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RÉSULTATS

Toronto obtient le dernier mot devant une foule record au Centre Bell

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MONTRÉAL – Des voyants lumineux comme autant de sourires dans l'obscurité, des milliers de serviettes blanches brandies tel un poing revendicateur, une équipe adverse huée comme ne peuvent l'être que les plus vieux ennemis. Jusqu'à ce que « The Power of Love » de Céline Dion ne transperce les haut-parleurs, on aurait pu jurer qu'on se préparait à assister à un match de séries du Canadien.

Oserions-nous dire que c'était encore mieux?

C'était un événement comme le Centre Bell en avait accueilli des centaines auparavant... mais pas vraiment. En 2016, les Canadiennes de Montréal y avaient reçu l'Inferno de Calgary pour une partie qui avait incité près de 6000 personnes à se déplacer. À l'époque, il s'agissait d'un record pour un match de saison régulière de hockey féminin.

Mais « le temps d'avant, c'était le temps d'avant », a aussi chanté Céline. Sept ans plus tard, on est effectivement ailleurs. Ils étaient 21 105 à avoir accepté l'invitation de l'équipe montréalaise de la LPHF samedi après-midi, une réponse qui a nécessité une mise à jour du livre des records. La marque précédente (19 285) avait été inscrite en février au Scotiabank Arena de Toronto.

Cette vague d'amour n'a toutefois pas suffi aux Montréalaises pour vaincre leur bête noire. Un but de Sarah Nurse dès la treizième seconde de la prolongation a procuré une victoire de 3-2 aux visiteuses torontoises.

Malgré le coup de poignard qu'elle venait d'asséner aux favorites, Nurse a reçu de chaleureux applaudissements lorsqu'elle est revenue sur la glace après avoir été nommée la première étoile de la partie. Très vite, l'amertume de la défaite a pris un pas de recul devant la grandeur du moment.

« Je pense que c'est vraiment une célébration de chaque joueuse qui a été ici, qui ont eu un impact durant des années, a suggéré la Québécoise Lauriane Rougeau. Une Sarah Nurse ou une Kristen Campbell qui sont là depuis très longtemps, qui ont travaillé pour une ligue comme ça. Je pense que les partisans reconnaissent l'effort qui a été mis en arrière. Voir à quel point elles sont autant appréciées même si on est à Montréal, une ville rivale, ça fait chaud au cœur. »

« Quand on est arrivées ici, on ne savait pas comment on allait être reçues. La foule de Montréal peut être assez dure envers les équipes de Toronto! Mais l'accueil a été formidable », a dit Nurse.

« Quand ils ont commencé à annoncer la formation de Toronto, j'ai entendu la réaction de la foule et je me suis dit "Holy Molly", je ne peux pas imaginer ce que ça va être pour nous », se remémorait pour sa part Marie-Philip Poulin.

La Beauceronne a évidemment été la cible des acclamations les plus nourries. La première mention de son nom a fait trembler l'édifice. « La caméra est restée un peu trop longtemps sur moi », a blagué Poulin, dont la timidité n'est jamais plus évidente que lorsqu'elle reçoit des éloges.

« [L'ovation] a rentré, ça a donné des frissons, a reconnu la capitaine, qui a pourtant l'habitude de telles démonstrations d'amour. Je suis devenue émotive, c'est sûr. Prendre le moment pour regarder toutes les serviettes dans les estrades, les gens debout. On s'en parlait, la rondelle passait la ligne rouge et les gens étaient bruyants, c'était incroyable. C'est un moment que je n'oublierai jamais. »

Erin Ambrose, l'une des deux buteuses dans la défaite – Sarah Bujold a été l'autre – s'est félicitée d'avoir réussi à retenir ses larmes jusqu'à la fin du match. L'entraîneuse-chef Kori Cheverie a admis avoir eu les yeux embués pendant l'hymne national. Même Troy Ryan, l'entraîneur des visiteuses, a reconnu avoir été envahi par les émotions. Il y avait là, vous l'aurez compris, un thème récurrent.

« Un jour, une jeune femme ou un jeune homme parlera de ce match comme le moment qui l'a motivé ou inspiré à faire quelque chose, a relativisé Ryan. C'est puissant. Mon regard a croisé celui de Rougeau au début du match et on était tous les deux au bord des larmes. »

Poulin a dit rêver au jour où un tel événement ne serait plus l'exception, mais la norme. Les heures précédentes avaient à la fois prouvé qu'il était réaliste de caresser de telles ambitions, mais que ce moment n'était pas encore arrivé.

Un autre moment qui n'est pas encore arrivé : celui où Montréal parviendra à battre Toronto en LPHF. Les représentantes de la Ville Reine ont remporté les cinq matchs entre les deux équipes cette saison. Leur plus récente victoire leur a permis de poinçonner le premier billet pour les séries éliminatoires.

En d'autres circonstances, un tel constat aurait pu avoir l'effet d'un affront, d'une insulte. Au podium, Poulin n'a d'ailleurs pu dissimuler entièrement son agacement face à cette réalité. Mais ce n'est pas le sentiment qui prévalait.

Samedi après-midi au Centre Bell, il suffisait qu'on s'aime.