MONTRÉAL – La rivalité entre le CF Montréal et le Toronto FC n’est certainement plus ce qu’elle a déjà été.

Depuis son arrivée à la tête des opérations soccer du club, le directeur sportif Olivier Renard a tellement changé le visage de la première équipe que l’hostilité qui entretenait le feu entre les Bleus et les Rouges s’est naturellement estompée.  

En raison des contraintes liées à la pandémie ou de leur arrivée récente au club, 14 des 20 joueurs qui étaient en uniforme pour le match de mercredi à Orlando n’ont jamais mis les pieds dans la turbulence du BMO Field, où le Club de Foot tentera d’aller chercher trois points cruciaux samedi. Bien lointaine est l’époque où les Patrice Bernier, Hassoun Camara et Evan Bush retenaient leurs sanglots derrière les tranchées ennemies, dévastés par une déchirante élimination au seuil de la grande finale.

« C’est toujours spécial de les affronter, conteste poliment Samuel Piette, qui est allé à la guerre 13 fois contre le Toronto FC. C’est sûr que la rivalité change au cours des années. Je pense que les émotions ne diminuent pas, mais oui, ça change. Moi, à mon arrivée, c’était gros parce qu’en 2016 il y avait eu la finale de l’Est. [...] Mais ça reste que c’est Toronto. Même avec Vancouver, je pense qu’à chaque année, on a comme objectif d’être la meilleure équipe canadienne, d’avoir le plus de points au classement. »

Wilfried Nancy est peut-être encore tout nouveau dans son rôle d’entraîneur-chef, mais par son vécu élargi d’entraîneur au sein de l’Académie et d’adjoint avec la première équipe, il demeure le plus pertinent témoin des tensions historiques entre les clubs de Montréal et Toronto.

« Je fais tout pour qu’elle existe, répond-il quand on le questionne sur l’état actuel de la rivalité. Même si on a de nouveaux joueurs, c’est important pour moi qu’ils comprennent ce que c’est que de jouer contre Toronto, qu’ils comprennent ce que sait que de jouer un derby. Que ça soit pour eux en tant que joueur, mais aussi en tant que personne. Alors oui, de notre côté ça existe. [...] Le travail, c’est de garder cette culture-là, de la faire durer et de s’assurer que les joueurs ressentent cette différence quand on joue un derby. »

De toute apparence, le sentiment de Nancy est partagé son homologue Javier Perez. Mercredi soir, pour le déplacement de l’équipe à Miami, l’entraîneur torontois a laissé les milieux de terrain Jonathan Osorio et Richie Lareya ainsi que l’attaquant Jozy Altidore, un vieux bourreau des Montréalais, sur le banc pour commencer le match. Le défenseur Chris Mavinga, qui revient de blessure, a quant à lui été conservé comme substitut. Toronto, que le CF Montréal a déjà battu deux fois cette saison, a perdu le match 3-0.

« Le message que je reçois, c’est qu’ils se préparent pour nous, interprète Nancy. Je ne suis pas dans les pensées de l’entraîneur, mais il devait faire un peu de rotation et il a décidé de le faire contre Miami. Donc ça va être un tout autre match samedi. C’est comme ça que je le perçois. Si on était dans la même situation qu’eux, on ferait tout pour qu’ils ne fassent pas les séries. C’est tout à fait normal. »

« Cette année, c’est un peu l’inverse des années précédentes où Toronto était toujours dominant et classé dans les séries en fin d’année. On voulait toujours gâcher leurs plans quand on n’en faisait pas partie. C’est sûr qu’il va y avoir cet aspect-là », ne cache pas Piette, qui entretient en plus une saine compétition avec les copains de l’équipe nationale qu’il retrouvera maintenant comme adversaires.

« Je sais qu’à l’interne, quand on est en équipe nationale, les gars de Toronto disent qu’ils ne veulent pas qu’on accumule de points parce que ça voudrait dire que la finale du Championnat canadien, si les deux équipes se rendent là, se jouerait plus tard, alors qu’eux auront fini leur saison depuis longtemps », révèle le Québécois.

Engouffré au 13e rang du classement de l’Association Est, le TFC est déjà mathématiquement éliminé de la course pour une place en séries. La réalité des Montréalais est toute autre. Leur récent match nul à Orlando les a élevés au sixième rang dans l’Est. Avec quatre matchs à jouer, le dénouement de leur saison est encore imprévisible.  

 « Le classement, il est ce qu’il est. S’ils sont dans cette position, c’est qu’ils n’ont pas fait les bonnes choses, convient Nancy. Mais c’est une équipe qui, quand je regarde les matchs, tant qu’ils sont en contrôle du match, ils sont toujours là. Il y a pas mal de matchs qu’ils devaient gagner mais finalement après, quand ils ont pris un but, ils ont commencé à lâcher un peu. Mais c’est encore une fois une équipe avec de très bons joueurs. Sur toute la saison, mentalement ça a été dur pour eux, c’est pour ça qu’ils ne sont pas mieux classés. Mais sur un match, ce n’est pas du tout la même chose. Ils ont de bons joueurs et ils vont tout faire pour nous empêcher de gagner. »

Le CF Montréal est dans une bonne forme, ayant soutiré des points à l’Union de Philadelphie et Orlando City SC à ses deux dernières sorties. Nancy a indiqué qu’il pourrait possiblement compter sur le retour de certains blessés samedi, dont le milieu de terrain Ahmed Hamdi. L’attaquant Romell Quioto ratera toutefois un troisième match de suite en raison d’une blessure à une jambe.