MONTRÉAL - À l’image de leurs coéquipiers, les jeunes défenseurs Justin Barron, Corey Schueneman et Jordan Harris ont très bien amorcé le match face aux Sénateurs mardi soir.

 

Fort de « l’effet Gallager » qui a salué son retour au jeu en enfilant le premier but de la rencontre, le Canadien avait le plein contrôle du jeu. Ce contrôle, le Tricolore l’a perdu après que Schueneman eut effectué une bien vilaine première passe. Du coin de la patinoire, alors que Jake Allen venait tout juste de lui remettre la rondelle, Schueneman a servi la rondelle à Auston Watson qui a profité d’un si beau cadeau pour niveler les chances.

 

Schueneman savait plus que quiconque qu’il avait commis une bourde.

 

Il a peut-être mal anticipé le virage de Rem Pitlick qui semblait être sa seule cible et qui s’est sorti du jeu en effectuant un virage brusque pour repartir à l’attaque. Cole Caufield était libre plus loin près de la bande, mais Schueneman n’a pas semblé le voir.

 

Il a commis une erreur. Pas question ici de clouer le jeune défenseur au pilori. Au contraire. Car cette erreur représentait à mes yeux l’occasion parfaite de mettre le jeune défenseur au défi.

 

Comment allait-il réagir après cette erreur coûteuse? Allait-il s’effacer? Allait-il se mettre à se débarrasser de la rondelle le plus vite possible pour éviter une autre gaffe? Allait-il réagir comme bien des jeunes dans la même situation auraient réagi?

 

Eh bien non!

 

Schueneman a continué à jouer. À bien jouer. Il a continué à amorcer de bonnes relances. À bien patiner. À appuyer l’attaque lorsque les situations lui permettaient de le faire. Il a décoché quelques bons tirs, dont un qui a frappé l’extérieur du poteau. Il s’est bien repris. Très bien même.

 

« Il a vite mis ça derrière lui, il est passé à autre chose et a travaillé », que le vétéran David Savard a souligné dans ses commentaires d’après-match.

 

Des commentaires toujours aussi élogieux à l’endroit de Schueneman, Barron et Harris qui démontrent beaucoup de vitesse, beaucoup de mobilité, beaucoup d’aptitudes offensives laissant entrevoir des jours meilleurs en matière de relances offensives orchestrées par les défenseurs du Canadien. Des commentaires que Savard risque de répéter souvent au fil des prochaines saisons alors qu’il pourrait assumer un rôle de parrain à l’endroit de ses jeunes coéquipiers.

 

Pas question de s’emballer, mais...

 

Pas question ici de s’emballer. Moins question encore d’associer les trois jeunes au « Big Three » sur qui le Canadien était solidement ancré à l’époque où Larry Robinson, Guy Lapointe et Serge Savard trônaient parmi les meilleurs défenseurs de la planète hockey au grand complet.

 

Le simple fait de déjà parler d’un autre « Big Three » serait absurde. Car il n’y aura qu’un et qu’un seul vrai « Big Three » dans l’histoire du Canadien et de la LNH.

 

Mais à la lumière des premiers matchs qu’ils ont disputés, il est permis d’avancer sans la moindre retenue que le « Young Three » du Canadien impressionne.

 

La façon dont Schueneman s’est repris après sa bourde est un bel exemple.

 

Vient ensuite la grande qualité du jeu offert par Justin Barron. Et je ne parle pas ici de son but. Son premier dans la LNH. Un très beau but marqué à l’aide d’un très bon et solide tir décoché alors que le jeune défenseur n’a pas hésité à faire une incursion en zone ennemie.

 

Je parle de l’aisance qu’il affiche dans toutes les phases du jeu : de sa manière de patiner à sa manière de transporter la rondelle. De la confiance surprenante qu’il affiche aussi. Du calme plus surprenant encore.

 

Un jeu me vient en tête.

 

Pendant une attaque massive du Canadien – le jeune arrière a passé 1:47 sur la patinoire en supériorité numérique – Barron s’est fait mettre dans la vase jusqu’au cou par Joel Armia. Il ne restait que quelques secondes à écouler à la pénalité. Barron était à la ligne bleue ennemie, à quelques enjambées de la sortie du banc des pénalités. Au lieu de garder la rondelle en fond de territoire, Armia, qui est pourtant un vétéran qui devrait avoir des notions en défensives, a bêtement remis la rondelle à la pointe. Barron a alors eu à composer avec une rondelle sautillante arrivant devant lui et un joueur des Sens décidé à faire oublier sa pénalité derrière lui.

 

Barron s’est sorti du trouble sans le moindre problème.

 

Jordan Harris?

 

Je l’ai vu sortir gagnant de plusieurs bagarres à un contre un dans des circonstances pas toujours évidentes. Il a tenu tête à Drake Batherson à la ligne bleue ennemie pour priver les « Sens » d’une relance qui aurait pu être dangereuse, car il ne restait que Jake Allen derrière Harris sur la séquence.

 

Il a non seulement tenu tête, mais renversé, Brady Tkachuk à la gauche de Jake Allen alors que les Sénateurs tentaient de s’installer en zone du Canadien.

 

Il a cadré les deux tirs qu’il a décochés en direction du filet ennemi.

 

Il a joué du bon hockey.

 

Mousser la confiance et non la miner

 

Après le match, j’ai demandé à Martin St-Louis sur quels éléments il se concentrait dans son analyse du travail de ses jeunes défenseurs : les buts? Les passes? Le coup de patin? Les mises en échec?

 

« La lecture du jeu », que St-Louis a répondu.

 

« J’accorde moins d’importance à ce qu’ils font avec la rondelle qu’avec toutes les informations qu’ils prennent avant d’être en possession de la rondelle. Pas juste pour les jeunes, mais pour tous les joueurs », que le coach a ajouté.

 

Quant à l’erreur commise par Schueneman, St-Louis ne lui en tenait pas rigueur. « Les intentions étaient bonnes. Ce n’est pas le genre de jeu qui va me pousser à garder un jeune au banc et miner sa confiance. Surtout avec les bonnes minutes qu’il nous donne depuis qu’il est ici et les bonnes minutes qu’il a encore données ce soir. Même si l’échantillon est petit, je suis très satisfait de ce que nous donnent nos jeunes défenseurs. »

 

Pour reprendre l’expression du coach, il est clair que les membres du « Young Three » savent lire. C’est un très bon début.

 

Cela dit, plus de prendre des décisions visant à mousser la confiance de ses jeunes défenseurs au lieu de la miner, Martin St-Louis compte sur l’expérience de Luke Richardsson pour bien diriger les Schueneman, Barron et Harris – on peut ajouter Romanov à la liste – afin de leur apprendre à lire plus vite.

 

« Luke est un coach calme, confiant et méticuleux. Son approche permet de mettre les jeunes en confiance sur la patinoire. Elle permet aux jeunes de progresser en acceptant d’être dirigés et d’être corrigés quand c’est nécessaire. Sa manière de faire les choses assure que les jeunes ne se sentent pas menottés ou étouffés quand ils sont invités à corriger certaines choses. Ça aide énormément leur développement. »

 

Vrai que l’échantillon est encore trop mince pour établir de grandes conclusions. Mais les premiers matchs disputés par Justin Barron, Corey Schueneman et Jordan Harris permettent de regarder l’avenir avec une dose d’enthousiasme qui faisait défaut depuis longtemps à la ligne bleue du Canadien.