PLG a encore soif après 20 ans de succès
Sports extrêmes samedi, 19 août 2017. 07:15 dimanche, 10 nov. 2024. 02:01MONTRÉAL – Il n’y a que les athlètes d’exception qui demeurent au sommet de leur sport pendant 20 ans. Même s’il demeure méconnu sur ses terres d’origine, le planchiste Pierre-Luc Gagnon constitue l’un des rares Québécois pouvant se vanter d’un tel accomplissement.
Gagnon a littéralement tout gagné sur la planète du skate à commencer par neuf médailles d’or dans le cadre des prestigieux X Games. Frappé par les blessures au cours des dernières années, le spécialiste de la rampe verticale aurait le droit de se la couler douce en renonçant au volet compétitif.
Mais, même à 37 ans, Gagnon ne se sent pas prêt pour cette étape.
« Je vais essayer de continuer le plus longtemps possible, tant que mes commanditaires vont me supporter et que mon corps va me le permettre. C’est certain que ça devient plus difficile », a raconté Gagnon qui est en visite à Montréal dans le cadre du Jackalope, l’immense festival de sports d’action qui se poursuivra jusqu’au 20 août à l’Esplanade du Stade olympique.
Gagnon ne pouvait pas s’en douter au départ, mais ses récentes blessures ont déclenché un effet positif.
« C’est un nouveau défi dans ma carrière de retrouver la forme et bien faire en compétition. Je n’essaie pas de me vanter, mais ça peut devenir répétitif quand ça fait 20 ans que tu fais ça et que tu as gagné toutes les compétitions plusieurs fois. Ce n’est pas que c’est amusant d’être blessé, mais ça redonne de la motivation », a-t-il expliqué.
Mais, avant tout, Gagnon est parvenu à cette longévité grâce au travail exécuté en amont.
« Il n’y a pas beaucoup de gars qui s’entraînent en dehors du skate. Ils veulent juste faire de la planche et ça finit là. Dans mon cas, j’ai toujours essayé de rester en bonne forme. J’ai fait plusieurs choses préventives pour rester en forme et m'éloigner les blessures », a ciblé Gagnon qui s’entraînait quatre fois par semaine en plus des heures à dompter les rampes.
Bien sûr, un tel sport extrême exige également une bonne dose de jugeote pour éviter des catastrophes.
« Parfois, il faut aussi être intelligent, prendre les bonnes décisions, essayer des manoeuvres selon tes capacités et éviter des choses niaiseuses sur lesquelles tu peux te blesser. Quand tu connais tes capacités et comment tomber, tu vas être capable de bien gérer ça. Il faut être capable de voir les chutes venir. Normalement, quand tu te fais mal, c’est sur une chute inattendue. C’est comme ça que je me suis déchiré le PCL (le ligament croisé postérieur de genou) », a enchaîné le volubile athlète.
Malheureusement, sa plus récente blessure l’empêchera de rivaliser d’adresse au Jackalope. Cette sixième édition promet avec la présence du légendaire Tony Hawk, un pionnier du sport, qui épate encore à 49 ans.
« Ce sera vraiment spécial de le voir faire une démonstration à Montréal. Je compare ça à assister à un spectacle de Pink Floyd », a imagé Gagnon qui limitera sa participation puisqu’il n’est pas suffisamment rétabli d’une fracture à une cheville.
Gagnon devra fort probablement faire son deuil sur un autre événement et pas le moindre. Après avoir contribué à la reconnaissance de son sport, il aurait adoré exposer ses habiletés dans le cadre de l’entrée de la planche à roulettes aux Jeux olympiques en 2020. Cependant, la rampe verticale n’a pas été retenue comme épreuve.
« Ce ne sont pas vraiment mes disciplines et je vais aussi avoir 40 ans. Je serai rendu vers la fin de ma carrière, mais je veux m’impliquer d’une façon ou d’une autre. Ce sera super bon pour la popularité du skate, ça va aider les gars à bien gagner leur vie en ouvrant la porte à nouveaux commanditaires », a exprimé celui qui serait notamment intéressé par un rôle d’analyste ou d’entraîneur pour un programme olympique.
Un look pour la vie
Gagnon commence à être trop vieux pour les Jeux olympiques, mais ça ne paraît en rien dans son apparence. Casquette sur la tête, t-shirt stylisé sur le dos, il donne l’impression de ne pas vouloir vieillir.
En réalité, c’est surtout qu’il demeure fidèle à son identité.
« Je ne crois pas que je vais modifier mon apparence. Je vais être un skateboarder toute la vie et je ne pense pas que l’âge va changer ça », a répondu Gagnon qui rigolait en songeant que son père porte plusieurs des chandails qu’il lui donne.
À ce sujet, Tony Hawk lui donne raison. On dirait que le temps n’a aucun effet sur lui et son style, même à l’approche de la cinquantaine.
« C’est un mode de vie. Même si je prends ma retraite, je ne vais pas arrêter de faire du skate. Je vais y aller avec mon fils ou être impliqué dans l’industrie d’une façon ou d’une autre », a expliqué Gagnon.
Le Québécois pourrait justement utiliser sa réputation et sa notoriété pour lancer un projet d’affaires dans ce domaine.
« C’est vrai, mais je n’ai pas tellement eu le temps. J’ai été assez occupé dernièrement à m’entraîner et être un bon père. Je ne veux pas être un père qui est absent. C’est plate d’être blessé, mais ça me donne plus de temps pour être avec lui et m’en occuper », a-t-il réagi.
Une passion, peu importe laquelle
À peine âgé de 3 ans, son fils manie déjà la planche à roulettes et disons que ça promet pour la suite. Cela dit, Gagnon rêve d’une seule chose pour son garçon.
« Je ne veux pas le pousser dans rien de spécifique, je veux seulement qu’il ait une passion assez rapidement. Je trouve que beaucoup de jeunes ne sont pas capables de trouver ce qu’ils aiment ou ce qu’ils veulent. Ils se promènent d’une chose à l’autre et ils sont parfois un peu perdus. Je l’encouragerais autant pour suivre mes traces ou pour devenir avocat », a lancé le papa qui était accompagné de son fiston et sa copine pour sa visite à RDS.
Quand il s’arrête plus longtemps pour y penser, Gagnon reconnaît que son univers n’est pas de tout repos.
« Le skate, c’est quand même un milieu éprouvant. Ça m’arrive de me dire que ce serait plus facile qu’il devienne un joueur de baseball par exemple », a noté celui qui a grandi à Boucherville.
La sécurité financière ne se compare pas non plus aux réalités du baseball ou du hockey. Année après année, Gagnon doit se fier à l’appui de ses commanditaires.
« Même si ça fait 20 ans que je fais du skate et que j’ai gagné toutes les compétitions, ça m’arrive d’être inquiet. Ça fait deux ans que je suis blessé et je ne veux pas me faire lâcher par mes commanditaires », a avoué le planchiste qui a très bien pu gagner sa vie en Californie où il s’est établi à l’âge de 20 ans.
« Au moins, financièrement, je n’ai pas été trop niaiseux avec mon argent. J’ai la chance de ne pas avoir à me lancer dans un autre travail immédiatement. Je peux prendre mon temps et penser à ce que je veux faire dans l’avenir », a conclu Gagnon qui pourra continuer de parcourir la planète en famille grâce à ses exploits.