LAVAL – Chaque épreuve, chaque déception recèle le potentiel d’une salutaire introspection. Pour l’Impact de Montréal, le positif qui se cache derrière sa plus récente déconvenue est assez simple à identifier.

En bousillant, en l’espace de quelques minutes, une avance en apparence confortable face au Orlando City SC lors de l’ouverture de sa saison locale en fin de semaine, l’Impact a commis exactement la même erreur qui le guette à l’approche de son prochain défi, soit la protection des acquis chèrement gagnés lors du premier match de sa série aller-retour face à L.D. Alajuelense en demi-finale de la Ligue des champions.

Et donc, 48 heures après ce nul avalé de travers sur le terrain du Stade olympique, les hommes en bleu étaient de retour au boulot avec une importante leçon à assimiler. Même s’ils atterriront bientôt au Costa Rica avec une priorité de deux buts au score, il y a encore loin de la coupe aux lèvres. Ça n’a jamais été aussi évident.

« Il faut apprendre de nos erreurs. Un 2-0, c’est le pointage le plus dangereux. Si vous marquez le troisième but, c’est pratiquement terminé. Mais si vous laissez l’adversaire s’inscrire au tableau, toute la pression se retrouve sur vos épaules », exprimait un Frank Klopas méfiant, mardi, lors du retour à l’entraînement de son équipe. 

« Ça aurait été super d’obtenir trois points samedi, mais c’est derrière nous maintenant. Notre regard est fixé sur un objectif complètement différent. Il ne nous reste qu’à saisir notre chance. C’est loin d’être terminé, mais notre sort est entre nos mains », a ajouté l’entraîneur.

Titularisé pour la première fois de la saison samedi, Wandrille Lefèvre a vécu de près la déconfiture express subie aux mains de l’un des deux clubs d’expansion de la MLS. Pour le défenseur d’origine française, cette déception doit servir d’avertissement sérieux au Bleu-blanc-noir.

« J’espère qu’on aura l’intelligence d’esprit de faire ce constat. D’autant plus qu’à mes yeux, c’est beaucoup plus facile de perdre une avance de deux buts en commençant un nouveau match de 90 minutes dans un environnement hostile que lorsqu’on est à la maison et qu’on mène 2-0 après une vingtaine de minutes », estime Lefèvre.

Cet environnement hostile, ce sera l’enceinte protégée par les gradins rouge et jaune du stade Alejandro Morera Soto, un amphithéâtre vieux de plus de 70 ans, doté d’une surface artificielle et pouvant contenir environ 18 000 spectateurs, où le club local semble, disons-le, plutôt à l’aise. Depuis le début de l’année 2015, la Liga Deportiva Alajuelense a remporté cinq de ses huit matchs à domicile par un pointage cumulatif de 24-10. C’est notamment là qu’elle a infligé une raclée de 5-2 à D.C. United en quarts de finale de la Ligue des champions.

Les joueurs de l’Impact s’attendent donc à devoir dompter un animal complètement différent de celui qui s’est laissé mettre en cage sans grande résistance lors de la première confrontation entre les deux équipes.

« L’histoire du foot le prouve et l’histoire dans notre club le prouve, prévient Lefèvre. Si on revient cinq ans en arrière, on voit bien qu’on peut gagner 2-0 chez soi et qu’une fois rendu là-bas, ce n’est plus du tout le même match. Même si tu as les mêmes joueurs en face de toi, tu as l’impression que ce n’est plus du tout la même équipe. Ça ne sera pas évident. Ça va être difficile, même, mais il ne faut pas que cet enjeu nous tétanise. »

« Je m’attends à une atmosphère complètement folle, envisage Jack McInerney, auteur de son premier but de la saison contre Orlando. On sait que tous les billets ont été vendus depuis longtemps. On a aussi entendu dire que la surface n’est pas très bonne. En bout de ligne, il nous faudra simplement oublier où on est et se concentrer sur ce qu’on doit faire. Ce que leurs partisans diront ou feront, ça n’a pas d’importance. Si on se tient et qu’on joue en équipe, on va bien s’en sortir. »

« Il faut se le dire, ça va être difficile, anticipe Hassoun Camara. Il faudra s’armer de patience et de courage, mais on va tout faire pour être prêt le jour J. »

Un copier-coller

Pour Frank Klopas, la crevaison qui a forcé l’Impact à laisser deux points dans le fossé en fin de semaine ne nécessite pas de grands ajustements techniques. Un petit resserrement de l’état d’esprit collectif devrait suffire.

« Plus que tout, on doit s’assurer de retrouver la bonne mentalité, croit l’entraîneur. Il nous faudra adopter la même approche que celle qui nous avait permis de connaître du succès lors de notre premier match contre eux. On avait alors très bien défendu, tout le monde avait joué de façon agressive et notre concentration était à point. On aura besoin d’une performance semblable. »

Prêchant pour sa paroisse, McInerney aimerait bien voir l’Impact mettre toutes ses cartes sur la table et tenter d’achever sa proie dès le premier coup de sifflet. « Ça serait l’idéal. On ne sait jamais, peut-être que les entraîneurs vont demander à cinq joueurs de foncer vers le filet adverse dès le début du match. Avec un but de plus, on se retrouverait en assez bonne position. Deux buts de plus et ça serait pratiquement dans la poche », rêvassait le jeune attaquant.

Klopas a quelque peu grincé des dents lorsque mis au parfum de l’opinion de McInerney. « Jack n’est pas l’entraîneur... », a-t-il fini par laisser tomber avant d’offrir sa propre vision de la situation.

« Ce sont eux qui auront la pression de pousser l’action pour marquer des buts. De notre côté, un 0-0 nous permettrait de poursuivre notre chemin, alors il nous faudra bien gérer le match. On sait qu’ils sortiront en lions, alors il nous suffira d’être prêts pour l’assaut et de garder notre concentration, particulièrement pendant les 15 ou 20 premières minutes. Si par malheur il fallait leur faire un cadeau, ça pourrait avoir un dangereux effet d’entraînement. Si la chance se présente d’attaquer, bien sûr qu’on le fera. Mais la pression devrait venir de l’autre côté. »

La stratégie préconisée par l’Impact dépendra également des effectifs qui seront à la disposition du sélectionneur. Plusieurs joueurs clés ont obtenu congé d’entraînement mardi. Andrés Romero et Nigel Reo-Coker ont observé les exercices à distance tandis que Marco Donadel et Dilly Duka se sont prêté à une série d’exercices en retrait du groupe.

« On verra comment ils se sentiront dans quelques jours », a laissé planer Klopas.

Maxim Tissot et Laurent Ciman, qui ont déserté le club pour répondre à l’appel de la nation, rejoindront leurs coéquipiers cette semaine et seront du voyage au Costa Rica comme prévu.

Klopas a également confirmé qu’Evan Bush, remplacé devant le filet pour le match contre Orlando en raison d’une blessure à une jambe, sera en mesure d’affronter Alajuelense mardi prochain.

Des conditions idéales

Comme ce fut le cas lors de la semaine qui avait précédé la visite de leurs adversaires costaricains à Montréal, les joueurs de l’Impact ont le luxe de pouvoir aborder le match retour sans avoir à diviser leur attention entre deux missions.

L’Impact devait affronter les Red Bulls samedi à New York, mais un accord conclu avec la MLS et l’équipe de la Grosse Pomme lui a permis de repousser le duel au 7 octobre. L’équipe s’envolera donc pour l’Amérique latine samedi avec dans ses bagages une semaine complète de préparation exclusivement consacrée à ses rivaux du sud.

« On a eu deux jours de congé pour évacuer la déception du week-end et dès aujourd’hui, on est en train de penser au Costa Rica au lieu de penser à New York. Ça fait une grande différence en terme de préparation », apprécie Lefèvre.

« C’est bon pour nous, approuvait Klopas. Avec toutes les petites blessures avec lesquelles on doit composer, ce n’est pas facile de jouer dans deux championnats en même temps. Ça permettra à certains de guérir des petits bobos et d’être prêts à faire feu quand le temps sera venu. »

Alajuelense, pendant ce temps, disputera un match du championnat costaricain dimanche sur le terrain du C.S. Cartaginés.