Première écurie américaine à disputer un Grand Prix depuis 30 ans, Haas a sauté à pieds joints dans l'histoire de la Formule 1 en marquant des points dès ses débuts grâce à la sixième place de son pilote français Romain Grosjean, dimanche à Melbourne.

« C'est une victoire! », a hurlé Grosjean dans la radio de bord, après avoir passé le drapeau à damier. Puis, toute l'équipe américaine, composée exclusivement de gens expérimentés venus d'autres écuries de F1, a tweeté une photo de famille prise dans ses puits après l'arrivée.

En déboulant en F1 avec de solides ambitions et une stratégie méthodique, Haas espère intéresser les amateurs américains de sport automobile, pour qui seules comptent traditionnellement les spécialités nationales que sont la NASCAR et l'IndyCar.

À la veille de ce GP historique, le patron de l'écurie, le magnat de la machine-outil Gene Haas, avait glissé : « Il va falloir que Romain fasse preuve de maturité. Son expérience va nous être précieuse cette année ».

Il ne croyait pas si bien dire. L'ex-pilote Lotus, pourtant parti 19e sur la grille, n'a pas attendu longtemps pour prouver qu'il avait fait le bon choix en rejoignant Haas à l'automne 2015.

Exploit

Aucune des trois écuries créées de toutes pièces en 2010, Manor/Marussia/Virgin, Hispania (HRT) ou Caterham, n'avait réussi un tel exploit lors d'un premier GP. Les deux dernières n'ont jamais marqué le moindre point en plusieurs saisons, et ont même disparu corps et biens depuis.

L'écurie Haas est, sans jeu de mots, bien mieux outillée pour se faire une place au soleil de la F1. Pour bâtir son projet, son milliardaire de patron a choisi ce qui se fait de mieux, en termes d'image et de performance : la Scuderia Ferrari, référence absolue depuis 1950, qui lui fournit des moteurs et une quantité de pièces (suspensions, etc.) autorisées par le règlement.

« C'est comme si on était montés sur la plus haute marche du podium », a exulté Grosjean sur la chaîne Sky Sports. « C'était une course et une fin de semaine invraisemblables. Je n'avais jamais eu de chance en Australie, mais là j'ai changé d'équipe et ça a marché. »

Éliminé dès le début des qualifications samedi, à cause d'un nouveau format déjà renvoyé aux oubliettes, le natif de Genève a parfaitement mené sa course et profité au maximum d'un effrayant accrochage entre son nouveau coéquipier Esteban Gutiérrez et son ancien coéquipier Fernando Alonso (chez Renault F1 en 2009), au 17e tour.

Stratégie

Le drapeau rouge qui a suivi, pour nettoyer les nombreux débris de carbone sur la piste et évacuer la McLaren d'Alonso, a permis à Grosjean de faire un gros bond au classement : il a choisi les bons pneus au bon moment, des gommes medium très résistantes, et a pu finir la course avec.

« La clé, c'était cette stratégie et l'arrêt aux puits provoqué par le drapeau rouge », s'est-il félicité.

Une issue méritée : au moment de l'accident, Grosjean avait gagné dix places en une quinzaine de tours et était déjà 9e.

« Ce n'était pas facile, je n'ai pas encore assez de repères avec cette voiture, il y a encore beaucoup de domaines dans lesquels on peut s'améliorer, mais ce résultat va doper le moral de tout le monde », a ajouté l'expérimenté Français, qui aura 30 ans le 17 avril et courait là son 84e GP (10 podiums).

De quoi attirer l'attention des amateurs aux États-Unis?

« Il y a deux choses qui les intéressent, c'est de savoir comment on va se débrouiller dans un sport "européen" et si on peut battre ces gars », assurait récemment Gene Haas. Pour ce qui est de « se débrouiller », c'est bien parti.