Depuis 2000, alors que Pierre-Carl Ouellet effectuait ses derniers combats pour la WCW, aucun lutteur québécois n'avait réussi à percer dans les grandes ligues. Jusqu'au jour où la NCW annonçait en grande pompe la présence sur leurs galas de Sly, un lutteur qui avait signé avec la WWE. Beaucoup, dont moi le premier, doutaient très fort que Sly deviendrait un VÉRITABLE lutteur de la WWE et qu'il n'aurait jamais une seule chance de se prouver lors de grands shows comme Raw is War ou Smackdown.

Pourtant, Sly, maintenant connu sous le nom de Sylvain Grenier, est devenu en un éclair un joueur majeur de l'équipe de Raw en remportant même le championnat par équipe de la section Raw avec son coéquipier René Dupré. Comment expliquer qu'un lutteur totalement inconnu des fans de lutte québécoise, qui n'a jamais vraiment "payé son dû" dans les fédérations indépendantes au Québec, au Canada et aux Etats-Unis, se retrouve si facilement une tête d'affiche de la WWE? La réponse: l'école de lutte de Dory Funk (The Funk Factory) et les contacts avec Pat Patterson.

Quelle école de lutte choisir?

Lorsqu'un Québécois a l'ambition de devenir lutteur, plusieurs choix d'écoles s'offrent alors à lui. Selon la région où il habite, il peut s'entraîner à l'école des différentes fédérations indépendantes du Québec, qu'il s'agisse de la CCW dans la vieille capitale, de la FCL dans la région de Shawinigan, de la JCW dans la région de Jonquière, etc.

En outre, depuis 1999, une fédération a permis aux lutteurs québécois de sortir des petites salles (appelées avec dépit par certains comme de "la lutte de sous-sol d'église"). C'est Lutte Internationale 2000 dirigée par Jacques Rougeau. Les cours sont plus dispendieux (environ 2000$ à comparer de quelques centaines de dollars pour les autres fédérations indépendantes). Cependant, Rougeau donne un salaire à ses lutteurs et permet à ceux-ci de performer près de 10 fois par année devant des milliers de spectateurs (entre 2000 et 6000 spectateurs en moyenne).

Finalement, une dernière possibilité s'offre à ceux qui ont l'espoir de lutter pour la WWE ou d'autres fédérations d'importance moyenne comme la NWA-TNA et le Japon, par exemple. C'est de s'accumuler un gros pécule (environ 5000$ et ça c'est sans considérer les frais de subsistance - un 10 000$ de plus probablement) et de s'inscrire à une école célèbre qui ont des contacts directs avec la WWE, comme l'école de Dory Funk Jr et Rocky Johnson pour Sylvain Grenier ou encore l'école de Killer Kowalski à laquelle mon collègue de RDS.ca, Pace, s'est inscrit et à qui je souhaite la meilleure des chances en passant. À cet égard, allez lire les chroniques "Les Vicissitudes de Pace tome 2 et 3", dans lesquelles Pace explique son expérience à l'école de Killer Kowalski.

Une école de lutte peut-elle offrir plus d'opportunités?

Selon la dernière chronique de Sunny War Cloud (Sunny a toujours des commentaires très pertinents à faire sur la lutte québécoise et je vous invite à lire la 47e édition de sa chronique: http://www.ccw.qc.ca/flash/chronique030821.shtm), l'exil dans une école de lutte reconnue est loin d'être garant du succès dans le monde de la lutte: "À 3800$ pour s'acheter un job, c'est o.k., mais pour un loisir, c'est beaucoup, car il n'y a plus de job dans la lutte à part si tu connais bien quelqu'un dans l'office." (Sunny War Cloud, Chronique sous la tente, 47e Édition).

À cet égard, je partage l'opinion de Sunny War Cloud, à savoir qu'une école de lutte ou une autre n'ouvrira pas plus de portes. Toutefois, j'avoue que le choix d'une école de lutte est important pour apprendre la bonne technique et que le fait de provenir d'une école réputée des États-Unis comme l'école de Dory Funk Jr ou Killer Kowalski peut être plus impressionnant que de provenir d'une petite fédération indépendante du Québec pour certains promoteurs d'envergure moyenne.

D'ailleurs, force est de constater que c'est présentement Sylvain Grenier, un lutteur qui a appris la lutte à l'école de Dory Funk Jr, qui lutte à la WWE et non pas des lutteurs qui ont appris la lutte au Québec comme Paranoid Jake Matthews, Chakal, Chase Ironside, Excess 69, Kevin Martel, Franky The Mobster ou même Pierre-Carl Ouellet…

Le cas Pierre-Carl Ouellet

Pierre-Carl Ouellet est un cas unique dans le monde de la lutte québécoise, puisqu'il est probablement le seul lutteur à vivre de la lutte et cela en luttant la plupart du temps au Québec, que ce soit pour LI2000 ou plus récemment pour d'autres fédérations comme la CPW de Hull ou la CWA et la IWS de Montréal. Pierre-Carl Ouellet est une exception au Québec, à savoir qu'il est le seul lutteur à pouvoir gagner sa vie avec la lutte sans s'exiler. Et pourtant…

Pourtant, c'est faux. Pierre-Carl Ouellett, qui a appris la lutte à l'école du "Flying Frenchman" Édouard Carpentier, a dû s'exiler pour faire sa marque dans la lutte, que ce soit pour l'Europe, l'Afrique du Sud, Puerto-Rico, le Japon ou même l'Arabie Saoudite. Bref, c'est grâce à ses tournées internationales et à ses passages à la WWE et la WCW que Pierre-Carl Ouellet est devenu un nom synonyme d'une légende de la lutte québécoise et qu'il attire beaucoup de spectateurs. À ce titre, même à l'époque où la lutte était encore forte au Québec, un lutteur comme Rick Martel a dû s'exiler pour faire sa marque, tellement qu'il a détenu le championnat du monde de la AWA durant plus d'un an. Par la suite, il a pu revenir dans la belle province et devenir la légende que l'on connaît aujourd'hui.

L'exil est-il garant du succès?

L'exil à lui seul n'assure pas toutefois le succès dans le monde de la lutte. Par exemple, Franky the Mobster a connu un succès mitigé durant sa tournée dans les Maritimes récemment. En outre, un lutteur comme Chakal, qui a été le champion de la NCW au Québec et de la AWF en Ontario, a réalisé son rêve de lutter au Japon en luttant pour la GAEA. Malheureusement, sa tournée au Japon n'a pas eu d'effet d'entraînement sur sa carrière au Québec. En fait, présentement, seule Precious Lucy (maintenant connu sous le nom de LuFisto) semble profiter de ses tournées internationales.

Le cas Precious Lucy

De ceux qui ont appris la lutte après 1995, Precious Lucy est celle qui a travaillé le plus fort pour essayer de percer dans les grandes ligues. Elle a d'abord participé à la relance de la lutte québécoise par Jacques Rougeau en devenant une lutteuse de LI 2000. C'est à partir de ce moment que les médias québécois ont découvert cette lutteuse exceptionnelle. Depuis, elle a participé à beaucoup d'émissions de variété dont l'émission Le point J durant laquelle elle a lutté contre Julie Snyder elle-même.

Par la suite, elle a effectué des tournées canadiennes et internationales en passant par l'Ouest canadien, l'Ontario, le Tennessee, etc.

En août 2002, elle est invitée pour la première fois à lutter au Mexique pour la Lucha Libre Feminil. L'été 2003 fut très bénéfique pour la jeune lutteuse, puisqu'elle retourna lutter au Mexique pour la Lucha Libre Feminil et fut en plus engagée pour lutter durant une tournée de trois mois (d'août à octobre) au Japon pour la fédération de lutte féminine A to Z Japan. Une tournée aussi importante et aussi longue est un exploit qu'aucun lutteur québécois qui a appris la lutte après 1995 n'avait réussi auparavant. Bref, souhaitons maintenant que les tournées de Precious Lucy (LuFisto) lui permettent un jour de vivre de la lutte professionnelle.

Conclusion

D'après les conclusions de mon analyse, il semble que le choix d'une école de lutte peut avoir un impact dans la carrière d'un lutteur en ce qui concerne l'apprentissage d'une bonne technique de lutte, l'apprentissage de l'anglais et certains contacts. Toutefois, force est de constater qu'elle ne garantira pas le succès pour autant et que le fait d'avoir appris à lutter au Québec n'empêchera pas le succès. Ainsi, Pierre-Carl Ouellet a appris la lutte à l'école d'Édouard Carpentier à Montréal et Precious Lucy à l'école de Sorel et remportent un succès indéniable.

Néanmoins, peu importe le talent du lutteur (à moins qu'il s'appelle Sylvain Grenier qui est l'exception à la règle), s'il ne fait pas de tournées au Canada, aux États-Unis, etc., il a peu de chance de se retrouver dans les médias québécois, sur des médias électroniques importants de lutte, de se faire connaître et remarquer ne serait-ce que par des fédérations d'envergure moyenne comme la NWA-TNA, le Mexique ou le Japon.

Bref, des lutteurs qui sont prêts à lutter pour la WWE au Québec (pour reprendre le débat du Webzine), il doit y en avoir au moins 7: Paranoid Jake Matthews, Franky The Mobster, Chase Ironside, Chakal, Precious Lucy, Excess 69, Kevin Martel et peut-être même d'autres. Mais la meilleure façon pour que les lutteurs québécois se retrouvent plus nombreux à la WWE, ce n'est pas l'école de lutte ni les contacts, mais plutôt le fait que la lutte québécoise devienne une menace, même infime, à la WWE en allant chercher plus de spectateurs. Si la lutte québécoise devient un divertissement d'une envergure moyenne au Québec, ça va faire peur à la WWE et ils vont ainsi venir nous voler tous nos meilleurs lutteurs…

Retour sur la chronique: NCW toujours numéro 1

Dans ma dernière chronique, je réaffirmais que, selon mon analyse, la NCW était toujours numéro 1 au Québec. Afin de mieux me faire comprendre, je vais expliquer rapidement mon choix. D'abord, lorsqu'on évalue quelqu'un ou quelque chose, il faut toujours des critères, sinon on demeure dans la subjectivité. Les critères où la NCW performe sont les suivants: beaucoup de galas par année (une dizaine de galas n'est pas considéré comme beaucoup), former la plupart de ses talents, avoir une durée significative et de qualité progressive (la NCW existe depuis plus de 10 ans et s'améliore d'année en année), les lutteurs piliers de la fédération doivent être jeunes, athlétiques, charismatiques, connaître les techniques et la psychologie de la lutte et viser au moins des tournées canadiennes (Chakal, Franky The Mobster, Chase Ironside) et la qualité générale du spectacle. Sur ces points, aucune fédération ne surpasse la NCW au Québec.

Les écoles de lutte québécoises

Pour de plus amples informations sur les écoles de lutte québécoises, consultez la nouvelle section québécoise du site internet infolutte (http://www.info-lutte.com/). La section a complètement été révisée et est un véritable bijou pour tous ceux qui s'intéressent à la lutte québécoise, car vous pouvez y retrouver une foule d'informations sur les écoles de lutte au Québec, sur les fédérations québécoises, les lutteurs, etc.

François Choquette
francoischoquett@hotmail.com

Prochaine chronique: Le syndicat de lutte internet au Medley!