Unis derrière Eric Berry
NFL mardi, 9 déc. 2014. 15:17 dimanche, 15 déc. 2024. 01:44Une nouvelle marquante n’ayant aucun lien avec les aléas quotidiens du football a ébranlé la grande famille des Chiefs de Kansas City il y a environ deux semaines lorsqu’on a diagnostiqué un cancer des cellules lymphatiques des ganglions à notre coéquipier Eric Berry.
Depuis quelque temps, Eric ressentait de vives douleurs à la poitrine, et voyant que celles-ci ne disparaissaient pas, il a décidé de demander l’avis des médecins de l’équipe. Les résultats des examens ont révélé des cellules cancéreuses, et soudainement cet athlète de 25 ans qui se croyait en pleine santé doit livrer un combat de tous les instants à la maladie. Je ne vous cacherai pas que la nouvelle a été reçue difficilement dans l'entourage de l'équipe. C’est carrément démoralisant d’apprendre que la vie d’un coéquipier et ami, un jeune homme dans la fleur de l’âge, est en danger.
Ironiquement, c’est Eric lui-même, en grand leader qu’il est, qui a voulu se faire rassurant lorsqu’il est venu s’adresser à nous récemment lors d’une rencontre d’équipe. Précisons qu’il existe deux variantes pour cette forme de cancer, celui de type hodgkinien et celui de type non hodgkinien. Ce fut un soulagement général d’apprendre lundi après-midi qu’Eric souffre du premier type. Les chances de guérison sont passablement meilleures, mais il n’en demeure pas moins que les traitements de chimiothérapie doivent être entrepris sans plus attendre.
Les prochains mois représenteront une épreuve ardue pour Eric. J’ai eu la chance de discuter avec lui, et je dois avouer que j’ai une grande admiration pour sa force d’esprit. Il aborde cette bataille avec une attitude empreinte d’optimisme. Dans la vision globale qu’il a de son existence, ce n’est qu’une embûche, et ça ne le ralentira en rien dans la réalisation de ses objectifs de vie.
Dans le but d’offrir son soutien à Eric Berry dans son combat, l’organisation des Chiefs a fait produire des t-shirts avec l’inscription Be Bold Be Brave Be Berry. Dans un grand témoignage de classe, des membres des Cardinals de l’Arizona, dont l’entraîneur-chef Bruce Arians, le demi de coin Patrick Peterson et le plaqueur défensif Dan Williams, ont porté ce gilet durant la période d’échauffement, dimanche, avant notre confrontation.
Je trouve que c’est important de s’attarder à ce sujet car on parle sans cesse de blessures qui pourraient compromettre la présence d’un joueur à un match donné, ou bien une saison entière. On discute de contrats et de la manière dont de telles blessures pourraient affecter les négociations. Cette fois, on parle d’une vie humaine et de répercussions s’échelonnant bien plus loin qu’une surface gazonnée. Eric est un maraudeur étoile, trois fois participant au match du Pro Bowl, et pourtant, rien de tout cela n’importe dans le contexte actuel. Je trouve formidable qu’on puisse mettre tout cela sur « pause » et se rallier à une même cause pendant quelques instants.
Un match échappé en 2e demie
Au point de vue football, la confiance était au rendez-vous toute la semaine dans notre vestiaire malgré deux revers d’affilée encaissés contre les Raiders d’Oakland et les Broncos de Denver. On avait des choses à se faire pardonner après ces deux prestations en demi-teinte. Personne n’avait besoin de se faire rappeler l’importance de ce match nous opposant aux Cardinals, mais le résultat n’a pas été en notre faveur.
Notre attaque a réussi à prendre son élan dès les premiers instants de l’affrontement en marquant un touché à sa première séquence offensive. D’ailleurs, même si notre unité offensive n’a été lancée dans la mêlée qu’à trois reprises en première demie, elle a tout de même livré la marchandise en trouvant la zone payante deux fois.
J’ai déjà mentionné dans une précédente chronique à quel point il arrive fréquemment que deux ou trois jeux changent drastiquement le cours d’une rencontre. Et loin de moi l’idée d’identifier des décisions contestables des arbitres comme des excuses, il demeure néanmoins que l’issue du duel est en partie attribuable aux résultats de pénalités appelées contre les Chiefs en deuxième moitié du match.
Bien positionnés sur le terrain et en avance 14-6 au troisième quart, nous avons joué de malchance. Notre ailier rapproché Anthony Fasano a été pris en défaut pour avoir causé de l’obstruction tout juste avant qu’il ait capté dans la zone des buts une passe d’Alex Smith qui autrement aurait ajouté sept points supplémentaires au tableau. Résultat immédiat du mouchoir lancé sur le terrain? Lors du jeu offensif suivant, les Cards réussissent une interception et ramènent le ballon sur une vingtaine de verges, mettant ainsi la table pour leur premier touché de l’affrontement.
Sur la feuille de pointage, ce ne sont que deux petits jeux. Mais il n’en fallait pas plus pour que le rythme ne soit transféré du côté des locaux et que la foule arizonienne ne retrouve son entrain. Ce revirement de situation leur a donné des ailes.
Alors que les Cards menaient 17-14 et que les secondes s’égrainaient au cadran au quatrième quart, une deuxième décision des officiels a grandement affecté nos chances de l’emporter, alors qu’on a jugé que notre autre ailier rapproché, Travis Kelce, avait échappé le ballon en courant avant qu’il ne soit rabattu et que son genou ne fasse contact avec le sol. Nous étions à ce moment en bonne posture pour égaler la marque, voire même prendre les devants, puisque nous étions en territoire des Cards.
C’est dommage car en toute objectivité, je crois fermement que nous avions suffisamment bien joué pour espérer l’emporter. Notre exécution était de loin supérieure à ce qu’elle avait été la semaine précédente face aux Broncos, tout comme l’était notre désir de vaincre. L’entraîneur-chef Andy Reid insistait d’ailleurs après la rencontre sur le fait que nous en avions accompli passablement plus qu’à notre dernière sortie.
Les leçons à tirer sont nombreuses pour les joueurs de toutes les positions. Pour les membres de la ligne offensive, dont je fais partie, il est essentiel de porter main forte à nos coéquipiers, que ce soit en se rendant à leur défense pour éviter qu’il se fassent plaquer par plus d’un adversaire à la fois ou en les aidant à se relever du sol après qu’il aient déployé un effort. On ne souhaite jamais qu’un coéquipier se retrouve seul et entouré de quatre joueurs de l’équipe adverse festoyant après un plaqué. Sachant à quel point coach Reid tient mordicus à ce que la ligne à l’attaque impose le ton et agisse comme un groupe rassembleur dans l’équipe, ces détails qui peuvent sembler banals de l’extérieur prennent une importance capitale lorsqu’on considère que nous formons en quelque sorte une famille.
Éviter le piège des distractions
Cette série de trois revers nous amène donc à un dossier de 7-6 avec trois parties à disputer.
Alors qu’on possède une meilleure idée du portrait des éliminatoires et que nous avons pris un peu de recul dans la course, la tentation est forte d’analyser de fond en comble le classement et d’énumérer les possibilités d’ici à la fin du calendrier. Coach Reid et le reste du personnel d’instructeurs nous encouragent fortement à nous concentrer sur chacune des trois parties restantes de façon séparée, à commencer par notre rencontre avec les Raiders ce dimanche. La logique derrière cela est bien simple : en essayant de calculer dans une perspective de long terme ce qu’il nous faudra réussir pour nous faufiler en éliminatoires, nous risquons d’augmenter les chances de distractions. Bref, ce n’est vraiment pas dans la culture de Reid de nous exposer les raisons faisant en sorte que nous sommes en bonne ou en mauvaise posture pour participer aux matchs d’après-saison.
Peu importe le contexte, la réalité est la même : un nouvel adversaire nous attend et conséquemment, une nouvelle semaine d’entraînement est entamée.
D’un point de vue personnel, je conserve le moral et demeure plus prêt que jamais à contribuer aux succès de l’équipe sur le terrain.
Après 14 semaines de calendrier régulier et les semaines de préparation qui les ont précédées, j’ai pu observer attentivement le déroulement d’une saison de football professionnel, et j’en ai tiré quelques constats. Je comprends mieux désormais ce à quoi on fait référence lorsqu’on parle du fameux mur qu’un joueur recrue trouve tôt ou tard sur son passage. Je ne suis pas de ceux ayant à vivre une telle situation, mais je suis à même de constater que les joueurs de première année ayant foulé le terrain semaine après semaine ne l’ont pas facile. Après avoir tout laissé sur la pelouse physiquement et émotivement chaque dimanche, la machine doit repartir dès le lendemain, et ce, depuis le mois d’août si l’on considère qu’ils ont travaillé d’arrache-pied pour dénicher leur place dans la formation au camp d’entraînement.
Humainement, c’est pratiquement impossible de ne pas ressentir la moindre fatigue physique et mentale à travers cet horaire surchargé. Sauf que parallèlement à cela s’amorce le dernier droit de la saison, celui qui fait grimper l’adrénaline de tous et chacun d’un cran. Comment ne pas s’enthousiasmer, sachant que le résultat de chaque partie aura d’immenses répercussions sur nos chances de poursuivre l’aventure? C’est une période de l’année où l’excitation est au rendez-vous pour les amateurs de football, et croyez-moi, c’est tout aussi enivrant de notre côté!
*Propos recueillis par Maxime Desroches