À la suite de son triomphe contre Daniel Cormier lors du UFC 182, le plancher se dérobe sous les pieds du champion des mi-lourds Jon Jones. Il devra faire face à une bien différente tempête médiatique au lendemain des révélations de traces de cocaïne dans son organisme lors d'un test antidopage en décembre.

Au-delà de l’utilisation en tant que telle d’une drogue dure par un ambassadeur sportif, il y a l’épineuse question éthique que plusieurs souhaitent poser à Dana White et aux dirigeants de l’UFC : pourquoi est-ce que le combat du 3 janvier s’est-il déroulé comme prévu?

Jon Jones demeure champion

Lors d’une entrevue diffusée sur le réseau FOX, aux États-Unis, Dana White a admis avoir été mis au parfum de ces tests avant la présentation de l’évènement, contrairement à Jon Jones et son équipe. Le dirigeant de l’organisation admet ensuite ne pas avoir envisagé l’annulation du combat.

« Non, tranchait-il sans hésitation à la suite de la question. Premièrement, Jones était en santé. Deuxièmement, les raisons d’annuler un combat sont normalement liées à un test positif pour un produit visant à augmenter la performance. »

Comme la cocaïne n’est pas sur la liste des substances interdites de la Commission athlétique du Nevada, même s’il s’agit d’une drogue illégale aux États-Unis, White et l’UFC n’étaient pas dans l’obligation de suspendre les activités de Jon Jones. C’est la ligne de parti utilisée par White afin d’expliquer la décision de ne pas révéler les résultats avant le combat. Même Daniel Cormier, l’adversaire de Jones, n’était pas au parfum de l’histoire.

Un secret bien gardé par une poignée d’initiées – jusqu’à ce que l’histoire éclate, par erreur, au grand jour.

En effet, la découverte de cocaïne dans le système de Jones est une erreur d'exécution de la part du docteur en poste ce jour-là. Normalement, les tests pour détecter la cocaïne et les autres « drogues de rue » ne sont pas effectués lors des tests antidopage. On cible seulement les substances interdites en plus des niveaux de testostérone. Comme les résultats de Jones dans ces deux domaines ne contenaient pas d’anomalies, la Commission n’est pas intervenue avant la présentation de l’affrontement entre lui et Cormier.

Mais aurait-elle dû?

La question mérite d’être posée dans la mesure où la consommation de cocaïne, contrairement à celle de la marijuana, n’est pas décriminalisée, ni même tolérée, aux États-Unis. De plus, il est inquiétant de constater que cette révélation est le produit d’une erreur et non d’une vigilance de la part des médecins et de l’UFC. Sans le savoir, est-ce que l’équipe de la Commission athlétique a ouvert une boîte de Pandore sur laquelle s’assoyait l’organisation reine des arts martiaux mixtes?

Au moment d’écrire ces lignes, Dana White n’a pas annoncé de sanctions à l’endroit de Jon Jones. Pourtant, le code de conduite de l’UFC est clair : des mesures disciplinaires peuvent être appliquées lors d’usage criminel de produits dopants et de drogues illégales. Par le passé, le couperet est tombé sur des combattants lors de tests positifs pour l’usage de marijuana, entre autres. Jones, au cœur des campagnes promotionnelles de l’organisation, s’en sort indemne pour l’instant.

Deux poids, deux mesures. Est-ce que l’un des plus haut salariés de l’organisation bénéficie d’un passe-droit en raison de sa place de choix au sein de l’entreprise?

Ces questions, ainsi que plusieurs autres sur l’intégrité du sport, font mal à l’image publique de l’UFC qui ne cache pas ses ambitions de globalisation depuis quelques années. Avec ces révélations, et la réaction plutôt cavalière de Dana White en support à son champion, les mauvaises presses pourraient se multiplier en ce début d’année.

Devrait-on destituer Jones afin de calmer les feux? On pourrait lui permettre, dans la foulée, de vivre sa désintoxication à son rythme, loin des caméras, sans la pression de venir défendre son titre cet été. D’un autre côté, est-ce qu’une destitution serait une sanction trop sévère pour le champion qui, techniquement, n’a pas triché? Si Jones avait eu des problèmes d’alcool lors de son camp d’entraînement, la question ne se poserait pas. Mais le sujet des drogues dures est beaucoup plus délicat et sensible dans l’œil du public. Plusieurs compétiteurs de Jones, par ailleurs, n’ont pas caché la déception de voir le champion sortir de cette histoire sans même une tape sur les doigts.

Un déroulement qui ne va pas sans rappeler les « sanctions-bonbons » administrées à Ray Rice par Roger Goodell avant l’explosion du scandale à la suite de la diffusion publique des vidéos de sécurité des tristes évènements de violence conjugale.

Jon Jones, Dana White et l’UFC font face à un scandale d’image qui pourrait traîner en longueur. Pour l’instant, les actions des parties impliquées ne sont pas satisfaisantes dans la mesure où on tente de pousser l’histoire sous le tapis avec des intentions à peine voilées. Qui plus est, un copinage dérangeant émane des différentes entrevues de White et on pourrait croire à l’entretien d’une culture de « Boy’s Club » qui n’a plus sa place en 2015.

Si l’UFC souhaite devenir un sport légitime dans l’opinion du grand public, elle devra agir en fonction de ses ambitions. Pour l’instant, l’inconsistance des actions laisse malheureusement à désirer.

Souhaitons que Jon Jones règle ses problèmes personnels en pensant à lui d’abord et avant tout. Souhaitons ensuite une politique plus transparente de la part de Dana White et de l’UFC. Le favoritisme n’est plus à la mode dans le monde du sport de nos jours.