Les dernières journées de course à pied ont été intéressantes. Lorsque Dame Nature décide d’ajouter du piquant à une compétition de course à pied, cela peut devenir passionnant et brouiller les cartes. On l’a constaté en début de semaine alors qu’une pluie froide et des vents soutenus sont venus compliquer la tâche des participants du 122e Marathon de Boston. Résultat : les coureurs habitués à la chaleur et aux victoires ont été écartés de la plus haute marche du podium.
 
Pour la première fois en 33 ans, c’est une Américaine, Desi Linden, qui a remporté la course. Chez les hommes, l’honneur est allé au Japonais Yuki Kawauchi, un coureur amateur, mais mondialement connu pour sa folle manie d’enfiler les marathons. Il est le détenteur du record de marathons courus en moins de 2 h 20, un exploit accompli à 79 reprises!
 
Callum HawkinsÀ l’autre bout de la planète, aux Jeux du Commonwealth, en Australie, c’est la chaleur qui est venue compliquer la journée de travail de l’Écossais Callum Hawkins. À deux kilomètres de l’arrivée, alors qu’il menait l’épreuve de 42,2 kilomètres, il s’est effondré sur le bitume brûlant. Il a attendu pendant de très longues minutes l’arrivée des secours pendant que des spectateurs se contentaient de le photographier plutôt que de lui venir en aide. Ils n’ont pas bien paru.
 
S’il peut être difficile de prédire la météo lors des courses, il en va tout autrement pour le terrible Marathon des Sables, une épreuve d’endurance disputée en six étapes sur autant de jours dans le désert hostile du Sahara, au Maroc. On sait qu’il fera très chaud!
 
Ce fut le cas lors de la 33e édition de cette course par étapes qui s’est terminée le samedi 14 avril après 247 kilomètres de souffrance pour les 977 courageux inscrits. De ce nombre, 934, des professionnels et des amateurs, sont parvenus à se rendre jusqu’au bout. Un excellent ratio qui prouve que ceux qui s’inscrivent à cette course sont adéquatement préparés.
 
Ce qui rend le Marathon des Sables si difficile, c’est qu’il s’agit d’une course en autosuffisance. Les participants ont droit à un sac à dos d’un poids maximal de 13 kilos pour toute leur semaine de course. Ils transportent leur tente, leurs vêtements et leur nourriture. Chaque matin, lorsque le départ d’une étape est donné, les organisateurs remettent 1,5 litre d’eau aux concurrents. C’est tout ce qu’ils auront jusqu’à l’arrivée en soirée où ils seront récompensés par 4,5 litres supplémentaires. À eux de gérer ce petit trésor!
 
L’idée du Marathon des Sables est celle du Français Patrick Bauer. En 1984, pour se ressourcer et s’éloigner des distractions de la vie, il s’était lancé un défi hors norme, celui de traverser 350 kilomètres de désert saharien en solitaire et parfaite autonomie. Il aura besoin de 12 jours et d’un sac à dos plein à ras bord pour réussir. Deux ans plus tard, il s’inspirera de son expérience pour mettre sur pied la première édition de la course. Une vingtaine de participants répondront à son invitation. Cette année, ils étaient près d’un millier.
 
Rachid El MorabityDes coureurs sont devenus légendaires grâce à cette course du désert. Pour une cinquième année de suite et sixième fois de sa carrière, le Marocain Rachid El Morabity a triomphé au Marathon des Sables en 19 heures et 35 minutes. Il est encore loin des plus grands champions de ce marathon, les frères Mohamad et Lahcen Ahansal. Ce dernier a gagné à dix reprises, dont sept fois devant son frère. Mohamad, quant à lui, a terminé premier cinq fois.
 
Chez les femmes, c’est l’Américaine Magdalena Boulet qui a achevé l’éreintante épreuve au premier rang en 25 heures et 11 minutes. Un premier triomphe dans son cas. Toujours du côté féminin, soulignons l’excellente huitième position de la Québécoise Laurence Filion. En tout, une douzaine de Canadiens ont pris part à l’événement.
 
Bien gérer son effort est souvent la clé au Marathon des Sables qui est reconnu comme une des courses les plus difficiles au monde et qui fait partie du calendrier de l’Ultra-Trail World Tour. Les concurrents doivent composer avec les nuits froides du désert qui frôlent parfois le point de congélation. Et que dire des températures dantesques du jour sinon qu’elles sont épuisantes? Il n’est pas rare que le mercure s’approche des 50 degrés Celsius ou qu’une tempête de sable s’invite à la fête. Ce fut le cas lors de la sixième et dernière étape de cette année.
 
Le soir, les coureurs doivent eux-mêmes monter leur tente, préparer leur repas, panser leurs blessures et préparer l’étape du lendemain. Des dépenses énergétiques supplémentaires alors que tout le corps implore un repos.  
 
Le sable mou rend chacun des pas laborieux et le moindre grain de sable s’immisçant dans une chaussure peut signifier un calvaire pour les coureurs. C’est d’ailleurs le mal le plus fréquent puisque ce sable cause de sévères ampoules aux pieds et entraîne des abandons.
 
Encore une fois cette année, le Marathon des Sables aura été à la hauteur de sa réputation. La victoire y est possible, mais pas facile. Bien sûr, il s’agit d’une épreuve de performance, mais également d’un moment pur d’introspection et de méditation qui aide à la découverte de soi. C’était l’objectif de Patrick Bauer en 1986. Une traversée du désert qui change la vision de la vie.
 
S’il y a une chose à retenir au sujet des conditions climatiques présentes lors des courses ci-haut mentionnées, c’est qu’elles sont capables de freiner l’ardeur d’un coureur et de briser son rêve. Ce fut le cas aux Jeux du Commonwealth. Par contre, à Boston et au Maroc, lorsqu’un objectif est solidement ancré dans sa tête, on a bien vu que rien ne peut empêcher le coureur de rallier l’arrivée.