MONTRÉAL – Aussi déchirante était la perspective de quitter sa ville natale et le club qu’il avait toujours chéri, Harry Shipp s’est vite trouvé une source de réjouissance quand le Fire de Chicago l’a échangé à l’Impact l’hiver dernier.

Pour un jeune Américain qui a grandi en rêvant de jouer en MLS mais qui a fait son entrée dans le circuit au sein d’une équipe médiocre, la perspective de finalement participer aux séries éliminatoires n’était pas une consolation négligeable. Et quand il a appris qu’il devait déménager à Montréal, Shipp a regardé le calibre des joueurs qu’il s’en allait rejoindre et a séché ses larmes en se disant que c’était pratiquement dans la poche.

« Les deux premières années de ma carrière ont été frustrantes, racontait le sympathique jeune homme de 24 ans, tout suintant, après avoir fait un peu de temps supplémentaire à l’entraînement de jeudi. J’adorais tout de Chicago, mais ne pas participer aux séries pendant deux ans, ça a été difficile. Tu es assis chez toi et tu ne veux pas vraiment écouter les matchs à la télé parce que tu es jaloux de tous ces gars qui ont la chance de jouer. Alors quand je suis arrivé ici, c’est le premier but que je me suis fixé : aider cette équipe à se qualifier pour les séries. »

Shipp n’est quand même pas étranger au succès. En 2013, à sa dernière année d’admissibilité au niveau universitaire, il a remporté le championnat de la NCAA au sein d’une édition pratiquement imbattable des Fighting Irish de Notre Dame. Cette année-là, il avait aussi reçu le titre de joueur offensif par excellence de la Atlantic Coast Conference (ACC).

« Ce championnat, c’est probablement le fait saillant de ma vie d’athlète. C’est drôle parce que je crois qu’on avait perdu un seul match cette année-là, mais c’était celui juste avant le début du tournoi éliminatoire et une petite panique s’était installée au sein du groupe. Finalement, on s’énervait pour rien parce qu’on avait gagné tout le reste. On ne sait jamais quand une séquence victorieuse va commencer. »

Mais cette quasi-invincibilité n’a pas suivi Shipp chez les pros, où il a fait face à l’adversité pour la première fois de sa jeune carrière.

« L’année précédant mon arrivée, le Fire avait connu une grosse fin de campagne et les attentes étaient élevées pour ma saison recrue. Mais cette année-là, on avait établi un record pour le nombre de matchs nuls, je crois qu’on en avait eu 21 (18, NDLR). Il y a un paquet de ces matchs où on croyait mériter la victoire, mais plus les choses n’allaient pas à notre goût et plus notre confiance s’envolait, plus on s’apitoyait sur notre sort. Finalement, on n’a jamais su s’en sortir. »

Avec un peu d’imagination, on jurerait que Shipp parle de la saison actuelle de l’Impact.

De longues heures de réflexion

Mais même si l’Impact, une déception à la fois, flirte avec le risque de voir son destin lui glisser entre les doigts, le jeune milieu de terrain n’est pas prêt à envisager la possibilité de connaître l’échec pour une troisième fois en autant d’années.

« En 2014, on avait à mon avis les ingrédients pour être une bonne équipe, mais pas une excellente équipe. Ici, le potentiel est beaucoup plus grand et c’est ce qui est frustrant pour tout le monde, compare le petit numéro 14. C’est la beauté – ou parfois la triste réalité – du soccer : ce n’est pas toujours l’équipe qui a les 11 meilleurs joueurs qui va l’emporter. On parle souvent de chimie, de trouver le bon rôle pour chaque joueur. Ce sont des petites choses sur lesquelles on doit encore travailler ici. »

Jamais facile de gagner à New York

Shipp dit avoir passé de longues heures à se questionner sur ce qui pouvait bien clocher chez l’Impact et encore aujourd’hui, il n’a pas d’explication pour le manque de constance affichée par sa nouvelle équipe. Celle-ci n’est pas moins talentueuse qu’en début de saison et l’ardeur au travail n’a pas baissé d’un cran, remarque-t-il.

Il tente ensuite de se rassurer en arguant qu’il reste amplement de temps pour ajuster le tir, mais n’offre aucune résistance quand on rétorque qu’il n’en reste pas tant que ça.

« Les gars ressentent ce sentiment d’urgence, je vous le promets. À l’entraînement, on ne néglige aucun détail dans l’espoir que ça finisse par cliquer. Tout ce que ça prend, c’est un peu de positif qui mène à un peu plus de positif et tout d’un coup, vous réalisez que la confiance est en hausse. Regardez ce qui se passe en Nouvelle-Angleterre. Le Revolution était en bien pire posture que nous, mais soudainement il remporte trois matchs de suite et se retrouve au sommet du monde. On ne sait jamais ce qui peut produire cette étincelle, mais si on continue de se concentrer sur les bonnes choses, on augmente nos chances que ça nous arrive à nous aussi. »

Personne ne fera de cadeau à l’Impact d’ici la fin de la saison. À commencer par les Red Bulls de New York en fin de semaine, le Bleu-blanc-noir affrontera quatre rivaux de section pour clôturer son calendrier. Conscient du danger, mais loin d’être découragé, Harry Shipp continue de croire que cette année est la bonne et qu’il participera aux séries à sa première année à Montréal.

« On va finir l’année en force. Tout ce que ça prend, c’est un ou deux résultats favorables pour nous redonner le sourire. Et puis on l’a vu auparavant dans cette ligue : si vous entrez en séries avec le vent dans les voiles, tout peut arriver. »

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