Ne manquez pas l'émission Trajectoires mettant en vedette Bruno Gervais, jeudi soir dès 23 h sur RDS et RDS Direct

Si vous voyez un jeune enfant pleurer à chaudes larmes en donnant ses premiers coups de patin, ne vous en faites pas. Peut-être qu’un jour, il accédera à la Ligue nationale de hockey.

Avant de devenir hockeyeur dans la LNH et analyste à la télévision, Bruno Gervais était un jeune garçon très timide. Pour l’aider à socialiser, ses parents l’ont inscrit au hockey. À ses débuts sur la glace, Gervais n’est pas confortable. Des larmes coulent sur ses joues et il se tient après les bandes, pressé de quitter la patinoire. Malgré tout, ses parents continuent de l’amener à l’aréna et il commence à y prendre goût. Surtout, il aime patiner de reculons et déjà, la position de défenseur semble lui être destinée. Sa mère Hélène Feeley voyait ses qualités en défense.

«On voulait qu’il passe la ligne bleue. Lui il restait... il ne rentrait pas dans la zone. Il ne voulait pas se faire compter. C’était vraiment drôle.  Je pense qu’il est né défenseur. On pouvait le voir des fois en arrière du gardien de but juste pour essayer d’arrêter les rondelles. »

Responsable et passionné, son fils prenait son rôle de défenseur au sérieux.

«Moi tout ce que je voulais, c’était de défendre, de protéger mon gardien. Puis il y avait aucune chance qu’un joueur se glisse derrière moi.»

À travers le hockey, le jeune homme gêné parvient à s’épanouir et sa vie sociale change du tout au tout. Au niveau atome, il fait la rencontre de Maxime Talbot. Les deux garçons aux personnalités diamétralement opposées montrent que les contraires s’attirent et deviennent de grands amis!

À l’adolescence, Gervais tire son épingle du jeu sur la glace mais il frappe un mur en raison de son petit gabarit lorsqu’il atteint le niveau bantam qui inclut les mises en échec. La saison suivante, alors que certains coéquipiers se préparent pour le camp d’entraînement du midget AAA, Gervais en surprend plusieurs et décide de ne pas se présenter. Le natif de Longueuil ne se sent pas prêt à graduer au niveau supérieur.

Persuadé d’avoir pris la bonne décision, il se présente rempli de confiance au camp midget AAA des Gaulois du Collège Antoine-Girouard la saison suivante. Apprécié de ses coéquipiers, le jeune homme rassembleur est nommé capitaine de son équipe. Après ses années midget, Gervais, qui priorise ses études, désire prendre le chemin des rangs universitaires américains, mentionnant même aux recruteurs de la LHJMQ de ne pas le repêcher! Sauf qu’au printemps 2001, le Titan d’Acadie-Bathurst vient mêler les cartes et sélectionne Gervais au premier tour. Tiraillé entre les rangs universitaires américains et la LHJMQ, Gervais fait de l’insomnie en pensant à ce choix important pour son avenir. Finalement, il décide de rester au Québec et se sent bien à l’aise dans l’uniforme du Titan. Grâce à ses qualités de leadership, Gervais se fait coudre la prestigieuse lettre C sur son chandail du Titan.

Tout comme le Titan, les équipes de la LNH ont remarqué les qualités de Gervais! En 2003, alors que les espoirs se dirigent vers Nashville en espérant entendre leur nom prononcé par une équipe au repêchage de la LNH, Gervais décide plutôt d’accompagner sa sœur à son bal de finissants. Le lendemain, il reçoit un coup de téléphone : les Islanders de New York l’ont repêché au 6e tour, 182e au total.

Âgé de seulement 18 ans, Gervais se présente au camp des Islanders l’automne suivant, sans grandes attentes. Impressionné par son nouvel environnement, le défenseur garde son calme sur la glace et surprend la haute direction. Cependant, des problèmes de gestions de personnel forcent les Islanders à le retourner avec le Titan. C'est un mal pour un bien puisqu'il aura l'occasion de réaliser son plus grand rêve : porter le chandail d’Équipe Canada junior. Sa place semble déjà assurée et Gervais fait partie de la même formation que son ami Maxime Talbot! Sauf que le rêve de Gervais se transforme en cauchemar lorsqu’il subit une blessure sérieuse à un genou pendant un entraînement. Sa carrière junior prend fin abruptement et les prochains mois seront éprouvants puisque Gervais doit subir une période de réadaptation pour renforcer son genou.

Tout est donc à recommencer pour Gervais qui doit ensuite aller faire ses preuves dans la Ligue américaine, avec les Sound Tigers de Bridgeport. Gervais ne ronge pas son frein, au contraire. Il donne de bons arguments aux Islanders pour l’appeler en renfort et mène les défenseurs de son équipe au chapitre des buts, se méritant une invitation au Match des étoiles de la Ligue américaine. C’en est assez pour convaincre les Islanders qui lui permettent de faire ses débuts dans la LNH, le 4 décembre 2005. Utilisé dans un rôle offensif, Gervais s’impose dans cette équipe en reconstruction et s’adapte rapidement à sa nouvelle vie à New York. Tout va bien sur la patinoire comme dans sa vie personnelle où il fait la rencontre de sa future femme Mélanie Carrier.

Gervais est heureux mais la vieille blessure subie à un genou dans le junior refait surface à sa sixième saison dans la LNH. Le défenseur reconnu pour sa mobilité, a peur de perdre sa place au sein de son équipe. Il se met donc en mode survie afin de poursuivre sa saison malgré sa blessure. D’autres blessures s’ajoutent par la suite et à seulement 27 ans, les choses se compliquent pour Gervais.  Découragé, il commence même à préparer son discours pour la retraite. Son contrat avec les Islanders arrive à échéance en 2011 et l’avenir devient sombre pour le hockeyeur.

Si Gervais a perdu confiance en ses moyens, le directeur-général du Lightning Julien BriseBois croit encore en lui et obtient ses services en retour de considérations futures. Son séjour sous les palmiers offre un deuxième souffle à sa carrière. Gervais retrouve le plaisir de jouer.  Sauf qu’au hockey, les choses peuvent changer rapidement! Après une saison agréable à Tampa Bay, son contrat prend fin et soudainement, plusieurs formations montrent de l’intérêt envers lui. Les Flyers (et Maxime Talbot!) parviennent à le convaincre de signer à Philadelphie. Sauf que la saison 2012 est retardée par un lock-out. Cet arrêt permet à Gervais et Talbot de s’occuper de leur fondation qui vient en aide aux enfants malades ainsi qu’aux enfants défavorisés. Ils lancent également une tournée pour amasser des fonds pour le hockey mineur. En janvier, le lock-out prend fin et les deux amis jouent enfin au sein de la même équipe. Malgré la présence de son ami, c’est une saison difficile pour Gervais et le défenseur est placé au ballottage au début de la saison suivante.

Est-ce que Gervais a donné ses derniers coups de patin dans la LNH? Pas tout à fait. Il tente sa chance avec l’Avalanche en 2014 puis se retrouve dans la LAH avant de prendre le chemin de l’Allemagne pour y jouer avec les Polar Bears. Il file le parfait bonheur en Europe et désire y établir sa famille, mais encore une fois….une blessure vient gâcher ses plans et c’est la blessure de trop! Si le cœur y est, le corps ne suit plus. Le poids des nombreuses blessures subies tout au long de sa carrière force Gervais à accrocher ses patins après 13 saisons dans le hockey professionnel. 

Ému, Gervais en parle encore avec un trémolo dans la voix. 

« Là, il fallait que je commence à penser à l’après. Il fallait que je commence à penser à une qualité de vie. Je regardais mon gars courir. Ça fait que j’ai regardé ma femme, elle le savait. J’ai dit : «Je me donne cinq minutes pour pleurer.» À ce moment-là, je savais que c’était fini. Il restait un an à mon contrat, mais j’allais vivre ma sixième opération majeure pour le bas de mon corps. »

Bruno, sa femme et leurs trois enfants quittent l’Allemagne et montent dans l’avion pour écrire un nouveau chapitre au Québec. Même si sa carrière de hockeyeur est chose du passée, Gervais est toujours aussi impliqué dans le monde du hockey. Il œuvre comme analyste sur les ondes de RDS depuis 2017 et il a l’occasion d’animer une émission avec son grand ami… Maxime Talbot. La boucle est bouclée!