(L'Italie s'est levée... premières paroles de l'Hymne national italien)

Il était tard. Plus de 5h30 après le match. La victoire était consommée depuis longtemps, mais les klaxons résonnaient encore comme un écho du cri qu'a poussé l'Italie toute entière après le but de Grosso. L'Italie et tous ses satellites, quartiers des grandes villes qui forment les diverses « Petite Italie ». Aujourd'hui tous ceux qui y circulaient étaient un peu Italiens ou le devenaient, portés par la vague bleue qui inondait les rues, éclaboussés par l'amour inconditionnel que vouent les tifosis à leur équipe. L'Italie a gagné. Elle a vaincu l'équipe la plus stable du tournoi, elle a renvoyé l'hôtesse à ses fourneaux. Vingt-quatre ans après son dernier sacre, contre l'Allemagne tiens donc, elle peut à nouveau rêver de gloire et de consécration.

L'Italie a aussi le sens du spectacle, on est pas la mère patrie de la commedia dell'arte pour rien. Alors qu'on se dirigeait tout droit vers une séance de tirs au but, historiquement favorable à l'Allemagne, alors que s'étiraient les dernières minutes de la prolongation, les joueurs de Lippi se mobilisent, débordent, pressent les Allemands et le coup de tonnerre s'abat sur le match. Le tir de Grosso dans la lucarne vient ponctuer une action éclatante de Pirlo. Par les maillons du filet secoué par le ballon du but, s'échappent les rêves de l'Allemagne. Et pour s'assurer que l'adversaire ne se relèvera pas, Del Piero ajoute le but d'assurance, le but d'assommoir.

La grande vedette du match aura été encore une fois Andrea Pirlo. Milieu de terrain infatigable, il alimente à la fois les avants tout en venant éclairer les défenseurs de sa présence. Pas que Cannavaro ait besoin d'une lumière d'appoint, il illumine à lui seul tout l'arrière droit du terrain, mais la présence de Pirlo chasse les ombres dans le jeu et sert de contrepoids à la fougue de Gattuso. Pirlo a le don de canaliser les efforts de tous en énergie positive.

La présence de Pirlo est essentielle à l'Italie, tout comme celle de Frings suspendu pour ce match (sur des images de l'échauffourée contre l'Argentine fournies à la Fifa par la télé…italienne) l'est pour l'Allemagne. Privée de son acolyte, Ballack trouvait moins facilement ses repères, le tandem Kehl-Borowski ne parvenant pas à faire oublier l'absence de l'autre.

L'Allemagne en sera réduite à jouer pour la troisième position, tentant de sauver l'honneur sur une dernière victoire. L'Italie aura les yeux rivés sur son prochain adversaire demain. France ou Portugal ? La revanche de l'Euro 2000 ou une nouvelle page d'histoire à écrire ? Zidane ou Figo ? Viera ou Deco ? On chantera la Marseillaise ou la Portugaise ? Réponse demain.