C'est une journée triste pour le Québec et pour toutes les familles de la province dont le baseball permettait les rapprochements. Je ne peux m'empêcher de penser aux familles qui se rendaient au Stade pour assister aux matchs et où les enfants avaient le droit d'argumenter avec leurs parents sans se faire gronder car ils pouvaient donner leur opinion parce qu'il était question de baseball.

Il y a aussi le côté coeur mais il y a aussi le côté économique. Bien des gens ont craché sur les Expos ces dernières années mais saviez-vous que la présence de l'équipe à Montréal générait de retombées économiques d'environ 100 millions. Je ne savais pas que le Québec était assez riche pour laisser filer une telle source de revenus et ce, annuellement.

Je pense que l'amateur de baseball va vivre le deuil des Expos plus difficilement que moi. Lui, il se déplaçait pour assister aux parties. Moi, c'était mon travail mais aussi une passion. Personnellement, je ne coupe pas les liens avec le baseball car je vais continuer à travailler pour RDS, à écrire pour le Journal de Montréal alors, je ne le vivrai pas de la même façon. Montréal vient de perdre une partie de son patrimoine.

Il est trop facile de dire que Montréal n'avait plus les moyens de se payer une équipe de baseball. Ce sont les guerres internes entre les différents groupes de propriétaires qui ont tué le produit. Il y a eu la guerre entre Claude Brochu et son groupe et la guerre entre Jeffrey Loria et son groupe. Je ne veux toutefois pas pointé personne du doigt. La seule chose que je peux déplorer, c'est la mauvaise gestion quant à la signature ou non des joueurs et la manque de volonté de conserver l'équipe à Montréal. Ce point n'est certes pas la faute des partisans.

On a toujours en tête les ventes de feu pour expliquer la perte d'intérêt de amateurs mais les gens oublient que le départ de Charles Bronfman a été la plus grosse perte de l'histoire. Bronfman avait deux choses essentielles pour être un bon propriétaire: la passion du baseball et l'argent.


Jeffrey Loria

Dès, le jour où Loria a annoncé que le contrat de commandite de 120 millions de la Brasserie Labatt pour la construction d'un nouveau stade ne tenait plus, j'ai su que c'était le début de la fin des Expos.

Il y a des gens d'affaires de Montréal qui avaient les moyens de sauver l'équipe et lui assurer un avenir ici mais ils n'étaient pas prêts à la faire.

Si Montréal n'est pas une ville de baseball, elle n'est pas plus une ville de hockey ou une ville de football où les concessions majeures appartiennent à des Américains. Où sont nos gens d'affaires du Québec? Ça fait deux ans que je pose la question: comment peut-on dire que Montréal est une ville de sport quand les franchises sportives professionnelles appartiennent à des mains étrangères.

Quelle est la responsabilité corporative de nos entreprises qui font des profits avec les consommateurs sans investir dans le milieu dans lequel elles vivent. Elles refusent d'investir car elles savent qu'elles vont subir des pertes financières. Pourtant, ces mêmes gens d'affaires font beaucoup des profits dans d'autres champs d'activités. Cette non-implication donne comme résultat que nos équipes ne nous appartiennent plus.

Les entreprises, qui ont joint Brochu pour former une société en commandite, étaient sincères dans leur volonté d'assurer l'avenir de l'équipe à Montréal. Le problème, c'est qu'elles refusaient d'investir de nouvelles sommes pour le bien de la formation. C'est comme si vous achetiez une maison sans la meubler.

D'un autre côté, l'équipe n'a pas reçu d'appui corporatif pour la vente d'abonnement de saison. Si l'équipe était déménagée dans un nouveau stade, cet appui si important du milieu des affaires aurait été au rendez-vous.

La construction d'un nouveau stade aurait été un des éléments majeurs pour assurer la survie de l'équipe. Les revenus auraient augmenté et une course au championnat aurait permis d'attirer des foules importantes. Un nouveau stade ne solutionne pas tous les problèmes mais si l'équipe est dans une course, les gens vont aller encourager l'équipe locale.


L'héritage des Expos

À court terme, le départ de l'équipe n'aura pas d'incidence sur les jeunes qui jouent au baseball mais dans une dizaine d'années, les choses seront différentes. C'est la prochaine génération de joueurs qui sera affectée. Est-ce que les jeunes qui vont naître dans les prochaines années vont vouloir jouer au baseball?

Dans la communauté, les gens vont conserver pleins de beaux et moins beaux souvenirs. Il y aura les belles années des Expos et il y aura aussi la mauvaise gestion des propriétaires.

Un des héritages de l'équipe a pour nom Youppi. Cette mascotte est impliquée depuis des années dans communauté. Il suffit de voir le visage des enfants s'illuminer dans les hôpitaux pour voir à quel point cette peluche est importante. C'est pourquoi je souhaite que Youppi demeure actif malgré le départ de l'équipe. Je verrais très bien Youppi se joindre au Canadien et demeuré impliqué auprès des gens.

Personnellement, le match des étoiles présenté à Montréal le 13 juillet 1982 constitue mon plus beau souvenir. C'était la première partie d'étoiles présentée à l'extérieur des États-Unis.

Puis, il y a les débuts de l'équipe en avril 1969 et il y aura la fin ce week end. Ironiquement, ces deux événements importants auront eu lieu au même endroit, le Shea Stadium de New York.

*propos recueillis par RDS.ca