Ce qui devait être l’un des plus beaux moments de la jeune carrière de Félix Auger-Aliassime le 27 août dernier a tourné au cauchemar. Aux prises avec des palpitations cardiaques, c’est au bord des larmes que le Québécois de 18 ans n’a pas été en mesure de conclure son match de premier tour des Internationaux des États-Unis contre son bon ami Denis Shapovalov.

Tirant de l’arrière 4-1 au troisième set après avoir enlevé les honneurs de la deuxième manche, Auger-Aliassime a dû se résoudre à l’évidence et a mis de côté le moment présent en annonçant son retrait de la compétition. Un incident malheureux certes, mais qui est loin d’avoir abattu le principal intéressé qui a su remonter en selle avec aplomb.  

« C’était sans doute l’événement le plus difficile que j’ai vécu dans ma carrière jusqu’à maintenant. Jamais je ne pensais en entamant ce match que je ne pourrais pas le finir », a confié Auger-Aliassime lors d’un généreux entretien avec le RDS.ca.

« J’étais prêt à tout. J’étais prêt pour la bataille, je me sentais bien physiquement, mais j’ai eu le problème de palpitations au cœur. C’était difficile d’arrêter mon premier match dans un tableau principal en Grand Chelem. Malgré tout, j’ai bien rebondi par la suite. J’ai bien joué et je suis parvenu à grimper au classement. »

Impossible de le contredire sur ce dernier point. Un peu moins d’un mois après son abandon, le Québécois se retrouve en Chine pour y disputer les quarts de finale du tournoi de Chengdu où il s’incline devant Bernard Tomic. Il avait écarté cependant au passage la 23e raquette mondiale Hyeon Chung au tour précédent. Le principal intéressé qualifie d’ailleurs cette victoire comme l’un des faits saillants de sa saison.

« Je dirais que c’était une belle confirmation de pouvoir battre un joueur dans le top-30. C’était un moment très important pour ma confiance », a souligné celui qui avait également un coup de cœur pour son parcours à la Coupe Rogers.

Le Québécois a enchaîné au début du mois d’octobre avec son deuxième titre de la saison alors qu’il a été couronné au Challenger de Tashkent en Ouzbékistan. S’il disposait aisément en finale du 178e joueur au monde Kamil Majchrzak, l’athlète de 18 ans en a profité pour ajouter un autre joueur du top-100 à son tableau de chasse grâce à une victoire devant Denis Istomin (87e).

Ce gain lui a permis de se rapprocher un peu plus de son objectif du début de la campagne alors qu’il cogne à la porte du top-100.  

« Je pense que je suis en plein où je devrais être par rapport à mon niveau. J’avais terminé la dernière année près du 160e rang et je m’étais donc fixé comme objectif de terminer la suivante dans le top-100, mais j’ai eu quelques blessures et j’ai eu un début d’année plus difficile que je pensais », a révélé celui occupe le 109e échelon au classement de l'ATP.

Après une seule victoire à ses cinq premiers matchs pour débuter l'année 2018, le vent a tourné en mars pour Auger-Aliassime alors qu’il est parvenu à se qualifier pour le tableau principal du tournoi d’Indian Wells. Il en a profité pour signer sa première victoire sur le circuit professionnel de l’ATP devant son compatriote Vasek Pospisil. C’est un autre Canadien, Milos Raonic, qui lui a alors montré la porte de sortie au deuxième tour de ce Masters 1000. Ce parcours a mis la table pour une deuxième moitié de saison prometteuse.

« J’ai connu de bons moments après Roland-Garros, je pense avoir très bien joué lors de la deuxième moitié de la saison ce qui peut me permettre aujourd’hui de me positionner parmi les 100 meilleurs au monde. Il reste encore quelques échelons à grimper d’ici la fin de l’année et je vais travailler fort pour y arriver », a soutenu celui qui a préféré prolonger sa saison sur terre battue après Roland-Garros au lieu de tenter sa chance sur gazon, ce qui lui a permis d’être sacré champion pour une deuxième année de suite à Lyon.

Ces triomphes contre Pospisil, Istomin et Chung s’ajoutent à celui enregistré devant Lucas Pouille à la Coupe Rogers de Toronto. De quoi faire réaliser au Canadien qu’il a sa place parmi l’élite et qu’il est sur la bonne voie.

« C’est bien pour ma confiance. Ce sont de belles victoires que je qualifierais de repères. Je dois être capable de répéter ce scénario plus souvent et je vais en avoir la chance en grimpant de plus en plus au classement. Je devrai m’installer à ce niveau et gagner plus en plus de match contre ces joueurs », a convenu Auger-Aliassime.

Éviter le jeu des comparaisons

Un chemin qu’est parvenu à suivre Shapovalov au cours de la présente campagne. Après avoir connu une ascension fulgurante à l’été 2017 après avoir atteint notamment le carré d’as de la Coupe Rogers et le quatrième tour à Flushing Meadows, l’Ontarien de 19 ans s’est hissé dans le top-40 en mai dernier, plateau qu’il n’a plus quitté depuis.

En raison de leur nationalité, de leur âge et parcours respectif, il est aisé pour tout un chacun de comparer les deux jeunes vedettes montantes du tennis au pays. Même s’il convient que l’exercice peut se faire facilement, Auger-Aliassime ne cherche pas à se prêter au jeu notant avec justesse que chaque individu suit son propre parcours avec ses hauts et ses bas.

« La comparaison est facile à faire entre Denis et moi. On l’a fait personnellement et les médias aussi la font, car nous avons joué chez les juniors ensemble et nous sommes de bons amis », a-t-il mentionné.

« Je pense par contre qu’on se concentre tous les deux sur ce qu’on a à faire respectivement afin de devenir de meilleurs joueurs de tennis. Je ne pense pas que nous devions nous comparer sur ce que l’autre fait ou même avec d’autres joueurs juniors. Chacun a ses bons moments et le succès peut survenir à des périodes différentes. Nous pourrons comparer le tout à la fin de nos carrières. »

Il est déjà tentant de se demander à quoi ressemblera leur feuille de route respective à ce moment, mais rien ne sert de se projeter trop loin. Les deux protagonistes n’ont d'ailleurs pas de minces ambitions pour la suite des choses.

Shapovalov a donné l’eau à la bouche aux amateurs de tennis lorsqu’il est venu consoler son bon ami à sa chaise alors qu’il était forcé de mettre un terme à leur affrontement lors du dernier Grand Chelem de la saison. La 30e raquette mondiale a lancé à son ami que les deux allaient se retrouver sur un tel terrain et peut-être même lors d'une finale. Une idée qu’est loin d’écarter l’adversaire potentiel tout en maintenant qu’il reste encore beaucoup de travail à faire avant d’y parvenir.

« C’est motivant! Je pense que c’est notre rêve à tous les deux de disputer une finale en Grand Chelem ensemble. C’était une belle pensée sur le moment. »

« On sait tous les deux par contre qu’il y a encore beaucoup de chemin à faire avant d’en arriver là. De m’avoir dit ça après le match par contre, ça m’a permis de voir le portrait global et de réaliser qu’il y aura d’autres occasions », a-t-il convenu.

Bien qu’ambitieux, le Québécois peut toujours espérer participer au tournoi regroupant les meilleurs joueurs de la nouvelle génération du 6 au 10 novembre prochain. L’ATP tiendra pour une deuxième fois une finale Next Gen du côté de Milan qui regroupera les sept meilleurs joueurs de 21 ans ou moins ainsi qu’un invité de nationalité italienne. Auger-Aliassime occupe présentement le 13e rang de cette liste à un peu plus de 200 points du Russe Andrey Rublev, finaliste de la dernière édition, qui détient actuellement le dernier billet.

Comme son sort en vue de ce tournoi n’est pas entièrement entre ses mains, Auger-Aliassime se concentre sur son prochain défi qui sera du côté de Vienne où il a obtenu un laissez-passer. L’athlète de 18 ans s'attend à être suffisamment remis d'une ampoule à un pied qui l'a forcé à abandonner à Anvers afin de prendre part à la compétition. Il saura ensuite s'il peut participer au dernier tournoi de la série 1000 de la saison à Paris, sinon il optera pour un ultime Challenger en France.