Après trois défaites consécutives en finale de la Coupe du monde de rugby féminin, l’Angleterre partait largement favorite contre le Canada. Et la logique a été respectée. Les Anglaises ont finalement mis la main sur le trophée tant convoité au terme d’un match âprement disputé.

Jusqu’à la 75e minute, jusqu’à l’essai d’Emily Scarrat, les Canadiennes n’étaient qu’à un essai transformé de la victoire. Cela témoigne de l’engagement du jeu tout au long du match. Scarrat avait ouvert la marque sur une pénalité à la 10e minute, suivie d’une deuxième quinze minutes plus tard. C’était alors 6-0. Puis l’arrière Danielle Waterman réussit un essai à la troisième tentative de l’Angleterre qui bousculait les Canadiennes au fond de leur zone. Cette fois-ci, Scarrat rate les poteaux et la marque est de 11-0. Juste avant la mi-temps, une pénalité réussie par Harvey permet aux Canadiennes de continuer d’espérer.

Et elles reviennent en force sur le terrain. Harvey marque coup sur coup deux autres pénalités pour ramener l’écart à deux points. Mais Scarrat, encore elle, en marquera dix autres (pénalité, essai, transformation) pour sceller le pointage 21-9. C’est toujours difficile de perdre une finale, mais dans ce cas-ci, le Canada n’a certes pas à rougir de sa performance. Match après match, les filles se sont améliorées, ont joué avec plus d’aplomb et plus de confiance. Se rendre jusqu’à la finale a été en soi un fait d’armes.

Trois exploits

Il y a eu deux grosses surprises dans cette Coupe du monde : l’élimination de la Nouvelle-Zélande, championne en titre, après la phase de poule, et l’accession du Canada à la grande finale. La finale était le but avoué du Canada, mais pour s’y rendre, les embûches étaient nombreuses.

Premier exploit : d’abord sortir de la poule comme meilleure deuxième. Quand l’Irlande a battu la Nouvelle-Zélande, on savait que ce serait difficile parce que la seule avenue pour poursuivre vers la finale pour les Néo-Zélandaises était de prendre le billet des meilleures deuxièmes. Mais grâce à un match monumental du Canada contre l’Angleterre, où il a fait match nul 13-13, le Canada a franchi l’étape suivante.

Deuxième exploit : battre la France en demi-finale. La France, favorite avec l’Angleterre, jouait chez elle devant une foule impressionnante et motivée. Le Canada revient deux fois au score en première mi-temps, puis prend le large 18-6 en deuxième et résiste enfin à une remontée de la France dans les dernières minutes de jeu. Il accède donc à la grande finale.

Troisième exploit : participer à la finale et rester dans le match jusqu’à la fin. Certes la médaille d’argent a arraché quelques larmes aux filles qui voyaient plutôt l’or leur échapper, mais ce sentiment finira par passer quand elles prendront la mesure de tout ce qu’elles ont réalisé. C’est une grande réussite pour le rugby canadien. Les filles ont montré qu’elles pouvaient affronter les meilleures au monde et faire jeu égal avec elles. Mieux encore, elles font maintenant partie des meilleures au monde!

Magali Harvey a été dominante pour l’équipe du Canada. Elle a réussi un essai spectaculaire de 80 mètres qui s’est retrouvé sur YouTube dans le temps de le dire! Elle était en lice pour le titre de meilleure joueuse de l’année de la Fédération internationale, aux côtés de Safi N’Diaye (France), Kelly Russell (Canada), Niamh Briggs (Irlande) et Sarah Hunter (Angleterre). C’est sans surprise qu’elle a été couronnée. Un titre largement mérité pour une joueuse polyvalente avec une vision exceptionnelle du jeu.

L’équipe canadienne est bourrée de talents. Pensons à Stéphanie Bernier, une demi de mêlée au jeu éclairé, excellente générale à l’attaque. Son absence –rupture des ligaments croisés et ménisque amoché lors du match contre la France – a fait mal (sans jeu de mots) au Canada, même si sa remplaçante Alissa Alarie a plutôt bien fait dans les circonstances. Sauf que c’était aussi priver l’attaque canadienne d’une excellente arrière. Karen Paquin a aussi été remarquable sur la troisième ligne. Elle a été de tous les combats et on lui doit nombre de placages et de récupérations. Mais on pourrait toutes les nommer : Marchack, Burk, Belchos, Blackwood, Pinault-Reid et j’arrête là de peur d’en oublier. François Ratier a fait du bon boulot avec cette équipe, et si pour l’Angleterre cette Coupe du monde marque la fin d’une ère, pour le Canada, elle en lance plutôt une.

Le rugby à sept sera aux Jeux olympiques de Rio et plusieurs des filles que nous avons vues dans cette Coupe du monde feront partie de l’équipe canadienne. Cette fois-ci, elles arriveront d’ores et déjà parmi les favorites.