doit effectuer en finale d’association pour propulser son équipe en finale de la coupe Stanley.

Le genre d’arrêts que Henrik Lundqvist a fait hier. Que Dustin Tokarski n’a pas fait. Cela explique en grande partie la différence dans ce match et pourquoi, avec l’absence de Carey Price pour le reste de la série, les joueurs du Canadien peuvent difficilement croire en leur chance de gagner quatre des cinq prochains matchs dans cette série qui semble finie alors qu’elle vient à peine de commencer.

P.K. et le premier trio 

Dans le fond, le Canadien a été victime lundi des crimes qu’il a plusieurs fois commis cette saison aux quatre coins de la LNH : bien appuyé par un gardien en pleine forme et en pleine possession de ses moyens et par une attaque opportuniste, le Canadien a volé combien de matchs en saison régulière? Quatre, six, dix? Je ne sais pas. Mais hier, il a compris à quel point ces vols sortis de nulle part font mal à l’équipe qui en est victime.

Ce qui m’amène à une autre raison de s’inquiéter au lendemain de ce deuxième revers si on est fan du Canadien.

Et non! Je ne parle pas ici du complot que plusieurs partisans ont adopté comme explication aux trop nombreuses pénalités décernées au Canadien et du trop petit nombre à l’endroit des Rangers. D’abord, le Canadien a été pris une seule fois de plus en défaut que les Rangers.

Cette fois était de trop. J’en conviens. D’autant plus que la pénalité décernée à Alex Galchenyuk qui a mené au but de Martin St-Louis n’était pas une pénalité. Pourtant l’un des bons arbitre dans la LNH, Dan O’Hallaran était mal placé pour sévir à l’endroit de Galchenyuk. S’il avait bénéficié d’un bon angle, il aurait vu que c’est Carl Hagelin qui s’est barré les pieds sur la jambe gauche du joueur du Canadien et non l’inverse.

Cette pénalité était une erreur.

Mais de là à croire que le Ligue avait demandé aux arbitres de sévir contre le Tricolore parce qu’on ne veut pas d’un club canadien en grande finale, il y a un fossé qu’il serait périlleux de tenter de traverser. Si l’on veut être pris au sérieux…

Mais bon! C’est plus facile de critiquer les arbitres que les joueurs de son club favori. C’est évident. Mais le Canadien a sa part de blâme à porter dans cette deuxième défaite.

Oui le Tricolore a bien joué hier, beaucoup mieux qu’il ne l’avait fait samedi. Mais la majorité des 41 tirs dirigés sur le filet de Lundqvist et des 80 tirs décochés par le Canadien sont venus de P.K. Subban et du premier trio.

P.K. a cadré neuf rondelles. C’est énorme. Il a décoché 18 tirs. C’est plus gros encore. Brendan Gallagher a cadré 6 des 13 tirs qu’il a tentés, Max Pacioretty 5 des 8 et David Desharnais 2 des 4 tentés.

Si je sais bien compter, ça veut dire que ces quatre joueurs ont cadré 22 des 41 tirs, qu’ils ont décoché 43 des 80 tirs tentés. Des chiffres sensationnels pour ceux qui en sont responsables. Mais des chiffres qui nous obligent à se demander que diable ont fait les autres.

Vanek contagieux 

Encore une fois hier, Thomas Vanek a été rien de moins que mauvais. Mauvais en attaque, plus mauvais encore en défensive. Vraiment très mauvais. Et le pire dans tout ça c’est qu’il commence vraiment à contaminer ceux qui jouent avec lui.

Non seulement Tomas Plekanec ne génère plus rien en attaque depuis qu’on lui a confié le mandat de faire fonctionner l’Autrichien, mais Plekanec n’est pas même l’ombre de lui-même en défensive. Son jeu et par conséquent celui de son trio périclite de match en match à un point où ça devient vraiment inquiétant.

Sans être flamboyant, le trio de Lars Eller a été meilleur que celui de Plekanec. Il ne faut toutefois pas se laisser berner par les 11 tirs obtenus par ce trio. Car ces 11 tirs n’ont généré que trois bonnes occasions selon mon relevé personnel. J’en ai peut-être omis un.

Et le quatrième ? On ne l’a pas vu ou pas assez pour lui jeter une pierre ou l’encenser. Mais avec tout ce que Dale Weise a donné de bon à son équipe depuis le début des séries, il est difficile de comprendre qu’il n’ait effectué que neuf présences alors que Vanek en a obtenu le double.

Bon ! Le niveau de talent entre les deux joueurs n’a rien à voir. C’est vrai. Mais tant qu’à obtenir si peu de Vanek qui devient en plus un boulet pour ceux qui l’entourent, peut-être que d’autres joueurs pourraient en donner davantage…

Si, une fois à New York, le Canadien ne peut compter que sur les efforts de P.K. Subban et des membres du premier trio, on pourra cesser de transformer le Centre Bell en congélateur et laisser la glace fondre tout de suite.

Car il faudra se souvenir de la défaite de 3-1 encaissée lundi comme étant celle qui a saura scellé l’issue de la saison 2013-2014 du Tricolore.

Non! Je ne baisse pas les bras. Non! Je ne vous lance pas au visage que le Canadien se retrouve devant l’impossible après avoir perdu les deux premiers matchs de cette série. À domicile en plus.

Mais sans Carey Price devant le filet et avec une contribution très sélective en offensive, les chances que le Tricolore imite sa remontée spectaculaire de 1993 alors qu’il avait renversé les Nordiques qui les avaient pourtant battu deux fois au Forum avant de se rendre jusqu’à la coupe Stanley que le Canadien avait soulevée sous le nez de Wayne Gretzky et des Kings de Los Angeles, sont minces, bien minces, très minces…

Budaj vs Tokarski 

Quoi penser de la décision de Michel Therrien de donner le filet de son équipe à Dustin Tokarski plutôt qu’à Peter Budaj? Qu’elle met un gros bémol sur toutes les belles paroles lancées au cours de l’année par le coach du Canadien – et les joueurs – qui prétendait avoir pleinement confiance en son auxiliaire.

Si le Canadien, à commencer par son coach, avait vraiment eu confiance en Budaj, c’est lui qui aurait amorcé la deuxième partie de la série. Vrai que Tokarski est un gagnant. Qu’il s’est rendu aux grands honneurs dans les rangs juniors et dans la Ligue américaine. Vrai aussi qu’il a su s’imposer cette année lorsqu’on lui a demandé de venir en relève à Peter Budaj.

Mais le gardien de la LNH c’est Budaj et non Tokarski. Sauf que Budaj s’est fait très mal lorsqu’il n’a pu faire mieux que signer deux victoires lors des sept matchs qu’il a disputés en l’absence de Carey Price à son retour des Jeux olympiques de Sotchi. Tokarski a disputé le huitième.

Michel Therrien n’avait que le deuxième match en tête lorsqu’il a décidé de prendre un autre pari et d’envoyer le jeune sans expérience devant le filet. Mais quel impact aura cette décision sur l’avenir de Budaj à Montréal.

Maintenant que son pari ne lui a pas souri, Michel Therrien peut-être vraiment se tourner vers Budaj et lui demander de venir sauver l’équipe qui accuse un recul de 0-2 dont il n’est nullement responsable?

Ce n’est pas évident.

Mais si Therrien écarte Budaj du reste de la série et que le Canadien se retrouve en vacances, peut-être vraiment croire aux chances du gardien slovaque de demeurer l’adjoint de Price l’an prochain?

Ce n’est pas évident non plus.

Ce qui semble évident, c’est que le poste d’adjoint sera loin d’être assuré à Budaj qui devra défendre son territoire contre Tokarski d’abord, mais aussi Devan Dubnyk que le Canadien a acquis justement pour renflouer sa réserve de gardiens pour justement trouver une façon de pallier la perte de Price dans le cas d’une blessure.

Les chiffres du match 

5 – Les Rangers affichent maintenant cinq victoires de suite au Centre Bell en séries éliminatoires. Deux cette saison, et trois lors du dernier duel en séries entre les deux clubs en 1996.

6 – Pas question de tourner le fer dans la plaie – ou si peu – mais après deux rencontres contre le Canadien en finale, Ryan McDonagh revendique déjà six points dont deux buts. Il a obtenu six tirs cadrés lundi en plus d’avoir été superbe en défensive. McDonagh contre Gomez, pas sûr que le Canadien referait cette transaction. Du moins j’espère bien que non…

10 – Les Rangers présentent un dossier de 10-2 dans les séries amorcées avec deux victoires et de 4-1 lorsque ces deux victoires ont été acquises sur la route…

20 – les Rangers ont freiné le Canadien lors des quatre attaques massives obtenues lundi. Les spécialistes du désavantage numérique des Blueshirts ont écoulé les 20 dernières pénalités écopées en séries…

44 – Pendant que le Canadien cadrait 41 rondelles sur les 80 tirs tentés, les Rangers ont atteint la cible 30 fois sur leurs 44 tirs tentés. Ça ne les pas empêchés de gagner. Comme quoi un gardien en forme et une équipe opportuniste peuvent brouiller les cartes…