SOTCHI, Russie - Les patineurs de vitesse courte piste ont embouteillé leurs malheurs et le « jeudi noir » qu'ils ont connu aux Jeux de Sotchi flotte maintenant quelque part sur la mer Noire. Dans un geste symbolique, l'équipe canadienne a lancé une bouteille à la mer, près du parc olympique, vendredi.

La bouteille ne contient pas de message de détresse ni des voeux, mais plutôt toute la frustration et le négativisme de tous les membres de l'équipe, en lien avec la journée de misère de la veille.

La personne qui la retrouvera dans 10, 15 ou 20 ans risque de la remettre à l'eau à la lecture des messages qu'on y a insérés!

Blague à part, l'exercice a allégé l'atmosphère dans le groupe, au lendemain de l'échec des gars au relais 5000 mètres et de la septième place de Marianne St-Gelais au 500 mètres.

François Hamelin, celui qui a ruiné les chances du Canada d'assurer la défense de son titre olympique en chutant en piste, arborait même un sourire.

« Tout le soutien que je reçois depuis jeudi fait que je souris, a-t-il affirmé. Je fais partie d'une équipe extraordinaire. Je me considère très chanceux. Et je suis très fier d'être Canadien dans le moment. »

Le frère cadet de Charles Hamelin a dit avoir vécu « la plus grosse peine de sa vie ».

« J'ai déjà perdu des proches, ç'a été très difficile. Mais le patinage de vitesse sur le plan personnel, c'est toute ma vie depuis 20 ans. »

Son père, Yves, un des dirigeants de l'équipe, a confirmé qu'il n'avait jamais vu son fils dévasté de la sorte, à l'issue de la course de jeudi.

« Je l'ai pris dans mes bras dans le vestiaire, et il a pleuré toutes les larmes de son corps. Il était inconsolable », a mentionné Yves Hamelin.

Ses coéquipiers et tous les autres membres de l'équipe ont tôt fait de s'atteler à la tâche de lui remonter le moral.

« On ne m'a jamais laissé seul à me morfondre pendant longtemps, a repris François. Mes coéquipiers, les entraîneurs et les membres de l'équipe de soutien ont tous été derrière moi. Personne n'était fâché contre moi. Mes coéquipiers m'ont répété que nous formons une équipe qui gagne et qui perd ensemble.

« Oui, c'est moi qui suis tombé, et la réalité est que j'ai fait perdre une médaille au Canada, a continué François. La déception est toujours forte. C'est frais dans ma mémoire, mais on ne peut rien changer. J'ai remonté la pente, et je veux être là pour aider mes coéquipiers à l'entraînement à bien faire dans les deux dernières courses individuelles. Il reste aussi la finale B du relais. »

Un grand cru!

Comme l'entraînement du Canada n'était qu'en début de soirée en Russie, les dirigeants ont pu multiplier les rencontres et les réunions pendant la journée.

C'est ainsi qu'on a eu l'idée de demander à chacun des membres de l'équipe de rédiger un élément négatif d'un « jeudi 13 » qu'ils veulent voir disparaître. Tous les bouts de papier ont été insérés dans une bouteille de vin vide, et le «nouveau cépage», qui n'a de cru que l'appellation, a été balancé à la mer.

On a également demandé à tout le monde d'écrire une note positive, et ces écrits-là ont été placés dans une tuque aux couleurs du Canada.

« Nous partagerons ensemble tout le positif au cours d'une rencontre ultérieure. Pendant ce temps, le négatif va flotter quelque part », a lancé Yves Hamelin.

Les patineurs canadiens doivent vite surmonter leur peine parce la compétition reprend dès samedi, avec la conclusion du 1000 mètres masculin ainsi que l'épreuve féminine du 1500 mètres.

Yves Hamelin a établi un lien entre la malchance du relais 5000 mètres et la disqualification du relais canadien 4 x 100 mètres qui a privé le pays d'une médaille de bronze aux Jeux olympiques d'été de Londres, en 2012.

« Le coureur canadien qui a pilé sur la ligne et la chute de François, c'est la même chose, a-t-il avancé. Les gars du 1000 mètres s'étaient super bien préparés et ils ont fait une course incroyable. Mais il s'est produit quelque chose qui a modifié le cours des événements. Nous, si les gars ne s'étaient pas bien préparés et que la chute de François avait été le résultat de mauvais entraînements, il y aurait lieu d'être mécontent. Mais ce n'est pas le cas du tout. »