Michel Therrien l’a dit sans détour au cours du dernier voyage : « Carey Price est notre meilleur joueur! » Il aurait pu ajouter qu’il est devenu le cœur et l’âme de son équipe et que, lorsqu’il est sur la touche, le Canadien de Montréal présente un visage bien différent à l’adversaire. Il ne peut y avoir une preuve plus éloquente que depuis la reprise des activités après la pause olympique. Sans son gardien numéro un, le Canadien devient éventuellement vulnérable contre les équipes d’une certaine envergure.

On a souvent tendance à juger de la qualité d’un gardien de buts par ses arrêts spectaculaires, son style acrobatique, sa façon de se déplacer dans sa zone de travail. C’est une erreur. Un grand gardien c’est aussi (et surtout?) celui qui est capable de constance, qui fait toutes les « petites choses » de la bonne façon avec régularité, qui réduit au minimum les erreurs d’exécution et de jugement, qui répare régulièrement les erreurs en défensive. C’est celui qui affiche calme et confiance dès le début d’un match et qui en vient à rassurer ses coéquipiers. C’est celui qui fait croire, pratiquement à chaque rencontre, qu’on peut battre n’importe quel adversaire, peu importe sa force. Et oui, au passage, il réussi aussi des arrêts « miraculeux », « vole » des matchs à lui seul, ici et là.

Le métier de gardien de buts est injuste, pour ne pas dire cruel. Les 18 patineurs qui évoluent devant lui sont fortement influencés, sans qu’ils le veuillent ainsi, par le rendement qu’il démontre, particulièrement tôt dans le match. Quand Peter Budaj a cafouillé sur le premier but des Sharks, en situation de supériorité numérique, on a senti dès lors que le Canadien a cessé de croire en ses chances de rivaliser avec son puissant rival. Il s’agissait d’une situation de jeu fort banale, ce genre de « petite chose » dont je parlais précédemment. Jeudi, à Phoenix, quand il a mal paru sur le quatrième but des Coyotes, ses coéquipiers ont cessé de croire au retour qu’ils avaient amorcé en deuxième période et les locaux ont vogué vers la victoire.

Il ne s’agit pas ici de condamner Budaj, loin de là. Le sympathique athlète excelle dans son rôle premier, soit celui d’adjoint. Utilisé avec la fréquence adéquate, contre des adversaires ciblés, il donne à son équipe exactement ce qu’on lui demande, parfois même plus, comme ce fut le cas lors des trois premières rencontres suivant les Jeux de Sotchi. Au-delà de cela, cependant, c’est trop demander ou trop…attendre.

On savait que ce voyage allait s’avérer extrêmement difficile pour le Canadien, dès la publication du calendrier l’été dernier. On espérait quand même pouvoir rivaliser avec les adversaires, revenir à la maison avec au moins trois ou quatre points. Compte tenu de la rigueur du calendrier et de la force de l’opposition, on réalise que sans Carey Price, cela était tout simplement impossible.

Michel Therrien à droite et Gerard GallantUn allègement salutaire

Après cette séquence éreintante de 7 matchs en 11 jours, épicée par le long voyage dans l’ouest, le Canadien va au moins profiter grandement de l’allègement du calendrier au cours de la prochaine semaine.

D’ici samedi, il n’y a qu’un match au programme, à domicile, contre Boston, mercredi soir. Cela veut dire du temps supplémentaire pour que Brandon Prust se sente encore mieux lors de son retour. Cela veut dire aussi, bien sûr, du temps précieux pour que Carey Price guérisse complètement sa blessure au « bas du corps ». Cela permettra par ailleurs aux « olympiens » de passer enfin un peu de temps à la maison!

Pour Michel Therrien, cela veut dire qu’il y aura finalement une occasion de faire du vrai travail de développement et de mise au point sur la patinoire, avec ses joueurs. L’entraîneur est parfaitement conscient que son équipe a acquis de mauvaises habitudes en certaines situations, dont lors des infériorités numériques. Il sait aussi que le jeu de puissance est prévisible, qu’il demande un peu de créativité et surtout, quelques bonnes répétitions générales. Il sait fort bien que les plus jeunes joueurs doivent accroître leur reconnaissance des situations de jeu et ainsi, agir avec plus de discernement sur la patinoire.

Ce sera aussi une bonne occasion d’intégrer Thomas Vanek au sein de l’équipe et d’adapter une portion du plan de match à ses qualités principales. Sans le placer au dessus du concept d’équipe, Vanek est un joueur acquis d’abord et avant tout pour ses qualités de marqueur. Daniel Brière, qui l’a bien connu à Buffalo, nous disait encore samedi à quel point il est dangereux à partir des cercles de mise en jeu jusqu’au filet. Or, si on veut profiter de cette nouvelle ressource, il faudra l’exploiter de la bonne façon et ne pas espérer davantage au-delà d’une certaine limite. Quelques bonnes séances d’entraînement ne seront pas de trop pour lui faire une place adéquate en attaque.