SOMMAIRE DU MATCH

BUCAREST, Roumanie - Champions du monde au tapis! La France a pris la porte de l'Euro dès les huitièmes de finale, victime de la Suisse et d'une irrespirable séance de tirs au but (3-3, 5-4 t.a.b), chapitre final d'un scénario fou, lundi à Bucarest.

Immenses favoris avant la compétition, renforcés sur le papier par le retour inattendu de Karim Benzema et victorieux du « groupe de la mort » devant l'Allemagne et le Portugal au 1er tour, les Bleus ont brusquement pris la poussière dans la National Arena de la capitale roumaine, au bout d'un huitième totalement indécis qui envoie la Suisse affronter l'Espagne vendredi à Saint-Pétersbourg.

Les 22 642 spectateurs de la National Arena garderont des souvenirs impérissables de cette séance de tirs au but, couronnée par la tentative manquée de Kylian Mbappé, le plus malheureux des Tricolores, qui termine l'Euro sans but au compteur. 

« La tristesse est immense après cette élimination. Je suis désolé pour ce penalty. J'ai voulu aider l'équipe mais j'ai échoué », a écrit Mbappé sur ses réseaux sociaux.

La France nourrira d'immenses regrets et beaucoup d'incompréhension. Éteinte pendant 55 minutes, flamboyante pendant les 25 suivantes, méconnaissable durant le dernier quart d'heure et exténuée en prolongation, la sélection championne du monde sera passée par toutes les émotions.

Mais c'est bien la tristesse et l'abattement qui la dominent après 120 minutes d'une bataille intense, entre exploits flamboyants et erreurs défensives manifestes.

« Il faudra le temps de digérer mais c'est sans doute qu'on ne méritait pas plus », a regretté le sélectionneur français Didier Deschamps.

Sous contrat jusqu'au Mondial-2022, il a estimé que son avenir n'était « pas la question » et a donné rendez-vous au prochain rassemblement des Bleus en septembre.

« C'est évidemment une énorme déception, a regretté le défenseur Raphaël Varane sur TF1. On a été à réaction ce soir, on a manqué notre première mi-temps. Il nous a manqué de tout. Et sur cette deuxième mi-temps, on réussit à réagir. Et ensuite, on a laissé trop d'espaces et donc ils sont revenus dans le match alors qu'on avait deux buts d'avance. »

« Le seul regret qu'on peut avoir, c'est qu'à 3-1, on doit certainement mieux gérer le match », a abondé le gardien et capitaine Hugo Lloris.

Fin du plafond de verre

Certains signaux avant-coureurs s'étaient certes fait sentir dans les derniers jours, comme la fatigue ou les blessures de nombreux remplaçants, mais rien ne laissait présager une telle déroute des partenaires de Mbappé.

La Nati n'avait jamais battu la France en grande compétition, c'est contre elle qu'elle brise enfin son fameux « plafond de verre » qui l'empêchait jusque-là de remporter le moindre match à élimination directe. Les hommes de Vladimir Petkovic rejoignent un quart de finale de grande compétition pour la première fois depuis le Mondial-1954.

« À 3-1, personne ne croyait plus à nous, mais avant le match on s'était dit: quoi qu'il arrive, quel que soit le scénario, on va jusqu'au bout, jusqu'au bout, a déclaré le gardien suisse Yann Sommer. Quart de finale: C'est l'Histoire. On voulait absolument le faire, on est fiers. »

Mario GavranovicAbattus par le doublé de Haris Seferovic (15e, 81e) et un but tardif de Mario Gavranovic (90e), les Tricolores rentrent à la maison après les huitièmes d'une grande compétition, une première dans leur longue et glorieuse histoire.

Ils emmèneront dans leurs valises des regrets, mais surtout énormément de doutes, après un Euro marqué par les blessures, les ajustements incessants et une préparation physique questionnée.

Lundi, Didier Deschamps a ainsi aligné un troisième schéma tactique en quatre rencontres de l'Euro, avec trois défenseurs centraux. L'échec fut total, tant à la perte du ballon que sur le choix du nouvel entrant (Lenglet), qui n'avait plus joué la moindre minute depuis le 16 mai avec Barcelone et s'est montré totalement passif sur l'ouverture du pointage.

Cette errance tactique symbolise une compétition où maîtrise n'aura pas été le maître-mot: surpris et exténués par la chaleur à Budapest où ils ont joué leurs deux derniers matches, les Bleus ont aussi connu des blessures, dont celle de Lucas Hernandez, qui a cruellement manqué pour solidifier l'arrière-garde et apporter de la confiance.

Magie par instants

Les regrets seront d'autant plus forts qu'en seconde période, le trio d'attaque des Bleus avait enfin montré toute sa magie, juste après l'arrêt d'Hugo Lloris sur un penalty de Ricardo Rodriguez (55e), lorsque Karim Benzema est venu conclure une beauté de combinaison avec les deux compères de l'attaque, Mbappé et Griezmann (57e). Hugo Lloris

Le tableau affichait encore 1-0 pour la Suisse, il allait afficher 2-1 pour la France quelques instants plus tard, après un nouveau dédoublement entre Grizou et Kyky, encore conclu par KB9 (59e), pour son deuxième doublé en cinq jours.

À ce moment-là, toutes les imprécisions s'envolèrent dans le ciel lourd et humide de Bucarest, d'autant que Paul Pogba avait creusé l'écart d'une frappe somptueuse (75e).

Elles revinrent d'autant plus soudainement sur la réduction du score de Seferovic (81e), puis sur l'égalisation de Gavranovic (90e). Avant un dernier soupir signé Kingsley Coman, qui a touché la barre juste avant la fin du temps réglementaire. Le mal était peut-être déjà fait, car la Nati semblait programmée pour sortir victorieuse de la bataille. 

Son gardien Yann Sommer, parfait pour arrêter le tir au but de Mbappé, l'a prouvé en envoyant sa sélection dans un rêve, et renvoyer les Bleus à leurs cauchemars.