La planchiste Annie Guglia n’a jamais rêvé d’olympisme, mais depuis que son sport a été ajouté au programme de Jeux de Tokyo 2020, elle a réorienté sa vie pour être une athlète en skateboard.

Elle est passée de monter sur sa planche une fois par semaine de façon récréative, à s’entraîner presque tous les jours pour développer de nouvelles manœuvres. Avant, elle attendait que ses blessures guérissent toutes seule pour reprendre sa planche, maintenant elle est suivie par une équipe de physiothérapeutes au quotidien. Elle n’est plus qu’une planchiste, elle est aussi une athlète.

« Comme les Jeux olympiques n’ont jamais été un rêve pour moi, je ne serai pas détruite si je ne me qualifie pas. Mais en même temps, c’est une occasion que j’essaie de réaliser depuis déjà un peu plus d’un an. J’ai changé un peu mes projets de vie pour ça depuis que j’ai terminé mes études en janvier dernier. Je veux devenir la meilleure skateuse possible. Réaliser tout ce que je peux », a-t-elle affirmé.
Elle a revu ses méthodes d’entraînement et a une nouvelle approche. « Avant, je me disais parfois que ça ne valait pas la peine que j’apprenne un truc ou un autre, mais maintenant, je vois que ça peut m’amener plus loin. Ça me motive, pas juste pour les Olympiques, mais aussi pour grandir en tant que skateuse », a-t-elle précisé.

Et les efforts de la planchiste de 28 ans portent leurs fruits. En 2017, elle est devenue la première Canadienne à participer à l’épreuve de street des X Games, à Minneapolis. Il y a à peine quelques semaines, elle a remporté une étape de la Coupe du monde de skateboard présentée au Jackalope, un festival de sports extrêmes qui avait lieu au Parc olympique de Montréal.

Dès vendredi après-midi, elle prendra part à la compétition féminine du Am Getting Paid, au TAZ, à Montréal. C’est la première fois cette année que les femmes ont leur propre catégorie à cet événement d’envergure internationale, mais ce n’est pas l’initiation de Guglia. La planchiste québécoise y avait participé l’an dernier et avait affronté les hommes dans la catégorie ouverte. Elle est cependant bien heureuse de voir qu’elle et ses compatriotes féminines ont une catégorie bien à elles cette fois-ci.

« Le skateboard au féminin est en plein essor. Les femmes ont de plus en plus d’occasions de participer à des compétitions et c’est super. L’ajout du volet féminin au Am Getting Paid est plus qu’une victoire pour nous, parce que c’est la première fois chez les amateurs que la bourse attribuée à la gagnante est la même que celle de la catégorie masculine », a-t-elle expliqué.

Guglia indique que les femmes qui pratiquent le skateboard vivent en ce moment ce que les hommes vivaient au début des années 2000, quand le sport commençait à s’établir dans la culture populaire.

Elle a elle-même découvert ce qui allait devenir sa passion en 2001. Elle était alors âgée de 10 ans et essayait de manier la planche que son frère avait reçue comme cadeau de Noël. « Je ne comprenais pas comment ça fonctionnait quand les skaters faisaient des mouvements et que le skateboard restait collé à leurs pieds. Ça m’intriguait vraiment! Pendant un été de temps, j’essayais de faire un ollie. Ça m’a ouvert sur l’univers du skate et je n’ai jamais fait d’autres sports », a-t-elle raconté.

Cinq ans après être montée sur une planche pour la première fois, Guglia a fait la connaissance des Skirtboarders, un groupe de filles établi à Montréal qui voyageait pour promouvoir le skateboard au féminin.

« À ce moment-là, c’était difficile pour les filles de faire leur place dans l’industrie. Le sport se développait encore de côté masculin, alors c’était encore moins connu chez les filles », a mentionné Guglia.

En plus des progrès chez les femmes, l’entrée du sport au programme des Jeux olympiques de Tokyo a forcé l’implantation de nouvelles structures organisationnelles dans le milieu du skateboard, notamment la création d’une fédération canadienne.

« Il y avait déjà des pays qui avaient une fédération, mais je crois que c’était sage d’attendre au Canada. Une structure de championnats du monde est en train de se construire, donc c’est bien d’avoir une fédération nationale qui voit le jour. Je pense que tout ça arrive à un très bon moment. Je trouve que tout ça, c’est naturel », a expliqué celle qui a fait son mémoire de maîtrise en stratégie de gestion sur l’industrie du skateboard.

Le Am Getting Paid est d’ailleurs un premier pas vers cette nouvelle structure.

« Le Am Getting Paid est vraiment important pour les athlètes canadiens parce que c’est la première compétition qui est sanctionnée par la nouvelle fédération nationale de skate qui s’appelle Canada Skateboard. Il y aura éventuellement une équipe nationale qui sera créée et cette compétition comptera dans le processus de points pour en faire partie », a dit Guglia.

Pour sa part, elle tentera de tout donner sur le parcours, en profitant du temps qu’elle passera avec ses copines de l’industrie de passage à Montréal. Bien sûr, elle ne dirait pas non à un podium, c’est toujours son objectif ultime.