MONTRÉAL – Le repêchage de la NFL approche à grands pas et la cuvée s’annonce excellente pour le Canada et le Québec. À un tel point que Benjamin St-Juste pourrait devenir le deuxième Québécois sélectionné le plus haut derrière Tshimanga Biakabutuka. 

En prévision de cet événement, la balado Le sac du quart a pu s’entretenir avec trois représentants du Québec qui attirent l’attention des recruteurs américains. St-Juste (Minnesota) est la tête d’affiche de ce trio qui est complété par Bruno Labelle (Cincinnati) et Pier-Olivier Lestage (Montréal). (NDLR: Un article, publié samedi, se consacrera à Labelle et Lestage.) 

Grâce à un Pro Day fort réussi pour sa charpente (six pieds trois pouces et 205 livres), St-Juste a fait grimper sa valeur en flèche en vue du repêchage. Alors que les rapports évoquaient plus souvent une sélection en quatrième ou cinquième ronde, le scénario de la troisième devient de plus en plus plausible. 

Benjamin St-JusteMais ce n’est pas tout, Mel Kiper fils, une sommité du réseau ESPN, a osé le classer dès la fin de la deuxième ronde (au 61e échelon avec les Bills de Buffalo) dans son repêchage simulé. 

« Avec tout le travail investi, c’est sûr que ça fait du bien de voir que des gens comme Mel Kiper me classent aussi haut. Mais je ne porte pas trop attention au classement. Après le repêchage, tu dois aller te battre pour un poste de partant. Je suis avant tout honoré d’être dans ce repêchage pour représenter Montréal et les Québécois. Il n’y a pas beaucoup de joueurs du Québec qui ont eu la chance d’être repêchés », a réagi St-Juste qui impressionne déjà pour sa maturité. 

Biakabutuka, qui a été choisi dès la première ronde par les Panthers de la Caroline en 1996, peut dormir en paix. Mais il pourrait devancer Tommy Kane qui a été repêché en troisième ronde, en 1988, par Seattle. 

Malgré son talent, St-Juste a eu besoin de temps pour réaliser son potentiel. En fait, il doit encore remercier ses parents, et surtout sa mère, de l’avoir incité à pousser davantage. Ce n’est qu’à sa saison recrue à l’Université du Michigan que la NFL est devenue accessible à ses yeux. 

« Quand j’étais jeune, il n’y avait pas beaucoup de joueurs québécois ou canadiens dans la NFL. C’est vraiment une question de représentation, d’avoir des idoles comme Laurent Duvernay-Tardif. C’était un rêve très lointain quand je grandissais. Mais avec moi et tous les autres dans le repêchage, la génération plus jeune peut se dire ‘J’aimerais être comme Benjamin, Bruno ou Laurent’. J’aimerais jouer un rôle dans ce sens pour donner plus d’espoir et de ressources aux jeunes », a décrit le demi de coin au physique attirant pour la NFL. 

Jusqu’ici, le Canada a surtout eu la tradition de produire des joueurs de ligne offensive et défensive, des ailiers rapprochés, des spécialistes des longues remises et des botteurs. Mais un demi de coin partant, ce serait un immense pas dans la bonne direction et ça le rend fier. Benjamin St-Juste

« Oui, c’est sûr, c’est très rare. Personnellement, après le quart-arrière, je trouve que c’est l’une des positions les plus difficiles à jouer. Ça exige beaucoup de technique de couvrir un receveur quand tu ne sais pas où il ira. De faire ce chemin et l’ouvrir aux jeunes, ça me tient grandement à cœur », a confié St-Juste. 

Ce ne sont pas que de belles paroles. Au contraire, St-Juste s’est impliqué dans une multitude de causes nobles incluant les inégalités raciales et la brutalité policière. Il était d’ailleurs dans l’épicentre de la crise au Minnesota avec le décès de George Floyd et le plus récent de Daunte Wright.   

« C’est très difficile, en tant que personne de couleur, de voir qu’aucun progrès ne se fait. On a essayé tous les moyens de verbaliser cette tristesse. Il faut continuer à éduquer et mettre l’accent sur les choses positives pour créer un changement », a exprimé St-Juste qui admire Colin Kaepernick pour avoir éveillé les esprits. 

Détenteur d’une maîtrise en gestion sportive et d’un baccalauréat en sociologie, St-Juste aura une multitude d’options après sa carrière de joueur comme un poste de marketing dans une grande organisation sportive, un promoteur, un agent, un gestionnaire sportif.  

Mais il n’attendra pas cinq, dix ou quinze ans avant de lancer des projets inspirants. 

« J’aimerais ouvrir un endroit comme un centre d’entraînement pour les jeunes à Montréal afin de leur donner plus de ressources pour leur parcours. En ce moment, je planifie d’organiser un camp à Montréal, sûrement au stade des Alouettes. Quand j’étais jeune, il n’y avait pas beaucoup de camps au Québec pour exposer notre talent contrairement à ce que l’on voit aux États-Unis. Je voudrais inviter des amis repêchés ou qui sont déjà dans la NFL pour que les jeunes puissent les voir question de leur donner de l’espoir et de la motivation », a conclu St-Juste qui a eu le privilège de s’entraîner à la Mamba Sports Academy, un projet fondé par Kobe Bryant, avant son décès.