Le mot d’ordre était clair chez le Canadien : du directeur général Marc Bergevin à l’entraîneur-chef Michel Therrien en passant par Carey Price, Max Pacioretty et Brandon Prust, tout le monde souhaitait une performance exceptionnelle et une victoire aux dépens du Wild pour honorer Jean Béliveau.

P.K. Subban convenait même qu’un manque d’effort dans le cadre d’une journée aussi tristement importante dans l’histoire du Tricolore serait un affront à la mémoire du grand disparu.

Le Canadien n’a pas tenu promesse. Non seulement s’est-il incliné 2-1 aux mains du Wild, au Minnesota, mais le Tricolore ne s’est carrément pas présenté au cours des deux premières périodes laissant son adversaire prendre le plein contrôle de la rencontre.

« Avec tout ce qui s’est produit au cours des 24 dernières heures, nous n’avions pas le droit d’amorcer le match comme nous l’avons fait. Nous avons donné deux périodes ce soir. Si nous avions joué tout le match comme nous l’avons fait en troisième, nous aurions eu une chance de gagner. Des débuts de rencontres comme celui que nous avons connu ce soir, particulièrement dans les circonstances particulières d’aujourd’hui, ça ne devrait pas arriver », a commenté un Max Pacioretty débiné après la défaite des siens.

Un des rares joueurs à être demeurés dans le vestiaire, Pacioretty était toujours assis à son casier, patins aux pieds, jambières encore bien fixées et culottes à peine détachées alors que ses coéquipiers étaient là dans la douche, là déjà en tenue de ville, prêt à mettre le cap sur Chicago.

« Quand nous jouons comme nous l’avons fait en troisième, nous formons un très bon club de hockey. Nous épuisons nos adversaires avant de prendre le dessus sur eux. Mais quand on se contente de jouer comme nous l’avons fait au cours des 40 premières minutes, nous formons une équipe ordinaire », a poursuivi Pacioretty.

Therrien déçu

À l’image de Max Pacioretty, Michel Therrien était amèrement déçu après la rencontre. Déçu du résultat, bien sûr, mais déçu surtout de l’effort, ou du manque d’effort, de son équipe au cours des deux premières périodes.

Questionné à savoir si les émotions et toute l’attention générées en marge du décès de Jean Béliveau avait pu finalement se retourner contre son équipe, l’entraîneur-chef du Canadien a refusé de disculper ses joueurs avec une telle possibilité.

« Il est difficile de généraliser, car des situations comme celle d’aujourd’hui sont rares et leurs répercussions varient. Je suis conscient qu’il y avait beaucoup de distractions. Mais à mes yeux, les événements d’aujourd’hui auraient normalement dû se traduire bien plus par une source de motivation que par une forme de distraction. Je ne me servirai certainement pas de ça comme excuse. Nous n’avons pas compétitionné pendant deux périodes », a tranché Therrien lors de son point de presse d’après-match.

L’éveil de Pominville

Le Canadien a couru à sa perte en accordant un but au Wild 19 secondes seulement après la mise en jeu initiale. Un but chanceux alors que le tir d’un angle plus que fermé de Jason Zucker a frappé le poteau avant de ricocher sur l’arrière de l’épaule droite de Carey Price et de se retrouver dans le fond du filet.

« Ce n’est certainement pas la façon dont je voulais commencer la rencontre », a candidement admis Carey Price.

Ce but a certainement fait mal. Mais aux yeux de Max Pacioretty, il ne peut d’aucune façon être tenu responsable du fait que lui et ses coéquipiers ont patiné dans le sable lors des 40 premières minutes de jeu. « Nous n’avons rien réalisé au cours de ces deux périodes. Nos jeux avortaient. Nous ne travaillions pas assez. »

Dominé 16-6 au chapitre des tirs au but en première période, le Canadien n’a tiré que quatre fois en période médiane encaissant 14 autres du Wild qui dominait 30-10 après 40 minutes.

Non ce n’était pas beau à voir.

Le Canadien n’a pas aidé sa cause avec des pénalités stupides. Alexei Emelin a porté son bâton au visage de Zach Parise. Brian Allen a accroché le bâton de Tomas Vanek au terme d’une course que le défenseur du Tricolore a perdue. Andrei Markov, pendant que Allen écoulait sa pénalité, a tiré dans les gradins offrant au Wild une supériorité numérique de deux hommes de 58 secondes. Une éternité.

Parce que le Wild est lamentable en avantage numérique, le Canadien a pu éviter le pire lors de ces trois pénalités. Même que les joueurs du Wild ont été hués par des partisans outrés qui refusaient de se contenter de l’avance de 2-0 de leurs favoris. Une avance qui semblait pourtant suffisant à ce moment.

Vrai que l’attaque massive du Wild manquait cruellement de mordant et de créativité, mais il est impératif aussi de souligner le travail abattu par Plekanec, Pacioretty et Emelin dépêchés sur la patinoire dans cette situation pour le moins précaire.

C’est le Québécois Jason Pominville qui a offert l’avance de 2-0 au Wild. Surveillé par P.K. Subban devant le filet, Jason Pominville a baissé la tête pour éviter la rondelle tirée de la pointe par le défenseur Christian Folin. Sans savoir ce qui se passait, Pominville a fait dévier la rondelle derrière Carey Price après qu’elle eut ricoché sur le manche de son bâton. L’arbitre a aussitôt accordé le but même si la rondelle semblait avoir été touchée plus haut que la limite permise.

De longues discussions ont suivi. Et après quelques minutes de révision au bureau de contrôle de la LNH à Toronto, il a été conclu que les reprises ne permettaient pas d’infirmer la décision initialement rendue.

C’était le premier but du Québécois après une disette de 10 matchs. Son 2e but seulement en 16 rencontres. Deux buts marqués aux dépens du Canadien pour Pominville qui en compte seulement cinq cette saison.

« C’est une séquence difficile il n’y a pas de doute la dessus », convenait Pominville lorsque croisé dans le vestiaire après l’entraînement matinal du Wild.

L’ailier droit refusait toutefois de sombrer dans la panique ou le désespoir. « Le plus difficile dans tout ça, c’est que je suis satisfait de la façon dont je joue. Moi et mes compagnons de trio générons des occasions de marquer et multiplions les bonnes présences. Mais la rondelle refuse simplement de rentrer », plaidait Pominville devant les collègues affectés à la couverture du Wild.

Bien qu’il n’avait pas marqué en dix matchs, Pominville revendiquait tout de même trois passes à ses quatre dernières rencontres et sept lors des dix derniers matchs avant de croiser le Canadien.

Tangradi freine l’élan

En troisième période, le Canadien qui s’était contenté de très peu jusque là s’est mis à jouer du vrai hockey. Il a rapidement imposé son rythme et on a senti le Wild un brin ou deux nerveux au point de se mettre à jouer sur les talons.

L'attaquant d'énergie Eric Tangradi a alors tout bousillé. Il a freiné l’élan de son équipe en frappant par-derrière et à la tête le défenseur Christian Folin.

Chassé du match, Tangradi a écopé une pénalité majeure sur le jeu.

Comme il l’avait fait lors de la période médiane, le Canadien a évité le pire. De fait, il a parfaitement contrôlé le jeu au cours des cinq minutes d’attaque massive n’accordant pas le moindre tir au Wild.

Occupé trop longtemps à se défendre plutôt qu’à attaquer la cage ennemie, le Canadien a finalement manqué de temps.

Alex Galchenyuk, après que Michel Therrien eut rappelé Carey Price au banc à la faveur d’un sixième attaquant, a évité au Tricolore l’affront d’un blanchissage. Déjà blanchi quatre fois cette année, le Canadien n’a donc pas rejoint les Sabres de Buffalo qui ont encaissé cinq jeux blancs cette année. Le pire total de la LNH.

Ce but a toutefois servi de simple et de bien mince consolation si l’on considère les attentes élevées des amateurs qui tenaient à voir leurs favoris faire honneur au regretté Jean Béliveau.

Dans la défaite, Michel Therrien a jonglé plusieurs fois avec ses trios pour tenter de secouer son club.

Parce que le trio de Lars Eller, flanqué de Brandon Prust et Jiri Sekac, était le seul à donner signe de vie lors des 40 premières minutes, Michel Therrien a muté Sekac à la place de Dale Weise au sein du premier trio. Les résultats espérés ne sont pas venus. Weise était de retour avec Desharnais et Pacioretty lorsque ces derniers ont connu quelques bonnes présences en au dernier tiers.

Tom Gilbert a obtenu deux bonnes occasions de marquer sur de rares poussées intéressantes du Canadien qui s’est bien échangé la rondelle en zone ennemie pour offrir des tirs de qualités au défenseur originaire du Minnesota.

En l’absence de Ryan Suter qui ratait un premier match depuis qu’il s’est joint au Wild du Minnesota il y a trois ans, le défenseur québécois Marco Scandella a offert une performance très solide.

Tout juste récompensé pour ses efforts et ses progrès par une prolongation de contrat de cinq ans d’une valeur de 20 millions $, Scandella a passé plus de 25 minutes sur la patinoire. Affichant calme et confiance sur la patinoire, il a brisé plusieurs attaques du Canadien tout en menaçant à l’autre bout de la patinoire.

Parti du Minnesota immédiatement après la rencontre, le Canadien se réveille à Chicago où les Blackhawks ont vaincu les Blues de St.Louis 4-1. Le Tricolore croisera les Hawks vendredi avant de compléter, samedi, son voyage de quatre matchs dans l’Ouest en affrontant les Stars à Dallas.

Si le Tricolore offre du jeu aussi terne et sans âme qu’il a offert au Minnesota lors des deux premières périodes du match de vendredi à Chicago, il prendra la chance de se faire écraser une deuxième fois par les Hawks qui l’ont blanchi 5-0 le 4 novembre dernier au Centre Bell.