ANS, Belgique – Au tour de Bob Jungels! Le champion du Luxembourg, protégé par son coéquipier français Julian Alaphilippe, s'est adjugé dimanche Liège-Bastogne-Liège, la prestigieuse Doyenne des classiques cyclistes.

Pour gagner en solitaire, avec 37 secondes d'avance sur le Canadien Michael Woods et le Français Romain Bardet, crédité de son meilleur résultat dans une grande classique (3e), Jungels a anticipé à 20 kilomètres de l'arrivée, en haut de la côte très raide de la Roche-aux-Faucons.

Mais son rôle d'éclaireur au profit d'Alaphilippe, vainqueur mercredi de la Flèche Wallonne, s'est transformé au fil des kilomètres. Au fur et à mesure que l'écart grandissait jusqu'à atteindre 50 secondes au pied de la côte de Saint-Nicolas, à moins de 7 kilomètres de l'arrivée.

« Julian était le meneur après ce qu'il a fait mercredi », a expliqué Jungels. « J'ai essayé de partir à l'avant pour le mettre en bonne position et... personne n'est revenu. »

Derrière le champion du Luxembourg, un solide rouleur qui est aussi capable de briller en montagne, le groupe de chasse a payé sa mésentente.

L'Espagnol Alejandro Valverde, vainqueur sortant et l'un des deux grands favoris avec Alaphilippe, s'est retrouvé sans équipier. L'Irlandais Dan Martin a tenté en vain de relancer, tout comme le Belge Tim Wellens. La principale contre-attaque est venue du Belge Jelle Vanendert (3e de la Flèche Wallonne) dans la côte de Saint-Nicolas.

Vanendert s'est rapproché à une vingtaine de secondes sans parvenir à revenir. « J'étais à 110 % et Jungels était trop loin », a reconnu le Belge, qui a été repris dans la montée en paliers vers Ans, d'abord par le duo Woods-Bardet, puis par les autres poursuivants.

Le registre de Dumoulin

« Je n'y ai pas cru jusqu'au moment où j'ai franchi la ligne », a déclaré le vainqueur, qui est âgé de 25 ans. « Cela fait longtemps que je cours après cette performance. »

Jungels, au potentiel identifié de longue date, a donc enlevé le plus beau succès d'une carrière qui n'en est encore qu'à sa partie initiale. Vainqueur de Paris-Roubaix espoirs en 2012, le grand Luxembourgeois (1,89 m) peut briller sur toutes sortes de terrain, les pavés mais aussi la montagne et bien sûr les grands tours (6e du Giro 2016, 8e en 2017).

Son registre est proche de celui du Néerlandais Tom Dumoulin, le vainqueur du Giro 2017, bien plus que de son prédécesseur du Grand-Duché au palmarès de la Doyenne, Andy Schleck, vainqueur en 2009. C'est d'ailleurs pour le classement général qu'il espère courir en juillet le Tour de France au sein de l'équipe Quick-Step.

Son succès a complété la série de la formation Quick-Step, dominatrice dans les classiques de printemps malgré sa lourde défaite de Paris-Roubaix. L'équipe belge a notamment gagné le GP E3 et le Tour des Flandres (Terpstra) ainsi que la Flèche Wallonne (Alaphilippe).

Dans une configuration très tactique, elle a contraint dimanche ses rivales à jouer sur la défensive, comme elle l'avait déjà fait au Tour des Flandres. Avec le soutien d'Alaphilippe, qui a réglé le premier groupe de poursuite pour prendre la quatrième place au bout des 258,5 kilomètres.

« Jungels était très fort et l'on savait que toutes les attaques seraient annihilées. Derrière, il y avait un grand Julian (Alaphilippe) qui sautait sur tout ce qui bougeait », a salué Bardet, satisfait pour sa part de ce premier podium dans la classique qui lui est la plus chère.

Le Français (6e l'an passé) s'est projeté brièvement sur les prochaines éditions de la Doyenne : « J'étais un négligé. Je n'étais pas favori et je ne le serai certainement jamais. » Mais, chuchote-t-on en coulisses du côté des organisateurs, le final de Liège-Bastogne-Liège est appelé à changer dès l'année prochaine...