MONTRÉAL - Nick Kyrgios voudra probablement oublier rapidement la journée du 13 août 2015.

En l'espace de quelques heures à peine jeudi, il a été critiqué de toutes parts sur les réseaux sociaux, a reçu des amendes de l'ATP totalisant 12 500$, s'est fait chahuter sur le court secondaire du stade Uniprix et a subi l'élimination en troisième ronde de la Coupe Rogers.

Après la controverse, la défaite

Devant de nombreux spectateurs qui ont rempli presque à capacité le stade de 4269 sièges, l'Australien de 20 ans s'est incliné aux mains de l'Américain John Isner, 7-5, 6-3.

Kyrgios n'a pas joué un mauvais match, mais il a trouvé chaussure à son pied. Isner a été impeccable au service, ne concédant aucune balle de bris. Isner a réussi huit as - un de moins que son adversaire, mais n'a commis aucune double faute comparativement à trois pour Kyrgios. Mais deux de ces doubles fautes ont permis à Isner de concrétiser des balles de bris, une au 12e jeu de la manche initiale et l'autre, lors du huitième jeu du deuxième set.

Et en plus de compter sur tous ses atouts, Isner avait la foule de son côté. Kyrgios a été hué trois fois avant même que le match ne commence et une autre fois à sa sortie du court. Pendant le duel, les spectateurs ont plusieurs fois applaudi ses erreurs.

Des excuses tardives

Et alors que Kyrgios était assis dans une voiturette qui le transportait vers le salon des joueurs, quelques spectateurs s'en sont pris verbalement à l'Australien, l'un d'eux le traitant même de voyou. Mais Kyrgios n'a pas semblé trop ébranlé.

« Je m'y attendais en quelque sorte. Mais je ne veux pas enlever le mérite à John. Il a servi incroyablement bien encore une fois. Il avait déjà très bien servi à Madrid plus tôt cette saison. C'est la meilleure partie de son jeu. Il a été trop bon aujourd'hui », a noté Kyrgios.

Toute cette animosité faisait évidemment suite à la controverse survenue mercredi soir, lors de la rencontre entre Kyrgios et le Suisse Stanislas Wawrinka. Au début du deuxième set, Kyrgios, qui n'en est pas à une controverse près, a lancé une allusion selon laquelle son compatriote Thanasi Kokkinakis avait couché avec une joueuse qui serait l'amie de coeur de Wawrinka.

Si le commentaire a été fait sur un ton peu audible, alors que Kyrgios tournait le dos au terrain entre deux points, il a cependant été capté par les micros autour du court.

« Ce genre de comportement n'a pas sa place autant sur le terrain qu'à l'extérieur de celui-ci, et j'espère que les dirigeants du circuit vont sévir », a écrit Wawrinka sur Twitter.

Kyrgios, qui a accédé au troisième tour après que Wawrinka eut abandonné au troisième set en raison d'une blessure au bas du dos, a ensuite déclaré qu'il avait été provoqué.

« Il m'a apostrophé à quelques reprises donc, je ne sais pas, j'ai perdu mon sang-froid dans le feu de l'action, a confié Kyrgios en entrevue d'après-match. Je ne sais pas quoi dire, ç'a juste sorti comme ça. »

La réaction de l'ATP est venue jeudi matin, alors qu'elle a confirmé qu'une amende avait été imposée à Kyrgios. Le montant, le plafond selon les règles de l'ATP, a été précisé plus tard dans un bref communiqué. L'ATP avait aussi fait savoir qu'elle continuait de se pencher sur le dossier et que d'autres sanctions pourraient suivre.

Mais Kyrgios, qui a tenu une très brève rencontre avec les médias à peine dix minutes après son match, ne s'attend pas à d'autres réprimandes.

« Il n'y a pas de raison pour qu'il y en ait », a-t-il simplement répondu.

Malgré ce que pouvait penser Kyrgios, l'ATP lui a imposé une amende additionnelle de 2500$ pour conduite antisportive à la suite d'un commentaire adressé à un ramasseur de balles lors de son match contre Wawrinka. Et dans un autre communiqué, l'ATP a annoncé que les frasques de Kyrgios avaient lancé un « avis d'enquête », un processus qui pourrait mener à d'autres sanctions, incluant une suspension.

En début d'après-midi, à quelques heures de son match contre Isner, Kyrgios avait présenté ses excuses sur sa page Facebook.

« J'aimerais prendre le temps de m'excuser pour les commentaires que j'ai faits pendant mon match hier soir contre Stanislas Wawrinka. Mes commentaires ont été faits dans le feu de l'action et étaient inacceptables à de nombreux niveaux. En plus de mes excuses en privé, j'aimerais présenter mes excuses publiquement. Je prends l'entière responsabilité de mes gestes et je regrette ce qui s'est produit. »

Dans les heures qui ont suivi sa défaite, Wawrinka s'était exprimé sur son compte Twitter et avait vertement critiqué Kyrgios.

« C'est si décevant de voir un collègue et un athlète être si irrespectueux d'une manière que je n'aurais jamais imaginé », a écrit Wawrinka, en anglais.

« Ce qui a été dit, je ne l'aurais jamais dit à mon pire ennemi. De descendre si bas est non seulement inacceptable, mais dépasse totalement l'entendement. Il n'y a aucune place pour ce genre de comportement sur le court et à l'extérieur, et j'espère que l'organisme qui gouverne le sport n'acceptera pas cela et se lèvera pour protéger l'intégrité de ce sport que nous avons bâtie avec tant d'efforts. »

À Wimbledon, Kyrgios avait eu quelques altercations avec les arbitres. Il a notamment été accusé d'avoir volontairement cessé de jouer, d'avoir blasphémé à haute voix et d'avoir brisé une raquette de manière si violente qu'il a écopé d'une amende de 10 000 $. Il s'était incliné au quatrième tour devant le Français Richard Gasquet.

La légendaire nageuse australienne Dawn Fraser a dit qu'elle était dégoûtée par le comportement de Kyrgios à Wimbledon, déclarant sur les ondes d'une émission de télévision matinale qu'il « devrait donner un meilleur exemple pour la jeunesse de notre pays ».

Rod Laver, qui a complété le Grand Chelem à deux reprises dans les années 1960, a ajouté que l'attitude de Kyrgios l'empêchait de se développer comme tennisman.

« Nick est jeune et peut-être qu'il ne réalise pas toujours les gestes qu'il pose, a mentionné Laver. Il joue de façon émotive...c'est de toute évidence un aspect sur lequel il doit travailler, et il doit le faire le plus tôt possible. Il n'y a aucune excuse pour l'utilisation de profanités. C'est une mauvaise attitude, c'est laid. »

Lleyton Hewitt aura du boulot à accomplir à ce sujet comme entraîneur de Kyrgios. Hewitt, à son époque de joueur, avait pris de la maturité après avoir connu lui aussi des ennuis avec les autorités et les amateurs de tennis. Hewitt est le dernier Australien à avoir gagné un tournoi majeur, il a défait David Nalbandian en finale du tournoi de Wimbledon en 2002.

Kyrgios l'emporte dans la controverse