Pendant plus de 57 minutes, l’affrontement Canadien-Red Wings était de nature à faire saliver les anciens entraîneurs-chefs Jacques Lemaire et Jacques Martin. Grands gourous de la trappe, ces deux entraîneurs d’expérience affichaient jadis de larges sourires au terme d’un verdict nul de 0-0 opposant les Devils du New Jersey aux Sénateurs d’Ottawa. Un verdict nul au cours duquel les deux équipes s’étaient échangé une dizaine d’occasions de marquer... maximum!

Bon! On peut bien parler d’un match de séries, d’un match serré, d’un match chaudement disputé, « d’un grand match de hockey », comme l’a décrit Michel Therrien après la rencontre, ce qui n’est pas faux je l’admets d’amblée, mais le duel de lundi opposant le Canadien et les Wings ne passera pas à l’histoire sur le plan de la qualité du spectacle.

Ce n’est pas grave : le Canadien n’avait pas à offrir de spectacle aux fans des Wings et à ses partisans venus de Windsor, de l’autre côté du fleuve Detroit.

Il n’avait qu’à gagner. Ce qu’il a fait en l’emportant 2-0 pour consolider sa première place dans la division Atlantique et sa première place dans l’Association Est. On ne rit plus. Ou on rit à gorge déployée... c’est selon.

Le Canadien a donc gagné pour une 37e fois cette saison et pour une 17e fois sur la route.

Une fois encore, ce gain est venu sur le tard. Une fois encore, ce gain est venu récompenser une performance brillante de Carey Price qui a été, et de loin, le meilleur joueur du Tricolore avec sa performance sans faille de 25 arrêts.

Je sais, vous êtes tannés de lire ce genre de phrase. Et bien honnêtement, j’aimerais trouver une autre façon pour l’écrire.

Mais c’est comme ça. La pierre d’assise du Canadien a signé sa 32e victoire de la saison, sa cinquième par jeu blanc. Un jeu blanc qui devient son 30e en carrière, un de mieux que Patrick Roy qui occupe le sixième rang dans l’histoire du Tricolore, quatre de moins que Bill Durnan et du quatrième rang.

Cette victoire, ce jeu blanc, cette performance donnent encore plus de raisons, comme si moi et mes collègues des quatre coins de la LNH en avions vraiment besoin de plus, pour donner à Carey Price les votes de première place nécessaires pour lui garantir le trophée Hart remis au joueur le plus utile à son équipe.

Les échos de vestiaire

Pacioretty complet

Parce que tout a été dit et que tout a été écrit sur la valeur défensive de Carey Price, sur son importance relative quant aux succès du Canadien, sur son importance tout court, j’aimerais attirer votre attention sur la valeur défensive de Max Pacioretty.

Oui, oui! J’ai bien écrit valeur défensive.

Avant de pousser le gardien Jimmy Howard à réaliser son 27e arrêt de la soirée sur un tir qui a mené au but gagnant marqué par Tomas Plekanec, avant de marquer dans un filet désert pour sceller l’issue de la rencontre avec 26e but de la saison, Max Pacioretty n’avait pas fait grand-chose... à l’attaque.

Pour la première fois de la saison, il flirtait avec la possibilité de terminer la rencontre sans le moindre tir. Eh oui! Pacioretty était, avant le match, et est toujours après la partie, l’un des six joueurs de la LNH à avoir obtenu au moins un tir dans chacune des parties disputées jusqu’ici cette année.

Les voici dans l’ordre :

Alex Ovechkin : 57 en 57
James Van Riemdyk : 57 en 57
Max Pacioretty : 56 en 56
Tyler Seguin : 55 en 55
Claude Giroux : 55 en 55
Rick Nash : 54 en 54

Max Pacioretty occupe le septième rang de la LNH avec ses 26 buts. Ses six buts gagnants le placent au troisième rang. Il est aussi troisième pour le nombre de tirs cadrés (213) derrière Alexander Ovechkin (278) et Tyler Seguin (225).

Avec ses deux tirs obtenus en fin de rencontre hier, Pacioretty en revendique 30 à ses six derniers matchs. Dix-neuf fois cette saison, il en a obtenu cinq et plus – son plus haut total est huit, réalisé à deux reprises – et quatre fois seulement cette année Pacioretty a été limité à un tir.

Une recette éprouvée

Pourquoi défiler toutes ces statistiques offensives alors que je voulais insister sur ses qualités défensives?

De un, parce que la meilleure défense est souvent l'attaque.

Mais aussi parce que je voulais vous surprendre avec le fait que Pacioretty se réveille ce matin à Ottawa – le Canadien affrontera les Sénateurs mercredi soir au Centre Canadian Tire – avec un différentiel de plus-29, le meilleur de la LNH.

Dites-le que vous êtes surpris!

Des votes pour le Selke?

Ce n’est pas seulement parce qu’il excelle en attaque que Pacioretty affiche un différentiel si positif. C’est aussi parce qu’il a beaucoup amélioré la qualité de son jeu défensif. De fait, je ne suis pas convaincu qu’il y consacrait temps et énergie avant. Mais depuis le début de la saison, il est clair que Pacioretty se fait un devoir d’être solide dans tous les aspects du jeu.

C’est pour cette raison qu’on le voit s’imposer comme il le fait en désavantage numérique en compagnie de Tomas Plekanec.

Mais hier, bien qu’on ne l’avait pas encore remarqué en attaque sur la patinoire du Joe Louis Arena, Pacioretty s’est signalé en défense en fin de période médiane pour réparer une bévue de P.K. Subban. J’écris bévue, mais c’est un peu sévère. Subban a semblé perdre l’équilibre alors que l’un de ses patins s’est pris dans une fente ou un trou quelconque et il s’est ensuite rendu coupable d’un vilain dégagement qui a offert une échappée aux Wings par le biais de Darren Helm.

Une échappée que Pacioretty a anéantie en effectuant un remarquable et remarqué repli défensif qui a donné un répit à Carey Price.

Même s’il n’avait pas marqué son 26e but, s’il n’avait pas récolté sa 22e passe de la saison, s’il n’avait pas même obtenu un tir, Max Pacioretty aurait terminé sa soirée de travail avec une étoile sur son bulletin de notes.

ContentId(3.1115858):Peu de buts marqués, encore moins de buts accordés
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À cause de ce repli?

Mettez-en! Car c’est ce genre de jeu qui fait d’un joueur comme Pacioretty un joueur complet. Un joueur apprécié de ses coéquipiers. Un leader. Un vrai.

Le genre de jeu que Phil Kessel ne réalise pas à Toronto, avec les Maple Leafs, avec toutes les conséquences négatives que cela entraîne à l’égard de ce franc-tireur que plusieurs amateurs et observateurs considèrent – un brin sévèrement il est vrai – inutile.

Pacioretty est beaucoup plus reconnu autour de la LNH pour ses qualités offensives de franc-tireur que pour ses qualités défensives.

Mais il est quand même bon premier dans la LNH avec son plus-29. Il devance Vladimir Tarasenko (plus-27), des Blues de St Louis qui n’est pas non plus réputé pour ses qualités défensives de même que trois membres du Lightning de Tampa Bay : Nikita Kucherov (plus-27), Ondrej Palat (plus-25) et Tyler Johnson (plus-25).

Avec Pacioretty si haut perché dans la colonne des plus et des moins, une question s’impose. Une question un brin ou deux, voire trois, surprenante, c’est vrai. Mais elle s’impose quand même.

Max Pacioretty mérite-t-il des considérations dans la course au trophée Frank-Selke remis au meilleur joueur défensif de la LNH?

Il faut être patient!

Ne riez pas! Ne criez pas non plus! Car je viens de vous aviser que cette question a de quoi surprendre.

Si le différentiel était le seul critère pris en considération, Pacioretty aurait plus de chances de gagner le Selke que le trophée Maurice-Richard.

Mais le différentiel, bien qu’important, cède aussi le pas à la réputation des candidats potentiels au trophée Selke. Quand on pense à ce trophée, on pense à Bob Gainey pour qui il a été créé. L’ancien capitaine du Canadien l’a d’ailleurs soulevé quatre saisons en ligne après sa création.

On pense aussi à Guy Carbonneau, Jere Lehtinen, à Pavel Datsyuk.

On pense à Jonathan Toews et Patrice Bergeron qui se sont échangé les trois derniers titres de meilleur attaquant défensif, ou à Anze Kopitar qui mériterait pareil honneur également.

Mais on ne pense pas vraiment à Max Pacioretty et à ceux qui le talonnent dans la colonne des plus et des moins actuellement.

Est-ce qu’on devrait?

Peut-être un peu. Surtout que dans le cas de Pacioretty, il est clair que le nouveau leader du Canadien n’est pas arrivé par hasard en tête de liste au chapitre du différentiel. S’il y est, c’est parce qu’il s’applique de façon évidente à s’imposer en défensive. Bon! On peut ajouter que Carey Price a son mot à dire également. Comme dans tous les aspects des succès du Canadien.

Mais au-delà des statistiques, Pacioretty n’a pas la réputation des Bergeron, Toews, Kopitar, voire Datsyuk. Pour cette raison, il part avec une longueur de retard sur ces candidats de premier plan.

Ça ne veut toutefois pas dire qu’il ne sera pas considéré en fin de saison. Il obtiendra peut-être même quelques votes. Mais peu importe le nombre de votes qu’il obtiendra, Pacioretty, en attirant un brin ou deux l’attention, moussera sa réputation de joueur complet. Ce qui militera en sa faveur au cours des prochaines saisons, à défaut de le faire dès cette année.