MONTRÉAL – Pour le défi particulier qui se dresse devant les équipes de hockey aux Jeux olympiques de Pékin, les dirigeants de la formation canadienne ont opté pour une troupe alliant un noyau d’athlètes expérimentés et de la jeunesse.

L’entraîneur-chef Claude Julien a confirmé que cette approche était la plus logique aux yeux de l’état-major assemblé pour ce rendez-vous.  

« On possède un bon mélange de jeunes et de vétérans, on croit que l’expérience va nous aider à gérer certaines situations. Il y a toujours de l’adversité dans un tel tournoi et ça pourrait survenir dans la qualité de notre jeu ou être en lien avec la COVID-19. C’est important d’avoir des gars expérimentés qui sont en mesure de calmer les choses dans le vestiaire. Quand on a fait la sélection, on a choisi les joueurs pour créer la meilleure équipe et avoir un bon équilibre de ce côté », a exposé Julien en visioconférence à partir de Davos où le club tient un camp d’entraînement jusqu’au 1er février. 

Logiquement, les jeunes qui ont réussi le tour de force de se qualifier dans ce groupe sont ceux qui peuvent tenir le coup contre des athlètes plus vieux. L’attaquant Mason McTavish et le défenseur Owen Power l’ont déjà prouvé et le gardien Devon Levi a été suffisamment convaincant. 

« On a vu ce qu’il peut faire, il peut gérer cette compétition contre des hommes. Il a été dominant au Championnat mondial junior (même si ce fut bref), ses habiletés sont évidentes et il est bon pour conserver la rondelle. Il mérite vraiment sa place », a précisé Julien à propos de McTavish alors que les doutes sont pratiquement inexistants envers Power. 

L’autre objectif de Julien, de ses adjoints et du directeur général Shane Doan était d’assembler un groupe qui pouvait cadrer dans la vision canadienne. La tâche n’était pas si facile en devant surtout piger en Europe, dans la NCAA et à quelques exceptions dans la Ligue américaine de hockey. 

« Le défi est de jouer de la même façon que le Canada l’a toujours fait. On est reconnus pour notre jeu agressif, de foncer vers la rondelle rapidement et de gagner les bagarres le long des rampes. On mise sur beaucoup de joueurs rapides avec un bon gabarit. On croit qu’on y parviendra avec les joueurs choisis, j’en suis très confiant et on espère le démontrer », a noté Julien. 

Ça demeure que le Canada doit se débrouiller avec des athlètes qui ont peu, ou pas, d’expérience ensemble contrairement à bien des formations qui seront présentes à Pékin. D’ailleurs, le Canada n’a pas réussi à mériter l’or sans les joueurs de la LNH depuis 1952. 

Julien n’est toutefois pas effrayé par cette mission de « dernière minute ». 

« Ce n’est pas tant un gros défi, on doit simplement être bien préparés et être prêts à s’ajuster », a-t-il lancé après un premier entraînement. 

Les nombreuses heures de recrutement, surtout sur vidéo, ont permis aux entraîneurs d’imaginer le portrait concret des trios et des duos en défense. 

« L’avantage d’avoir ce camp, c’est de réunir ces joueurs et voir si ça clique. On espère avoir formé nos combinaisons avant de quitter la Suisse », a admis l’entraîneur qui a pu mieux connaître plusieurs de ses protégés avec le processus de la Coupe Channel One. 

C’est possiblement devant le filet que les points d’interrogation persistent alors que Levi détient moins d’expérience qu’Edward Pasquale et Matt Tomkins. 

« La compétition sera importante à cette position. Pour ce début de camp, personne ne peut dire qui sera assurément notre gardien numéro un », a reconnu Julien. 

L’une des questions invitait Julien à comparer une présence en finale de la coupe Stanley à cette aventure olympique.

« Quand j’ai accédé à la finale, je me suis avant tout assuré de bien préparer tout le monde et je vais faire la même chose ici. On vise l’or, c’est vraiment ce que l’on veut. Je me sens extrêmement chanceux d’y participer », a répondu l’entraîneur de 61 ans. 

De la déception au grand bonheur

Parmi les vétérans sélectionnés, le nom d’Eric Staal attire l’attention. Ignoré par les équipes de la LNH après son long parcours éliminatoire avec le Tricolore, le joueur de 37 ans a poursuivi l’entraînement sans imaginer que ça le mènerait à cette expérience olympique. 

« Je le faisais pour revenir dans la LNH, mais on traverse des années inédites. Cette occasion est tout simplement trop attirante pour ne pas la saisir », a commenté Staal qui a eu l’appui de sa femme et ses enfants pour s’éloigner pendant quelques semaines. 

Bien sûr, Staal ne sera pas le patineur le plus explosif sur les surfaces glacées chinoises, mais Julien et ses collaborateurs considèrent que son expérience est incontournable. 

« Grâce à tout son parcours, la valeur de Staal est inestimable et il arrive avec la bonne attitude pour aider à créer la chimie recherchée », a mentionné Julien. 

D’après les dires de Julien, les quatre parties disputées par Staal avec le Wild de l’Iowa, dans la Ligue américaine, ont permis de confirmer qu’il pourra encore contribuer sur la patinoire et pas uniquement comme meneur. 

Staal a savouré l’or en 2010, aux JO de Vancouver, mais il s’est embarqué dans un projet déstabilisant cette fois. Il se mesurera à plusieurs athlètes dont il ne connaît pas les forces et les faiblesses. 

« Ce sera différent, c’est certain. Mais je sais que la préparation d’Équipe Canada est meilleure que celle de tous les pays peu importe l’événement. Je suis certain que nos entraîneurs connaissent tous les joueurs et leurs tendances. De plus, ça demeure du hockey, ça passe par le désir des athlètes », a réagi Staal. 

Ce dernier saut olympique lui permettra de côtoyer des jeunes qui, comme le disait un collègue, portaient des couches quand il a entamé sa carrière dans la LNH. 

« Dans chaque équipe que j’ai eu du succès, il y avait un bel équilibre entre la jeunesse et l’expérience. C’est agréable de voir ces jeunes s’entraîner et développer leurs habiletés, ça procure de l’excitation et de l’énergie. Quand tu as des jeunes aussi talentueux, c’est un privilège et je vais les suivre pendant des années », a déclaré le gaucher avec un sourire au visage. 

Staal avait toutes les raisons d’être heureux. Après avoir encaissé le coup d’être ignoré par la LNH, il savourera chaque seconde de ce projet olympique. 

« C’est juste amusant de voir comment les choses se déroulent parfois. Je le vois comme un autre chapitre dans mon parcours et j’espère qu’il se finira de la façon espérée. Si ça va bien et que j’y contribue, on verra ce qui se présentera ensuite », a conclu Staal qui a joué 1293 parties dans la LNH.