Lors des dernières négociations en 2010, les joueurs de la LCF avaient accepté de laisser tomber la question du partage des revenus à la demande de la ligue qui les suppliait de le faire.

À l'époque, la ligue jurait qu'elle n'avait pas les reins assez solides et qu'elle ne pourrait pas survivre si on adoptait un partage des revenus. Pour aider le circuit, les joueurs avaient consenti à se serrer la ceinture, tout en expliquant qu'ils reviendraient à la charge quand la ligue serait plus solide. Les membres de l'Association des joueurs ont tenu parole et reviennent maintenant à la charge étant donné que les assises de la LCF sont mieux ancrées avec un nouveau contrat de télévision.

Les joueurs constatent que les revenus de la ligue sont à la hausse, mais pas leurs salaires. Eux rappellent au commissaire Mark Cohon qu'ils ont participé à l'effort de guerre quand les choses allaient moins bien et qu'ils sont en droit d'en profiter quand les choses vont mieux. Les joueurs se sont réunis sous le slogan « Nous sommes cette ligue». Ils estiment qu'ils ont droit à un partage des revenus comme on en voit beaucoup dans d'autres sports en Amérique du Nord.

Le point d'achoppement est donc la question du partage des revenus. La LCF ne semble pas vouloir plier alors que les joueurs y tiennent.

On s'est basé sur la structure en place dans la NFL pour établir les demandes. Évidemment, ce ne sont pas les mêmes chiffres, on s'entend. Les joueurs ont essentiellement considéré trois points comme revenus de la LCF. C'est-à-dire le contrat de télévision, les commandites et la vente des billets.

Les deux parties sont engagées dans une guerre de chiffres et chacune tire la couverture de son côté. Le jeu de la négociation est véritablement en force à quelques jours de l'échéance de l'actuelle convention collective. Au cours des derniers mois, les négociations ont permis de faire avancer certains points, mais pas le point le plus important qui demeure le partage des revenus. La LCF avait toujours refusé d'ouvrir ses livres, mais dans le but de démontrer sa bonne foi, elle a finalement permis aux joueurs de consulter ses chiffres. En s'appuyant sur les chiffres de la ligue, le syndicat a déposé une proposition qui a été rejetée mercredi matin.

Quelques minutes après la rencontre, le commissaire Cohon a envoyé une lettre aux joueurs et aux amateurs pour expliquer la position du circuit. En ce qui me concerne, c'est de la mauvaise foi de la partie patronale, car il y avait une entente de confidentialité entre les deux parties. Personne ne devait rendre publics les détails des négociations à moins d'un préavis de 24 heures.

La LCF veut se lancer dans une campagne de relations publiques en tentant de gagner la sympathie des amateurs et mettre de la pression sur les joueurs.

On ne s'entend pas sur les chiffres

Les joueurs proposent un plafond salarial de 6,24 millions alors que les propriétaires suggèrent un plafond de 4,8 millions dès cette année. L'écart est grand entre les deux propositions sur la table. Il faut dire que les joueurs se basent sur les états financiers dévoilés par les équipes. Il n'y a que trois formations dans la ligue qui sont publiques, soit Edmonton, Saskatchewan et Winnipeg, qui sont probablement les trois marchés les plus payants de la LCF. Les Roughriders auraient des revenus de 34 millions contre 18 millions pour les Blue Bombers et 14 millions pour les Eskimos. Le commissaire croit que le partage des revenus fera reculer la ligue et apportera des ennuis financiers. Les joueurs de leur côté estiment que c'est leur ligue, qu'ils en sont le produit, qu'ils s'exposent et que par conséquent, ils ont droit à leur part du gâteau.

Les deux parties sont en désaccord sur les chiffres. Les joueurs disent notamment que le salaire moyen est de 71 400 dollars environ alors que ligue soutient que ce salaire moyen est de 82 000 dollars. Comme on le constate, on fait dire ce que l'on veut aux chiffres et c'est le noeud de la guerre. On va toutefois s'entendre que dans le monde du sport professionnel contemporain, ce ne sont pas de gros chiffres et personne ne peut se permettre une grève. Autant les joueurs que les propriétaires ne peuvent se le permettre. Tout le monde a des obligations. Je préciserai néanmoins que depuis 14 ans que je suis les activités de la LCF de près, c'est la première fois où je pense qu'un conflit pourrait éclater. À savoir combien de temps une grève va durer, c'est une autre question toutefois.

Je m'attends à un vote de grève sous peu. Une grève pourrait survenir, mais je doute que ça se rende jusqu'au début de la saison. J'ai discuté avec le représentant des Alouettes, Josh Bourke, et il m'a expliqué que les négociations sont amorcées depuis un an, que les joueurs sont bien informés et que l'association a une bonne crédibilité auprès de ses membres.

*propos recueillis par Robert Latendresse