NASHVILLE - L’édition 1984-1985 des Oilers d’Edmonton, l’équipe qui a remporté la deuxième des cinq coupes Stanley de cette formation, a été couronnée meilleur club des 100 ans de la LNH.

Vous avez le droit d’être d’accord ou non.

Personnellement, je ne le suis pas.

Les Oilers étaient forts. Très fort même. De Wayne Gretzky à Mark Messier en passant par Paul Coffey, Jari Kurri et Kevin Lowe, les Oilers faisaient peur. Ils écrasaient tout sur leur passage marquant plus de 400 buts par saison.

Mais aussi forts étaient les Oilers de cette grande époque, comment les placer devant le Canadien de 1976-1977 ? Cette édition du CH n’a encaissé que huit revers (60-8-12) au cours de la saison régulière avant d’aller soulever la deuxième de quatre coupes Stanley consécutives.

Mené par Guy Lafleur en attaque et protégé par le «Big Three» et Ken Dryden devant le filet, le Canadien avait marqué 387 buts et il n’en avait concédé que 171, pour un différentiel de plus 216.

À lui seul, Larry Robinson avait terminé la saison avec un différentiel de plus 120. Vous avez bien lu! Collectivement, les défenseurs du Canadien avaient enfilé 73 buts, dont les 25 de Guy Lapointe qui a établi un record d’équipe qui tient toujours aujourd’hui. Et qui tiendra sans doute encore longtemps.

Cette édition du Canadien a terminé au troisième rang derrière les Penguins de Pittsburgh de 1991-1992.

Gretzky aurait voté pour le CH de 1971

Les Oilers ont été couronnés par le biais d’un scrutin populaire mené sur le site internet de la LNH. Plus de 4 millions de fans ont voté. Combien de fois l’ont-ils fait? Personne ne le sait. Mais ce qui est clair, c’est que les partisans des Oilers l’ont fait bien plus souvent que ceux du Canadien puisque quatre formations des Oilers se sont hissées dans le top-10 alors que le Canadien n’en compte que deux.

Invité par la LNH à dévoiler le meilleur club de l’histoire, Wayne Gretzky a d’ailleurs tenu à souligner que ce résultat était très aléatoire et qu’il portait ombrage à bien des grandes formations.

«Si j’avais eu le droit de voter, c’est à l’édition de 86-87 que j’aurais donné mon vote, a indiqué la Merveille. Je suis très honoré d’obtenir cette récompense, mais, à mes yeux, il n’y a pas de plus grande récompense.»

Gretzky se serait toutefois tourné vers le Canadien s’il n’avait pas eu le droit de voter pour les Oilers. Mais attention! Ce n’est pas l’édition 76-77 du Tricolore qui aurait obtenu le vote de Gretzky, mais bien le club de 1970-1971.

Pourquoi?

«J’avais dix ans à l’époque. Un de mes amis et voisins était un partisan du Canadien. Moi, je prenais pour les Bruins. Et les Bruins étaient largement favoris cette année-là. Le Canadien s’est révélé en séries alors qu’un gardien que personne ne connaissait, Ken Dryden est arrivé et a tout gagné. Jean Béliveau était Jean Béliveau, et je me souviens de l’importance de John Ferguson au sein de cette équipe. Au fil de l’histoire, on a réalisé que Ferguson était bien plus qu’un homme fort. C’était aussi un très bon joueur de hockey. Cette équipe du Canadien (70-71) n’était peut-être pas la meilleure de la Ligue à l’époque. Mais elle était composée du meilleur groupe de joueurs. C’est pour cette raison que cette conquête m’a marqué. Et cette leçon m’a servi au fil de ma carrière alors que j’ai toujours insisté sur l’importance de composer un bon groupe de joueurs», a indiqué Gretzky.

Dans sa biographie, Jean Béliveau a d’ailleurs souligné l’importance de Ferguson dans les grandes années du Tricolore. Il l’avait d’ailleurs qualifié d’élément stabilisateur dans le vestiaire et sur la patinoire. Tout un compliment quand on considère le grand nombre de joueurs sensationnels qui portaient l’uniforme tricolore à l’époque.

Désir de vaincre 

Invité à commenter les qualités qui rendaient les Oilers de son époque aussi puissants, Wayne Gretzky s’est attardé sur leur désir de vaincre.

«Nous avions cette volonté de gagner qui nous rendait meilleurs collectivement. Nous travaillions très fort, nous étions unis, l’équipe passait avant tout. Mais aussi talentueux étions-nous, nous étions assidus à l’entraînement et cela explique les succès que nos équipes des Oilers ont obtenus.»

Lorsqu’on a demandé à Gretzky de comparer les grandes équipes des Oilers aux grandes équipes d’aujourd’hui, il l’a fait à reculon.

«Il est très difficile de comparer des clubs d’époques différentes. Le hockey est bien différent aujourd’hui qu’il l’était lorsque je jouais. Les joueurs sont bien meilleurs et ils le sont bien plus jeunes qu’à mon époque. Les gardiens sont aujourd’hui de grands athlètes. Ils ont suivi les traces des Patrick Roy, Martin Brodeur et Grant Fuhr et ils sont souvent les meilleurs joueurs de leur club. Les systèmes défensifs sont excellents et appliqués à la lettre. Ça complique grandement la tâche de marquer des buts. Enfiler 40 buts dans la LNH d’aujourd’hui, c’est vraiment difficile», a indiqué Gretzky.

Le seul voyage dans le temps que la Merveille a accepté de faire lui a permis d’identifier les Penguins de Pittsburgh de 1991-1992 comme l’équipe qui aurait donné le plus de fil à retordre aux Oilers.

«Mario Lemieux demeure le meilleur joueur de hockey contre qui j’ai joué au cours de ma carrière. C’était tout un compétiteur. Il était entouré de joueurs excellents également. Pour donner des chances aux Oilers, je m’assurerais d’avoir Paul Coffey avec nous au lieu de le laisser jouer avec les Penguins.»

Wayne Gretzky a gagné quatre coupes Stanley en cinq ans avec les Oilers. Ses Oilers ont privé les Islanders de New York d’une cinquième conquête consécutive. Le Canadien détient le record de la LNH avec cinq conquêtes de suite entre 1956 et 1960.

Comment expliquer que les Penguins pourraient devenir les premiers depuis les Red Wings de Detroit en 1998 a soulevé la coupe deux années de suite?

«Le partage des revenus et l’implantation du plafond salarial ont eu des impacts directs sur les formations. La ligue est plus égale qu’elle ne l’a jamais été. C’est rendu difficile de faire les séries. C’est plus difficile encore d’avoir du succès en séries. Ça rend les exploits des Blackhawks de Chicago (trois coupes en six saisons) et des Kings de Los Angeles (deux coupes en trois ans) bien plus importants», a souligné Gretzky.

Si le Canadien n’a placé que deux clubs au sein du top-10, les grandes équipes des Islanders ne sont représentées qu’une seule fois. Pourtant, les Islanders ont gagné 19 séries éliminatoires consécutives. Un exploit hors du commun. Pourquoi alors n’obtiennent-ils pas autant de reconnaissance?

«Je peux vous assurer qu’ils ont toute ma reconnaissance. On a appris énormément en encaissant notre défaite contre un lors de notre première présence en grande finale en 1983 (les Oilers avaient été balayés en quatre matchs). Dès la saison suivante, nous avons adopté bien des aspects de leur style de jeu et de leur façon d’aborder le hockey. Ils ont eu un impact positif sur nos succès.»

De grands oubliés

Dans le cadre d’un scrutin populaire comme celui qui a couronné les dix meilleures équipes de l’histoire de la LNH, il est normal que les clubs les plus anciens soient un brin ou deux mis de côté.

C’est malheureux, mais c’est normal.

Cela explique sans doute pourquoi l’édition 59-60 du Canadien a été oubliée. Cette équipe est la seule de l’histoire à avoir signé une cinquième conquête consécutive de la coupe Stanley.

Si elle avait connu une saison régulière solide, sans être remarquable, cette édition du Canadien avait balayé les Blackhawks et les Maple Leafs en huit petites parties. Le Canadien avait marqué 14 et 15 buts contre Chicago et Toronto qui avaient répliqué six et cinq fois seulement.

Jacques Plante, qui avait adopté le port du masque protecteur en novembre 1959, avait signé trois jeux blancs en séries.

Maurice Richard avait marqué son 34e et dernier but en grande finale. Les 34 buts du Rocket en finale de la coupe Stanley représentent d’ailleurs toujours un record.

Mais bon! La mémoire est une faculté qui oublie faut croire.