(ESPN.com) - D'une certaine façon, l'histoire de Mike Modano est l'histoire du hockey aux États-Unis au cours des deux dernières décennies.

Après que les North Stars du Minnesota eurent fait de lui le deuxième joueur américain à être sélectionné au tout premier rang au repêchage de 1988, Modano s'est amené dans la Ligue nationale avec de grandes attentes. Joueur talentueux qui a fait ses classes avec les Raiders de Prince Albert de la Ligue junior de l'Ouest, Modano a -dans presque tous les aspects- rencontré ou dépassé les espoirs mis en lui.

Le joueur de 36 ans a été capitaine d'une équipe championne de la coupe Stanley; il a évolué dans trois éditions de l'Équipe olympique américaine, a remporté la médaille d'argent en 2002 et a disputé le match des étoiles à six reprises. À deux reprises, il a mené la colonne des passes en séries éliminatoires et tout ça ne évoluant, jusqu'ici, avec la même franchise.

Alors qu'il s'apprête à passer la marque de Joe Mullen pour le titre de meilleur buteur américain et Phil Housley pour le meilleur marqueur américain en carrière, Modano reflète aussi le lent mais inévitable changement qui a touché le hockey dans les vingt dernières années.

Alors que le hockey a eu de la difficulté -et en a encore- à s'enraciner dans des endroits comme le Sud de la Floride et à Atlanta, il est florissant à Dallas. Pourquoi? Parce que des joueurs comme Modano ne font pas que travailler là quelques mois par année mais s'y sont installés en permanence et sont devenus membres de la communauté.

“Personne ne voulait déménager. Nous voulions tous demeurer au Minnesota parce que nous ne savions pas quelle réception nous allions avoir à Dallas », a indiqué Modano à ESPN.com, lorsqu'il se remémore le départ de l'équipe du Minnesota après la saison 1992-93.

Mais dès le début, on a noté des avantage avec la relocalisation.

Modano, qui est natif de Livonia au Michigan, et qui était joueur-étoile au Minnesota avec les North Stars, allait faire des emplettes et n'a pas été assailli quand l'équipe n'était encore qu'un objet de curiosité plutôt qu'un groupe de joueurs adulés. Mais tout a changé quand l'équipe a grimpé au classement et a bâti l'une des meilleures bases d'amateurs de la LNH. Lorsque les Stars ont remporté la coupe Stanley en 1999, le futur de l'équipe semblait cimenté tout comme Modano à Dallas.

Le joueur de centre souligne qu'il a été agréablement surpris du style de vie et de l'hospitalité du Sud. Ce style de vie l'a incité, comme des coéquipiers, à faire de Dallas et de sa région leur domicile permanent et de tisser des liens à l'extérieur de l'équipe. Modano, qui a récemment épousé Willa Ford, souhaite demeurer à cet endroit une fois que sa carrière de joueur sera terminée.

Lorsque les Stars sont arrivés, il n'y avait que cinq patinoires à Dallas et deux étaient localisés dans des centres commerciaux et n'avaient pas été construits pour le hockey. Il n'y avait aucune école secondaire ou d'équipe de hockey mineur et seulement 250 enfants s'adonnaient à ce sport. Avant la présente saison, 7 500 jeunes joueurs de la partie nord du Texas faisaient partie de différentes équipes de hockey mineur et on comptait 23 patinoires. Près de 70 écoles secondaires ont leur équipe. Moins d'une décennie après que les Stars soient devenus la première équipe à remporter la coupe à l'extérieur du territoire traditionnel de hockey, des joueurs du Texas commencent à laisser leur marque à tous les niveaux du hockey des ligues mineures tout comme ceux de la Californie et autres endroits exotiques.

Modano croit que ce n'est pas seulement la présence des équipes dans ces marchés qui aident à l'essor du hockey mais aussi de la présence de joueurs, spécialement les Américains, qui élisent domicile dans ces communautés.

“Les Européens partent une fois la saison terminée”, soutient Modano qui n'a rien à dire contre eux s'empresse-t-il d'ajouter. « Ils viennent ici pour jouer mais ils retourneront éventuellement dans leur pays. »

Peu importe que ce soit en Californie ou au Texas ou encore en Floride, les liens entre les amateurs et les joueurs de même que la croissance du hockey est indéniable. Tisser des liens et le hockey s'en portera mieux sans quoi, le défi est plus grand.

Cette observation nous rappelle une conversation que nous avions eue avec l'ancien gardien de but et analyste de hockey Darren Eliot. Questionné sur ses observations pour la présente saison, Eliot a indiqué qu'il était curieux de voir une nouvelle vague de joueurs américains se profiler à l'horizon de la Ligue nationale. Il s'agit de la prochaine génération qui prendra le flambeau de Modano, Doug Weight, Keith Tkachuk, Jeremy Roenick et autres.

Lorsque les Américains avaient remporté la coupe du monde de hockey en 1996, le hockey avait atteint un sommet aux États-Unis grâce à des joueurs comme Modano. «Entre 1996 et 2006, personne n'a vraiment pris la relève et la popularité du hockey a commencé à décliner aux États-Unis », a indiqué Eliot.

Le centre étoile en devenir, Phil Kessel; l'espoir à la défensive Jack Johnson, le premier choix au repêchage de 2006, Erik Johnson de même que Jack Skille et Bobby Ryan (qui a passé une partie de sa jeunesse en Californie) ont tout le potentiel de restaurer la grandeur du hockey aux États-Unis et cela n'inclut même pas les joueurs qui sont déjà dans la LNH comme Ryan Miller, Dustin Brown, Brian Gionta, Paul Martin et John-Michael Liles.

« Les Américains aiment adorer les Américains », explique Eliot. «Ils doivent aussi être des joueurs-étoiles, pas seulement des joueurs solides. »

Modano a pavé la voie et est la locomotive mais maintenant qu'il est dans la trentaine. Il peut regarder derrière lui et voir un bon aperçu du futur. Ces dernières années, il a commencé à penser en termes d'accomplissements, particulièrement depuis qu'il s'approche des marques comme les 502 buts de Muller et des 1232 points de Housley même s'il a raté 23 matchs en raison d'une blessure à la hanche et au bas du corps cette saison. En 2005-06, il avait mené son équipe avec 77 points.

« Une fois que j'ai commencé à m'approcher de ces chiffres, tout le monde m'en a parlé », explique Modano. « Je le sais que je m'approche et j'essaie d'apprécier cette course et bientôt, le record va être battu. »

N'a-t-il jamais eu conscience qu'il transportait tous les espoirs d'une nation pour le hockey? Pas réellement répond-il. Ce sont ses espoirs qui lui ont permis de progresser.

Et la retraite? Sujet qui est souvent traité dans les conversations, Modano devient un peu évasif. Il a pensé à sa stratégie de retraite mais la nouvelle Ligue nationale a ses avantage et elle exploite la vitesse et les fabricants de jeu.

Il soutient avec humour que plus il joue, moins il pense à quitter et plus il pense au scénario Chris Chelios qui ne semble pas vouloir prendre sa retraite.