MONTRÉAL - Avant le retour d’Adonis Stevenson dans le giron du Groupe Yvon Michel, la machine à knock-out de la boxe québécoise avait pour nom David Lemieux.

Le jeune prodige alors dans la jeune vingtaine couchait ses adversaires à un rythme effréné et les vétérans censés lui donner de l’opposition s’écroulaient tous les uns après les autres.

Ironiquement le même soir où Stevenson revenait à Montréal en avril 2010, Lemieux subissait sa première défaite aux poings de Marco Antonio Rubio et voyait s’envoler en fumée la perspective d’un lucratif contrat à long terme avec le réseau américain HBO.

Les semaines et les mois qui ont suivi n’ont pas été de tout repos, Lemieux et son entraîneur de toujours Russ Anber décidant de mettre fin à leur association. Le cogneur a également perdu son combat de retour contre Joachim Alcine en plus de se fracturer la main droite après avoir frappé dans un mur. Mais comme la vie est bien faite, le temps semble avoir arrangé les choses.

Deux ans et demi et six combats plus tard, Lemieux est pratiquement de retour là où il était avant d’affronter Rubio. Une victoire face à Fernando Guerrero ajouterait instantanément son nom à la liste d’adversaires potentiels au champion des poids moyens de la WBO Peter Quillin.

Mais en quoi le Lemieux au dossier parfait est-il différent de celui d’aujourd’hui? Parce que son discours n’a pas véritablement changé depuis le temps. Il a toujours la volonté de passer sur le corps de ses rivaux et ne donne pas l’impression de vouloir faire des concessions à ce sujet.

« Vous allez être ici jusqu’à tard ce soir, si je vous explique tout ce qui a changé », a répondu le cogneur lorsque l’auteur de ces lignes lui a posé la question, après un entraînement public tenu lundi après-midi au Théâtre Corona de Montréal. « Il y a tellement eu de changements! »

« Il y a surtout beaucoup de temps qui s’est écoulé », a ajouté son entraîneur Marc Ramsay. « Il y a d’abord eu une transformation physique. David a vieilli et la nature a bien fait les choses. Il est passé de la fin de l’adolescence à l’âge adulte. Il est beaucoup plus mature physiquement. »

Dans les faits, personne n’avait jamais douté du talent de Lemieux. Anber avait expliqué qu’il souffrait de la « maladie du cogneur » au moment de l’annonce de leur séparation. Ces propos ont visiblement dérangé le principal intéressé, puisqu’il refuse d’aborder cette période de sa vie.

« Il y a certaines choses qui ont été dites à mon sujet, mais c’est du passé et je ne veux plus en parler », a expliqué le Montréalais. « Tout ce que je peux dire, c’est qu’il ne faut pas juger un livre par sa couverture. J’ai fait les changements pour devenir champion et le rester longtemps. »

Si Lemieux est manifestement récalcitrant à entrer dans les détails, Ramsay laisse néanmoins poindre quelques indices qui permettent de comprendre en quoi son protégé maintenant âgé de 25 ans est différent. Le duel de samedi soir sera leur 8e depuis le début de leur collaboration.

« David prend maintenant le temps d’écouter et de comprendre les choses. Il s’agit d’une évolution naturelle », a précisé Ramsay. « Il est aussi passé d’un gymnase où il était le roi de la montagne à un autre où c'est extrêmement compétitif. Cela l’a amené à un autre niveau. »

« Pendant le camp d’entraînement en vue du combat contre Guerrero, David est resté bien concentré. Nous lui avons opposé des partenaires américains afin qu’il puisse vivre tout ce qui pourrait se passer pendant ce combat-là. La pire chose qui pourrait lui arriver, c’est une surprise. Nous nous sommes assuré qu’il soit capable de gérer tout cela. »

Mais comme il y a toujours une part d’imprévu dans chaque combat, il sera intéressant de voir comment Lemieux réagira à ce moment-là.