Le plus gros test de la saison
Montréal Alouettes jeudi, 16 oct. 2014. 16:58 dimanche, 15 déc. 2024. 09:38C'est un peu les éliminatoires avant le temps pour les Alouettes. Il reste quatre matchs réguliers à disputer cette saison et les trois équipes au premier rang dans l’Est ont toutes la même fiche de 6-8. La course se poursuit à Toronto samedi et on ne peut pas échapper ce match-là.
Si on se souvient bien, les Argonauts avaient remporté le premier duel au compte de 31-5 le 1er août à Montréal. Avec du recul, on constate que c’est à ce moment que les Als ont touché le fond du baril. C’est d’ailleurs ce match qui a provoqué une importante remise en question chez le groupe d’entraîneurs, notamment à la position de quart-arrière. On se demandait si on devait apporter des changements.
Les Alouettes venaient de s’incliner 41-5 à Vancouver, et malgré avoir subi une raclée, on croyait que les Als allaient démontrer de la fierté et revenir plus fort à la maison après avoir profité d’une semaine pour se préparer. Sauf que Toronto a signé une victoire de 31-5 en débarquant au Stade Percival-Molson sans ses quatre meilleurs receveurs de passe : Chad Owens, Andre Durie, John Chiles et Jason Barnes. Malgré la semaine de préparation supplémentaire, ce fut une comédie d’erreurs autant chez les joueurs que chez les entraîneurs avec entre autres une interception retournée pour un touché et des temps d’arrêt gaspillés. Je me souviens même qu'à un certain moment on avait pris un temps d’arrêt alors qu'on éprouvait des problèmes de substitution, mais on a reçu une pénalité pour trop d’hommes sur le jeu aussitôt revenu sur le terrain. C’était complètement brouillon, y compris le jeu de la chaise musicale impliquant les quarts-arrières. Alex Brink et Troy Smith s'étaient succédé, puis on était revenu avec Brink qui s’était fait intercepter pour un touché à la fin de la partie. Je n'ai pas trouvé qu’on avait bien géré la rotation derrière le centre.
Le positif, c’est qu’on a réalisé que ça prenait des changements à ce chapitre et on s’est aperçu que ce n’était peut-être pas Troy Smith qui détenait la solution. En fin de compte, malgré les sérieux doutes qu’on avait sur lui, on a décidé de lui donner une dernière chance à Edmonton. L’équipe a mieux joué, mais on a tout de même perdu par 10 points et on a ensuite donné à Brink son premier départ en Saskatchewan, une défaite subie par seulement cinq points. Brink a obtenu un deuxième départ à Winnipeg, mais les problèmes étaient déjà de retour et on a plutôt fini la rencontre avec Jonathan Crompton (les Oiseaux ont ultimement été battus par huit points). C’est à ce moment qu’a commencé l’ère Crompton, et depuis ce temps, les Moineaux ont un dossier de 5-1. Évidemment, ce n’est pas seulement grâce au quart, mais aussi grâce au jeu au sol et à la défensive. L’équipe en général a repris du poil de la bête. Même si Crompton n'est pas exceptionnel, j’admets qu'il protège mieux le ballon. Dans trois de ses quatre derniers matchs, il n’a lancé aucune interception. Il donne de l’espoir, il a une bonne attitude, on semble vouloir jouer pour lui et tout le monde embarque dans le train. Il a amené une bonne dynamique.
Il fallait trouver des façons de changer le vent de bord après un début de campagne difficile, et c’est ce qu’on a fait. Les Alouettes jouent avec plus de confiance et performent mieux dernièrement.
Quelle sera la réponse des Alouettes?
Plusieurs choses m’intriguent concernant l’affrontement à venir, surtout à cause de l’enjeu qu’il comporte.
Pour une rare fois, la ligne à l’attaque a connu un match ordinaire lors de la défaite contre Toronto. C’est pourtant une unité sur laquelle on peut compter match après match, mais c’était particulièrement difficile ce jour-là. Toronto m’avait vraiment surpris par son front défensif très physique et elle avait gagné la guerre de tranchées. Au niveau statistique, Brandon Whitaker avait enregistré 12 courses pour 31 verges et je me souviens de situations de courts gains où les Alouettes avaient non seulement eu de la misère à gagner des verges, mais où ils avaient même parfois perdu du terrain. En deuxième essai et trois, on a perdu une verge, en troisième et un, on a perdu deux verges sur une faufilade du quart de Tanner Marsh, puis en deuxième et deux, on a perdu une autre verge. C’est sans oublier les deux sacs du quart alloués. Je pense que la ligne offensive l’a avalé de travers et j’ai hâte de voir comment on va aborder le prochain match. Elle a joué du bon football récemment. D’ailleurs, contre la Saskatchewan, elle a menotté l’une des meilleures lignes défensives du circuit et c’est de bon augure pour la suite
J’ai aussi hâte de voir la réponse de la défensive. Cet été, l’adversaire avait réussi à trouver les bonnes confrontations et à isoler les porteurs de ballon contre les secondeurs ou le maraudeur des Alouettes et il avait marqué deux touchés, dont un par l’intermédiaire de Steve Slaton. Toronto s’était présenté avec une bonne stratégie et l’exécution était au rendez-vous. De par les formations utilisées, on savait anticiper les intentions des Alouettes. Slaton avait battu Kyries Hebert sur touché ainsi que Marc-Olivier Brouillette. On avait trouvé un filon et on l’avait bien exploité.
En dépit de cela, l’unité défensive des Als a continué à jouer du football incroyable, ayant alloué seulement respectivement sept et neuf points à ces deux dernières sorties. On a profité du fait qu’on affrontait le Rouge et Noir et les Riders avec Tino Sunseri et la défense a fait le boulot. La tâche sera cependant plus ardue face à Ricky Ray dans ce qui est sans doute le plus gros test de la saison à ce jour. À ses quatre dernières parties, il totalise 1277 verges (presque 320 verges en moyenne), 11 passes de touché et seulement 3 interceptions. C’est un gars qui distribue bien le ballon, qui utilise tout le terrain et tous ses receveurs. À titre d’exemple, huit receveurs différents ont touché le ballon la semaine dernière. De plus, il dégaine rapidement et fait de belles lectures du jeu. Son receveur préféré est tout simplement celui qui se démarque le mieux, alors comme il est difficile de lire ses intentions, il force la défensive à surveiller tous les angles possibles. C’est sa grande force. Autre chose frustrante : on entend souvent que l’aspect primordial pour la défensive est de contrer avant tout le jeu au sol afin de rendre l’adversaire unidimensionnel, sauf que Ricky Ray est capable de défier la logique. Parlez-en aux Tigers-Cats. Ils ont limité les Argos à 45 verges au sol la semaine passée, mais ça n’a pas empêché le joueur étoile de lancer pour 431 verges.
Dernière chose à surveiller, le début de rencontre. Les Montréalais n’ont pas marqué au premier quart à leurs quatre dernières parties et ça va mettre plus que jamais de la pression sur la défensive, qui tient le fort depuis le début de l’année. Au cours de la même période de quatre matchs, les Argonauts ont marqué 140 points pour une moyenne de 35 points par partie, et pas contre n’importe qui : 33 points contre la deuxième meilleure défensive du circuit (Calgary), 40 contre la première (Vancouver), 33 contre la troisième (Edmonton) et 33 contre la cinquième (Hamilton). Ils ont donc marqué 33 points ou plus dans chacun de ces matchs, et ce, contre les défensives no 1, 2, 3 et 5 de la LCF. Si on s'attarde particulièrement à la première demie, ça donne notamment 29 points contre Calgary, 21 contre Vancouver et 20 contre Edmonton. Tout ça pour dire qu’ils sont capables de marquer rapidement et souvent.
C’est bien différent du côté des Als, dont l’attaque ne marque pas beaucoup sur la route en plus de prendre du temps à se mettre en marche, ce qui signifie que la défensive devra exceller plus que jamais. Quand on affronte Ricky Ray, il faut s’attendre à devoir marquer une trentaine de points. Il faut pouvoir garder le rythme et riposter, et ce sera justement le défi de l’attaque. Si on regarde le calendrier, on a inscrit 8 points à Calgary, 5 à Vancouver, 11 en Saskatchewan, 16 à Winnipeg, 16 à Edmonton et 15 à Ottawa. Ce que je retiens, c’est qu’ils n’ont jamais marqué plus de 16 points en territoire étranger. On peut se demander si ce sera suffisant pour battre Ricky Ray, parce que ça n’arrive pas souvent avec un aussi bas pointage.
La bonne nouvelle cependant est que Toronto a la pire défensive de la ligue avec 28 points alloués en moyenne par match). Au cours des quatre derniers matchs, ils ont concédé 128 points au total à leurs rivaux, soit 32 points en moyenne.
Bref, l'affrontement de samedi sera le plus gros test de la défensive, mais aussi de l’attaque parce qu'elle devra elle aussi contribuer. La défensive ne pourra pas tout faire seule face à un quart élite comme Ray. Tout le monde aura de la pression sur les épaules.
*Propos recueillis par Audrey Roy