Depuis une dizaine de jours, la fameuse quête de Carey Price pour une 43e victoire cette saison s’est retrouvée au centre des discussions relatives au Canadien. Puisque la participation du CH aux séries était dans la poche depuis déjà belle lurette, la possibilité de voir Carey devancer Ken Dryden et Jacques Plante devenait l’une des histoires revêtant le plus d’intérêt dans l’entourage de l’équipe.

C’est maintenant chose faite, et il n’y a pas à dire, l’ambiance était festive au Centre Bell après le but vainqueur de Lars Eller en prolongation! En entrevue d’après-match avec Marc Denis, le gardien du Tricolore a confessé que bien malgré lui, il songeait à cette page d’histoire au fur et à mesure que celle-ci se rapprochait.

Tandis que l’équipe connaissait des hauts et des bas, on devinait un certain danger, celui que la concentration ne soit pas dirigée vers les éléments essentiels à l’approche des éliminatoires. Mais au final, force est d’admettre que le rendement des hommes de Michel Therrien a été rassurant durant ses matchs contre les Panthers de la Floride et les Red Wings de Detroit.

Ce que je trouve intéressant, c’est que ce réveil s’est peut-être produit  en réaction à la perte de Max Pacioretty, contraint à l’inactivité après s’être blessé au haut du corps tôt dans le duel face aux Panthers. Ce n’est pas la première fois que l’absence d’un franc-marqueur a pour conséquence immédiate de fouetter les joueurs et de les forcer à offrir le meilleur d’eux-mêmes.

On était conscient que sans Pacioretty, il devenait primordial de générer de l’attaque d’une façon ou d’une autre. Pour le Canadien, j’ai trouvé que ça s’était traduit par une grande volonté de tirer en direction du filet et par un plus grand acharnement. J’ai constaté un échec-avant plus soutenu et une plus grande propension à défier les défenseurs adverses dans les bagarres pour des rondelles libres.

Est-ce que je vois l’équipe avancer en éliminatoires sans le no 67 dans la formation pour autant? Définitivement pas. Il apporte tellement à cette formation dans de nombreuses facettes du jeu que tôt ou tard, sa présence devient indispensable. Puisqu’on a retrouvé de solides habitudes de travail, le véritable défi sera de maintenir le niveau de concentration une fois Pacioretty revenu à son poste.

Ne nous en cachons pas, le manque de production offensive a soulevé des inquiétudes durant le mois de mars. Je ne saurais dire si les défenseurs ont reçu la directive de se mêler plus fréquemment aux attaques, mais toujours est-il que les arrières de l’équipe ont aidé à propulser l’offensive depuis près de deux semaines. Je n’apprends rien à personne en mentionnant que l’apport d’Andrei Markov et P.K. Subban est essentiel aux succès du CH, mais celui de Jeff Petry a été central au bon fonctionnement de l’attaque récemment.

Durant une séquence de six matchs consécutifs avec au moins un point engrangé, la prise de Marc Bergevin à la dernière date limite des échanges nous montre qu’il s’est ajusté à son nouvel environnement. La culture du Canadien et celle des Oilers d’Edmonton, c’est carrément le jour et la nuit. Petry avait besoin de trouver ses repères avant de prendre ses aises à la ligne bleue du CH. J’ai joué au hockey professionnel assez longtemps pour savoir que c’est complexe d’évoluer dans un contexte où la défaite est omniprésente.

On sent un défenseur prêt à prendre charge, à initier des jeux et même à transporter le disque lorsque la situation s’y porte, sans pour autant sacrifier quoi que ce soit défensivement. Il ne sera jamais reconnu pour la robustesse dans son jeu, mais il se tire admirablement bien d’affaire dans ses batailles à un contre un.

Le premier rang de la division importe

Tôt vendredi, on a appris durant le point de presse de Michel Therrien qu'on avait l’intention de confier le filet à Price pour le dernier match de saison régulière, face aux Maple Leafs de Toronto. Cette décision en a peut-être surpris quelques-uns, mais à bien y penser, le congé de quatre jours qui suivra cette partie sera une période de repos suffisante pour le gardien vedette. De toute façon, considérant la notoriété dont il dispose dans l’organisation, Price pourrait avertir le personnel d’entraîneurs de son souhait de passer son tour s’il ressentait une certaine fatigue.

On en déduit aussi que le premier rang de la division Atlantique leur est cher. Récemment, on a vu Bergevin expliquer à l'Antichambre que l’avantage de la glace est loin d’être prioritaire et que celui-ci n’est en rien un gage de réussite. Mais du point de vue affaires, comment refuser la chance de disputer un match supplémentaire à la maison, et les revenus qui en découlent?

 Au-delà des deux gains acquis dimanche et jeudi, on ne peut pas affirmer que le Canadien jouait avec énormément de confiance ces derniers temps.  De conclure avec une troisième victoire consécutive ne réglerait pas tous les pépins constatés dans le dernier droit, mais l’équipe ne pourrait que s’en porter mieux psychologiquement.

Des équipes jeunes et fougueuses

Tandis qu’on spécule sur l’identité des adversaires potentiels du Tricolore au premier tour, Therrien et ses adjoints, on les comprend, font preuve d’une grande prudence dans ce qu’ils affirment. Je suis persuadé qu’à l’interne, on a notre petite idée sur le type de formation qu’on souhaite affronter et, inversement, celles qui nous plairaient moins. Du lot, à peu près tout le monde serait d’accord pour dire que les Sénateurs d’Ottawa, dans le scénario actuel, représenteraient une réelle menace s’ils devaient obtenir leur billet.

Je ne peux m’empêcher de dresser un parallèle avec la formation de 2004 des Flames de Calgary qui s’était rendue en finale de la Coupe Stanley, équipe avec laquelle j’ai évolué. Le jeune groupe de joueurs des Sens se complète à merveille, sans posséder de véritable vedette à l’attaque. Bien sûr, nous comptions Jarome Iginla dans nos rangs, mais du reste, sur papier du moins, les Flames impressionnaient peu d’experts. Sans nécessairement comparer Andrew Hammond à Miikka Kiprusoff, je vois un certain nombre de similitudes dans leur histoire.

Cette année-là, les Flames avaient réussi à surprendre coup sur coup les détenteurs des trois premières positions dans l’Ouest pour finalement s’incliner au 7e et ultime match de la série finale. Est-ce que j’ai ce genre d’attentes envers les hommes de Dave Cameron? Peut-être pas, mais ils ne doivent pas être pris à la légère.

Et puisqu’on parle des Flames, je n’ai pas le choix d’émettre un commentaire sur l’improbable tour de force de l’équipe de Bob Hartley, qui en battant les Kings de Los Angeles jeudi se sont qualifiés pour les séries pour la toute première fois depuis 2009. Simplement dit, les deux bras m’ont tombé lorsque le tout s’est confirmé! Ce qu’Hartley, Martin Gélinas et compagnie ont réussi à accomplir avec les effectifs en place est admirable. On parle ici d’un club qui a perdu les services de son meilleur défenseur, un candidat presque certain au trophée Norris, en Mark Giordano il y a une vingtaine de matchs.

Quelle a été la réaction de l’équipe albertaine à la perte de leur capitaine pour le reste du calendrier? Certainement pas de s’apitoyer sur son sort. Elle est restée bien présente dans la lutte pour une place en séries avec une attitude exemplaire, et en récoltera les dividendes à compter de la semaine prochaine. Parions que le Saddledome sera extrêmement bruyant pour le duel tout canadien qui opposera les Flames aux Canucks de Vancouver!

* Propos recueillis par Maxime Desroches