Quand Ti-Guy rime avec Haïti
Canadiens samedi, 23 avr. 2022. 21:16 jeudi, 12 déc. 2024. 14:41COLLABORATION SPÉCIALE
On commence à manquer de mots et de superlatifs pour parler de Guy Lafleur. Son décès provoque une vague d’amour et de témoignages élogieux à son égard. On souligne sa simplicité, sa générosité et bien sûr ses exploits sur la glace. Des exploits qu’on oublie presque, tellement il a transcendé son sport et l’équipe avec laquelle il a connu ses moments les plus glorieux, les Canadiens de Montréal.
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Je ne répéterai pas tout ce qui a été dit sur le légendaire Guy Lafleur depuis son départ. Malheureusement, je ne l’ai pas vu jouer au faîte de sa carrière. Cependant, j’ai quand même des « souvenirs » de ses exploits. Parce que c’est indirectement grâce à lui si j’aime autant le hockey. C’est qu’au-delà du héros national qu’il est et au-delà de ses exploits sur la glace que je n’ai pas vus se dérouler sous mes yeux, Guy Lafleur c’est surtout pour moi LE joueur qui a transmis à ma tante son amour pour le hockey et surtout la Sainte Flanelle. Mon père aussi est tombé en amour avec le hockey en arrivant au Québec et il m’a transmis cette passion. Mais c’est surtout la sœur de ma mère qui m’a marqué par son amour pour le CH.
Je me rappelle que lorsque j’étais jeune, tout le monde parlait de Mario Lemieux et à quel point il était extraordinaire. Au sommet de sa forme, il pouvait même prétendre menacer quelques records de Wayne Gretzky. Pourtant ma tante, fan de hockey depuis son arrivée au Québec dans les années 70, n’était vraiment pas impressionnée. Pour elle le meilleur joueur de tous les temps resterait toujours Ti-Guy. Elle nous disait à quel point il était dominant quand il attaquait la zone adverse sur l’aile droite et qu’il laissait partir la rondelle sans avertissement. D’ailleurs, petite parenthèse : avez-vous pensé à quelle vitesse il fallait que le Démon Blond se déplace pour faire bouger sa belle crinière. J’y pense et ça m’impressionne. Fin de la parenthèse.
Flower, comme on le surnommait également, a impressionné les amateurs de hockey d’ici, mais aussi quantité de jeunes immigrants venus s’installer au Québec pour un avenir meilleur. On sait tous à quel point le hockey est rassembleur. Les francophones et les anglophones, les souverainistes et les fédéralistes, les gens de droite et les gens de gauche, tous trouvent leur compte et s’unissent autour des succès de l’équipe. Imaginez-vous vous installer dans un nouveau pays. Pour découvrir la culture et vous intégrer, vous vous intéressez au sport local. Vous découvrez une équipe qui fait flèche de tout bois. Une équipe qui domine la ligue grâce à une superstar charismatique, proche du peuple, franche, travaillante, humble et talentueuse. Une équipe qui remporte quatre ans de suite le championnat de la ligue. Il y a de quoi tomber en amour avec un sport, une légende et une équipe légendaire.
Tout ça est bien beau, mais le Démon Blond n’était pas parfait. Il avait des défauts. Je ne parle pas de ces histoires qui ont fait la manchette à l’époque ou du fait qu’il fumait la cigarette, parfois même entre les périodes. Le grand défaut de Guy Lafleur c’est qu’il a mis la barre beaucoup trop haute pour les attaquants vedettes qui lui ont succédé avec le CH. Après son départ, aucun autre attaquant ne s’est même approché de l’admiration et de l’excitation que suscitait le numéro 10 du Tricolore. À tel point que lorsque les Canadiens connaissaient certains succès en séries éliminatoires à la fin des années 90, ma tante disait, juste après un signe de dépit bien connu des Haïtiens : « Bof, de toute façon ils ne seront jamais aussi bons que les bonnes équipes des années 70 (lorsque je suis arrivée au Québec) et il n’y aura jamais aucun joueur comme Guy Lafleur ». Elle a tellement raison. Il n’y aura jamais d’autre légende comme Guy Lafleur. Il fait partie avec Maurice Richard et Jean Béliveau de la Sainte Trinité des Canadiens de Montréal et le 22 avril 2022, il est devenu immortel.