Olivier Aubin-Mercier a encaissé une troisième défaite d’affilée samedi dernier à l’UFC 240, à Edmonton. Le Québécois s’est incliné par décision unanime devant Arman Tsarukyan.

Je ne m’en suis jamais caché, je trouve que depuis quelque temps, Olivier a changé son style qui l’a amené à l’UFC. Avant, il se battait plus comme un lutteur, un grinder, au corps à corps, et il travaillait vraiment pour amener le combat au sol. Avec ses qualités athlétiques dans le jeu au sol, c’est là qu’il dominait ses adversaires. Parmi ses 11 victoires en carrière, 8 sont survenues par soumission. C’est sa grosse force. Aujourd’hui, on voit deux Olivier complètement différents.

Il disait être blessé lors des deux combats précédents, pourtant samedi sa stratégie n’a pas vraiment changé et il a fait exactement la même chose, ce qui l’a mené à sa perte. Au troisième round, quand le combat était égal au pointage, il est devenu un peu trop prévisible avec ses coups de pied. Il lançait seulement des coups de pied sans faire de set up avec ses mains et Tsarukyan attrapait toujours sa jambe. Il a aussi passé beaucoup trop de temps contre le grillage. Encore une fois, je trouve qu’il s’est dénaturé dans ses trois derniers combats et c’est mon humble opinion.

Il faut faire attention : oui on peut améliorer notre jeu, mais il ne faut jamais oublier d’où on vient et quelles sont nos forces. Peut-être qu’Olivier les a oubliées ou qu'il les a laissées de côté pour seulement se concentrer sur son combat debout. Ce n’est pas qu’il n’est pas capable d’exécuter le plan de match qui a été établi par toute l'équipe, il l’a déjà fait dans le passé. Reste que durant le combat, il faut être capable de s’adapter si la stratégie ne fonctionne pas. Clairement, dans les trois dernières défaites, on n’a pas été capable de s’ajuster au bon moment et ça donne de mauvais résultats quand même inquiétants.

Avec une troisième défaite consécutive, l’avenir d’Olivier est maintenant incertain puisque son contrat dans l’UFC est arrivé à terme. Il devient en quelque sorte un joueur autonome et ce ne sont pas de très bonnes nouvelles car il risque de ne pas signer de nouvelle entente. Rien n’est coulé dans le béton, peut-être que son gérant va être capable de sortir un lapin de son chapeau pour renouveler son contrat, mais ça ne regarde pas bien, surtout que ses dernières performances n’ont pas été des plus enlevantes.

Il va peut-être devoir aller refaire ses classes ailleurs. Ce n’est qu’hypothétique, mais est-ce qu’il oserait aller à Bellator? Je serais en tout cas étonné de le voir à TKO, mais tout dépend de l’adversaire qu’on lui propose, car je ne sais pas si la relation entre l’organisation québécoise et lui est très bonne. Je ne sais pas ce qui va lui arriver et je pense que lui-même est assez dans le néant. Au moment où on se parle, il n’est toujours pas en dehors de l’UFC donc c’est peut-être bon signe, mais ça regarde plus dans le négatif que le positif. Il n’y a pas de ratio de Canadiens à atteindre comme tel dans l’UFC. Tous les Canadiens qui se sont battus sur la carte préliminaire de samedi ont gagné, donc il y en a d'autres qui ont leur place. C’est sûr que ça nous touche un peu plus quand on parle de Québécois qu’on connaît et qu’on a vu grandir, mais dans le monde de l’UFC, que tu viennes de la Chine ou de Mars, ça ne change rien si tu as trois défaites de suite.

Barriault dans une position similaire

La situation est un peu similaire dans le cas de Marc-André Barriault, qui s’est incliné contre Krzsyztof Jotko.

Ce n’est pas le genre de performances auxquelles Barriault nous a habitués. Il semblait pesant sur ses jambes et il avait de la misère à exploser. Il travaillait moins en combinaison que d’habitude, il était beaucoup plus lent et on dirait qu’il avait un peu la crainte de se faire frapper. Rendu au troisième round, on a vu qu’il était fatigué. Jotko était mûr pour se faire passer le K.-O., il avait le menton haut et lui aussi était lent et fatigué. Mais comme Olivier, le travail de Barriault contre la cage lui a coûté le combat, il est resté trop longtemps contre la grille à accepter les attaques du Polonais.

Que ce soit une décision partagée ou non, ce n’était pas un combat enlevant et la foule a hué. Tu ne veux jamais ça quand tu te bats. Même si Barriault a signé un contrat valable pour quatre combats, l’UFC peut faire ce qu’il veut parce que ce n’est pas un contrat garanti. On ne lui souhaite pas de mauvaise nouvelle, on lui souhaite une troisième chance de prouver ce qu’il vaut. D’après moi, il est bien meilleur que ce qu’on vient de voir de lui. Sauf que la qualité des adversaires est beaucoup plus grande que chez TKO. Est-ce qu’il est vraiment rendu à ce niveau élite? La victoire était accessible contre Jotko et il n’a pas été capable d’aller la chercher. C’est un combat qui nous laissés sur notre appétit. 

Mon intention n’est pas de parler contre son équipe, loin de là, mais Barriault pourrait aller s’entraîner avec des partenaires plus expérimentés ayant plus de qualités athlétiques dans les arts martiaux mixtes et en tirer profit. Être le meilleur de ton gym, ce n’est pas toujours signe de réussite, ça peut aussi vouloir dire que tu commences à plafonner. Tu peux devenir trop confortable et t’asseoir là-dessus parce que tu n’as plus autant de bonne compétition. Tu peux rester avec le même gym, mais c’est aussi important d’aller chercher des outils ailleurs. Il y en a plusieurs qui s’exilent, qui vont s’entraîner ailleurs mais qui continuent de représenter la même équipe. C’est juste une bonne chose. À son dernier combat, on a vu un grand manque d’expérience. Barriault dit qu’il mérite sa place dans l’UFC et qu’il va rebondir, mais rien n’est garanti.

Spencer a gagné des partisans

Malgré sa défaite par décision unanime aux mains de Cris Cyborg, la Canadienne Felicia Spencer a impressionné beaucoup de monde avec sa capacité à absorber les coups en demi-finale du gala. Elle a tenu son bout et elle a blessé Cyborg, mais il manquait quelques détails techniques pour amener le combat au sol. J’aurais aimé ça qu’elle réussisse une amenée au sol pour la voir travailler dans son monde, profiter de ses forces, mais elle n’a pas eu les aptitudes pour le faire. En restant debout, Cyborg a donc été la meilleure.

Spencer est tout de même allée chercher beaucoup de fans dans sa première défaite en carrière. Si certains la connaissaient moins, maintenant tout le monde la connaît à cause de la bonne bagarre qu’elle a donnée.

Pour ce qui est de Cyborg, elle en était au dernier combat sur son contrat et on ne sait pas si elle va signer à nouveau. La relation entre elle et le président Dana White n’est pas la meilleure, ils se sont déjà envoyé des flèches sur les médias sociaux et en entrevue. Cyborg veut d’ailleurs que White s’excuse pour des propos qu’il a tenu à son endroit dans le passé, donc c’est peu prometteur, mais qui sait?

Pour ce qui est de Max Holloway, il a confirmé son statut en tant que meilleur poids plume au monde et peut-être même de l’histoire. Une 14e victoire de suite à 145 livres, c’est assez impressionnant.

Frankie Edgar n’a jamais été capable de trouver sa distance contre le champion et c’est ça la force d’Holloway. Du deuxième au cinquième round, ç’a été un combat à sens unique. Edgar n’a jamais été capable de le toucher. Pendant tout le combat, Holloway bougeait tellement, il contrôlait la distance et Edgar frappait dans le vide.

Malgré tout, Edgar est une légende de ce sport. Il a pris très mal la défaite et c’est normal. Quand tu te fais dominer à ce point et que tu sens que tu es autant à bout de ressources, c’est décourageant. Il ne semble pas prêt à s’arrêter à 37 ans. Ce n’est pas BJ Penn, il a encore de bons combats dans le corps, il est encore très compétitif. Je ne sais pas à quel point il lui en reste, mais d’après moi, c’était sa dernière chance de se battre pour le titre à moins de repartir sur une incroyable série de victoires.

Ça va être très dur de déloger Holloway de son trône en tout cas. Le prochain sur la liste d’aspirants est Alexander Volkanovski, qui est à peu près de la même grandeur qu’Edgar.

Covington doit passer de la parole aux actes contre Lawler

Samedi prochain, au New Jersey, Colby Covington sera opposé à Robbie Lawler chez les mi-moyens lors de l’évènement principal.

Les deux hommes se connaissent très bien parce qu’ils faisaient tous les deux partie d’American Top Team. Maintenant, il y a beaucoup d’animosité entre les deux hommes car Lawler est parti et il s’entraîne avec Henri Hooft.

J’ai toujours de la misère à parier contre Lawler. Vous le savez sûrement, c’est un de mes combattants préférés. Il donne toujours un bon spectacle. S’il y en a un qui est capable de faire dérailler un train, c’est certainement Robbie Lawler. Surtout après sa dernière défaite contre Ben Askren qui a été un peu controversée, je pense que ça lui a laissé un goût amer et qu’il va vouloir prouver son point. En plus, on a promis un combat de championnat du monde à Covington s’il gagne, donc ça va être une motivation pour Lawler qui ne voudra pas qu' on se serve de lui un peu comme un tremplin.

Covington, tu l’aimes ou tu ne l’aimes pas, et il y en a plus qui ne l’aiment pas. Il a une grande gueule, c’est un gros partisan du président américain Donald Trump et il ne s’en cache pas. Il a un air ultra arrogant, il fait du trashtalk et il est détestable. Souvenez-vous de Tito Ortiz : 50 % des gens payaient pour le voir gagner, 50 % pour le voir perdre, mais 100 % des gens voulaient le voir compétitionner. Je ne pense pas que Covington est rendu à ce niveau, mais reste qu’il livre la marchandise pour l’instant. Il a été champion intérimaire, c’est un bon lutteur, il est en excellente condition physique et il a aussi amélioré sa boxe. Si on parle juste de ses qualités athlétiques, c’est un excellent combattant, mais parce qu’il a une grande gueule, il se met de la pression encore plus puisqu’il doit passer de la parole aux actes.

Alors que Covington est le prochain en ligne pour affronter Kamaru Usman pour la ceinture, l’ex-champion Tyron Woodley attend son tour. Je pense que si Woodley signe une ou deux autres victoires, il pourrait avoir une autre chance de reprendre son titre, tout dépendant de la façon qu’il gagne et contre qui. Tout peut changer tellement vite, il ne faut pas toujours se fier au classement. Si l’UFC décide que c’est son tour, ça va être lui. On l’a déjà vu par le passé. Il faut plus se fier à l’intérêt du combat et à l’intérêt du public pour l'acheter.

*Propos recueillis par Audrey Roy