C’est le CIO qui détient les droits de retransmission mondiaux des Jeux olympiques, c’est-à-dire les droits de les diffuser à la télévision, à la radio et sur Internet. Le CIO attribue lesdits droits aux radiotélédiffuseurs internationaux, et ce, en vue d’assurer la couverture la plus complète des Jeux et de les rendre accessibles au plus grand nombre de personnes. Or, seules les entreprises qui se sont vues octroyer par le CIO ces droits pourront diffuser les Jeux de Sotchi et aucune autre entreprise ne pourra distribuer « le son ou les images animées des manifestations des Jeux [1] ».

Voici donc quelques explications sur les nombreuses technicités entourant la diffusion des Jeux, notamment au Canada.

1. Le processus d’attribution des droits de retransmission par le CIO

Le CIO attribue les droits de retransmission par appel d’offres et négociation. Ainsi, la présentation des Jeux se fait par enchères et le candidat doit soumettre la meilleure offre monétaire pour remporter sa diffusion. Outre leur offre financière, le CIO évalue les candidatures selon leur fiabilité dans la promotion des Jeux, leur habilité à fournir la plus haute qualité de diffusion et leur aptitude à rejoindre le plus grand nombre d’auditeurs.

2. L’entente actuelle pour les Jeux de Sotchi au Québec

C’est CBC/Radio-Canada qui sera le diffuseur officiel des Jeux d’hiver de Sotchi et les chaînes spécialisées RDS et TVA Sports s’y sont associées pour la diffusion de certaines disciplines. Toutefois, l'utilisation du contenu olympique est interdite en dehors de la période olympique, et ce, pour tout diffuseur, qu'il soit détenteur de droits de diffusion ou non. Ainsi, même à l’époque où RDS était diffuseur officiel, notamment pour les Jeux de Vancouver et ceux de Londres, il n'avait pas le droit d'utiliser le contenu olympique après les Jeux.

3. Utilisation du contenu olympique pour les non-détenteurs de droits

Le contenu olympique doit être uniquement utilisé pour des émissions d’information, et ce, tant pour les détenteurs que les non-détenteurs de droits. Or, les non-détenteurs ne pourront l’utiliser que de manière très contrôlée. En effet, ils pourront diffuser un maximum de 6 minutes par jour de contenu olympique à raison de 2 minutes par émission, et ce, pour un maximum de trois émissions quotidiennes qui seront diffusées à un minimum de 3 heures d’intervalle. De plus, une manifestation olympique ne pourra être diffusée dans son intégralité à moins d’avoir une durée inférieure de 15 secondes. Toutefois, les chaînes spécialisées en sports et en information seront traitées différemment en ce qu’elles pourront utiliser leurs 6 minutes de contenu olympique sur un maximum de six émissions quotidiennes à raison d’une minute par émission, et ce, si elles sont diffusées à 2 heures d’intervalle. Les non-détenteurs pourront retransmettre les manifestations olympiques 3 heures après sa diffusion par le détenteur officiel local et pour ce faire, ils devront indiquer le nom dudit détenteur sur leur générique. Notons que le contenu olympique n’est disponible que pour une durée de 48 heures à partir de la fin de la manifestation et il ne sera pas diffusé sur les services interactifs d’actualité.

Cela dit, en raison d’une entente particulière avec Radio-Canada, RDS pourra diffuser près de 90 heures de couverture produites par CBC/Radio-Canada, incluant notamment la diffusion en direct des cérémonies d’ouverture et de clôture, la présentation de plusieurs matchs de hockey avec Équipe Canada et des finales de ski acrobatique, de ski de fond et de surf des neiges. De plus, RDS aura droit à 5 minutes de contenu olympique par émission. Ainsi, Sports 30 Magazine et Hockey 360 dont la durée est d’une demi-heure auront droit à 5 minutes chacune. Quant à l’Antichambre, ils n’auront aucun droit d’utilisation, car elle ne rentre pas dans la définition d’une émission d’information.

4. Participation de la LNH aux Jeux de Sotchi… qu’en est-il de PyeongChang en 2018?

Pour les Jeux de Sotchi, la LNH était hésitante en raison de la possibilité de blessures chez ses joueurs étoiles, le renforcement de la fatigue en raison du décalage horaire ainsi que des nombreux coûts économiques découlant de la cessation de ses opérations pendant deux semaines en saison régulière.

Or, au-delà de ces enjeux, ce que la LNH souhaite est d’avoir des droits sur la propriété intellectuelle olympique. Elle désire notamment des droits télévisuels afin de pouvoir diffuser des vidéos olympiques sur leur NHL Network, sur leur site web NHL.com et sur les autres plateformes lui appartenant.Comme ces vidéos constituent de la propriété olympique, la LNH ne peut les diffuser. D’ailleurs le célèbre clip du but gagnant de Sidney Crosby aux Jeux de Vancouver n’a jamais été présenté sur le NHL network, ni sur NHL.com ou encore dans aucun aréna, car bien que la LNH a la chance d’avoir Crosby parmi ses talents, elle n’a pas pour autant de droits sur une victoire olympique. Tout ce qui découle de la victoire du Canada à la compétition de hockey sur glace en 2010 demeure propriété exclusive olympique, et ce, même si elle émane d’un joueur de la LNH.

De ce fait, la LNH ne veut pas simplement être une pourvoyeuse de talents, elle veut faire un partenariat avec le CIO. Bien entendu, advenant une telle situation, ce partenariat aura certes un impact sur les autres ligues professionnelles, notamment la NBA qui pourrait négocier des termes similaires pour les prochains Jeux d’été de Rio de Janeiro en 2016. Considérant que le CIO et la Fédération internationale de hockey sur glace (FIHG) constituent des organisations internationales non gouvernementales à but non lucratif, ils n’ont donc pas la capacité financière d’abdiquer aux demandes de la LNH et de là, la teneur du débat. Malgré ses réticences, la LNH ne peut ignorer la volonté de ses joueurs de participer aux Jeux d’hiver, ni la visibilité qu’assurent les Olympiques au hockey sur glace. De ce fait, ces éléments doivent être pris en compte dans la prise de décision de la LNH.

5. La valeur des droits de retransmission

Les commanditaires corporatifs et les chaînes télévisuelles paient des millions, voire des milliards de dollars, pour obtenir les droits de promouvoir les Jeux olympiques ainsi que le droit d’utiliser la marque de commerce olympique. À titre d’exemple, le consortium médiatique canadien formé à 80 % par Bell média (CTV, TSN, RDS/RIS) et à 20 % par Rogers Media (Omni Television, Rogers Sportsnet et différentes stations de radio) avait payé 90 millions $ pour la diffusion des Jeux de Vancouver en 2010 et 63 millions pour les Jeux de Londres en 2012. Aux États-Unis, NBC avait versé 4 milliards de dollars pour avoir les droits de télédiffusion des quatre prochains Jeux olympiques, soit de 2014 à 2020. Pour ce qui est des Jeux de Sotchi, Radio-Canada n'a pas dévoilé le montant qu’elle a acquitté au CIO, mais il est certain que la société d’État a dû payer quelques dizaines de millions de dollars pour obtenir les droits de diffusion.

Évidemment, ce qui est le plus profitable au CIO est de vendre les droits de diffusion aux chaînes de télévision. De ce fait, la retransmission de ses droits finance le mouvement olympique et les Jeux eux-mêmes, augmente sa visibilité et sa popularité mondiale et les promeut sur la scène internationale. C’est l’importante publicité entourant les Jeux qui rend la compétition si féroce pour remporter les droits de diffusion entre les télédiffuseurs et c’est pourquoi les prix d’acquisition sont si élevés.



[1] Règles d’accès aux informations applicables à la diffusion des Jeux olympiques d’hiver de 2014 à Sotchi, 7-23 février 2014, en ligne :

http://www.olympic.org/Documents/Commissions_PDFfiles/Coordination_Commission/IOC_News_Access_Rules_%20Sochi_Fra.pdf