MONTRÉAL – Abraham Toro et Louis-Philippe Pelletier étaient âgés de 10 ans lorsqu’ils se sont connus à Montréal.

Les deux joueurs de baseball défendaient les couleurs des A’s de Ville-Marie dans la Ligue intercité Métropolitaine. Cette année, les deux Québécois ont disputé leur première saison au Seminole State College  en Oklahoma dans la National Junior College Athletic Association (NJCAA), l’antichambre de la prestigieuse NCAA.

Toro et Pelletier sont de retour au Québec depuis quelques semaines et devinez quoi? Ils sont également coéquipiers dans la Ligue de baseball junior élite du Québec (LBJEQ) avec les Orioles de Montréal.

Les deux jeunes hommes ont gravi les échelons du baseball simultanément et ils sont maintenant susceptibles d’être sélectionnés par l’une des 30 équipes du baseball majeur lors du repêchage qui se tiendra de jeudi jusqu'à samedi. Rien n’est coulé dans le béton, mais grâce à leurs prestations au Seminole College, les deux joueurs peuvent entretenir un brin d'espoir pour les rondes plus tardives de samedi.

Pelletier a déjà vécu l’expérience du repêchage en 2014 lorsqu’il a été sélectionné en 38e ronde par les Padres de San Diego. Incapable d’en venir à une entente avec la formation californienne, le voltigeur de 20 ans est de nouveau admissible.

« Pour cette année, je ne veux pas me faire trop d’attentes pour ne pas être déçu. Mais j’ai appris que dans le fond, il ne faut jamais que tu lâches », a raconté Pelletier lorsque rencontré lundi au Stade Gary-Carter à Ahuntsic, domicile des Orioles de Montréal.

« Nous sommes un peu nerveux parce qu’on ne sait pas trop ce qui va se passer. Nous avons tous les deux connu une bonne saison. Ils nous restent juste à attendre, a exprimé Toro qui est âgé de 19 ans.

« On a toujours joué dans la même équipe depuis qu’on est petit et on a grandi ensemble. C’est un de mes bons amis. Ce serait vraiment fou d’être repêché ensemble », a-t-il ajouté.

Louis-Philippe PelletierÀ leur première campagne dans les rangs collégiaux américains, Toro et Pelletier ont tout cassé. Pelletier a terminé la saison avec une moyenne au bâton de ,445 et un impressionnant total de 24 circuits, tout ça en tant que premier frappeur du rôle offensif des Trojans.

« Avant que la saison commence, je m’étais fixé un objectif d’environ 10 circuits, a indiqué celui qui a terminé au 5e rang de la NJCAA pour les longues balles. [...] J’ai pris plus d’expérience puisque j’ai affronté de meilleurs lanceurs et de meilleures équipes. »

Toro, qui frappait au troisième rang, a lui aussi attiré l’œil des dépisteurs avec ses statistiques au bâton. Le natif de Greenfield Park a maintenu une moyenne au bâton de ,439 avec 86 points produits, un record pour un Québécois évoluant dans le baseball collégial ou universitaire américain.

« On savait qu’on allait bien faire, mais les deux, nous avons été surpris. C’était une saison au-delà de nos attentes. [...] J’ai changé mon approche au bâton. Avant, j’étais un joueur qui allait plus pour le contact. Maintenant, j’ai pris du poids et je suis plus un frappeur de puissance», a expliqué le troisième-but des Trojans qui a cogné 20 circuits.

« Depuis que je suis tout petit, je rêve de devenir pro. C’est le rêve de tous les joueurs de baseball. Mais c’est vraiment cette année que j’ai réalisé que mes habiletés ont augmenté », a reconnu Toro, un souriant athlète de six pieds un pouce.

Leur entraîneur-chef avec les Orioles, Marc-André Ronda, a remarqué cette évolution chez les deux éléments clés de son équipe.

« Ce sont des gars qui ont travaillé fort dans le gymnase et qui ont pris de la maturité physique. Ils avaient les outils, mais tout semble s’être soudé ensemble. Le coffre a l’air d’être complet », a imagé Ronda dont la formation mène la LBJEQ avec une fiche de 14-2.

Défensivement, Pelletier a dû effectuer un changement avec le Seminole State College qui a accueilli plusieurs Québécois au fil des ans, dont Éric Gagné. Celui qui évoluait majoritairement au deuxième but a été transféré dans le champ extérieur, une première pour lui. Bien qu’il considère s’être grandement amélioré en tant que voltigeur, il admet avoir encore quelques lacunes. Somme toute, la transition se passe bien pour lui.

Abraham ToroToro est un joueur d’avant-champ naturel qui est doté d’un puissant bras. Dans le match de lundi soir face au Royal de Repentigny, Toro a démontré tout son savoir-faire à l’arrêt-court, position qu’il occupe avec les Orioles. Dès la première manche, il est allé loin à sa droite pour cueillir un roulant avant d’effectuer un relais parfait au premier coussin pour le retrait.

Pourtant, certaines équipes du baseball majeur voudraient le repêcher et le transformer en receveur. Étant un frappeur ambidextre, le Québécois aux racines vénézuéliennes possède des atouts qui ne se voient pas souvent chez les hommes derrière le marbre.

« La raison : elles veulent mon bras, a exposé Toro pour expliquer le changement de position. Je frappe des deux côtés, alors c’est quelque chose d’assez rare comme receveur. Il y a certaines équipes qui veulent que je reste au troisième but. Alors ça dépend. »

Les ligues majeures, mais pas à tout prix

S’ils sont repêchés dans les prochains jours, Louis-Philippe Pelletier et Abraham Toro auront un choix difficile à faire : signer un premier contrat professionnel et quitter les Orioles en direction des États-Unis ou retourner au Seminole State College à la fin de l’été.

Dès qu’un joueur accepte une entente avec une formation du baseball majeur, il met automatiquement fin à son parcours dans les rangs scolaires. Bref, les deux Québécois ne pourraient plus jouer pour l’institution de l’Oklahoma ni éventuellement recevoir une offre dans la NCAA.

« On veut jouer pro. C’est l’objectif depuis que nous sommes petits. On ne sait pas encore (quelle serait notre décision). C’est une très grosse décision pour notre carrière. On ne veut pas prendre une décision émotionnelle. On veut faire ce qui est la meilleure chose pour nous », a convenu Toro qui étudie en administration des affaires.

En d’autres mots, les deux joueurs n’accepteront pas n’importe quelle entente simplement pour appartenir à une équipe des ligues majeures, s’ils sont repêchés.

« Je suis revenu à Montréal et je m’amuse vraiment. J’ai hâte de voir ce que le repêchage va m’apporter. Si ce n’est pas ce que je veux, je vais continuer tout l’été avec les Orioles et travailler fort », a lancé Pelletier qui semble plus calme que son comparse dans ce processus, étant déjà passé par là.

Abraham ToroQu’à cela ne tienne, il ne s’agit pas de l’année de la dernière chance pour les deux produits du baseball québécois. Toro n’aura que 20 ans en décembre prochain alors que Pelletier a soufflé ses 20 bougies en février dernier.

« Les équipes essaient de repêcher des joueurs qui sont prêts pour les ligues mineures, a observé Marc-André Ronda. Ils (Toro et Pelletier) savent que le temps va venir. Est-ce que ça va être cette année? J’espère pour eux. Mais ce sont des joueurs dont on va entendre parler chaque année, qu’ils soient repêchés ou non cette semaine. »

Toro et Pelletier ne seront pas atterrés s’ils doivent retourner au Seminole State College pour une autre saison au mois d’août, eux qui ont apprécié leur première année aux États-Unis. Cette deuxième saison dans les rangs collégiaux leur ouvrirait des portes pour la NCAA, surtout s’ils accumulent les mêmes statistiques qu’en 2015-2016.

Au cours des prochains jours, les deux anciens du programme Sports-Études de l’école secondaire Édouard-Montpetit seront rivés à leur écran d’ordinateur ou de leur cellulaire, particulièrement samedi alors que se dérouleront les rondes 11 à 40 du repêchage.

Toro et Pelletier ne sont pas les seuls Québécois qui espèrent être repêchés cette année. L’arrêt-court Charles Leblanc est le plus bel espoir originaire de la Belle Province. Son nom pourrait être entendu lors des 10 premières rondes.

Le lanceur Mathieu Deneault-Gauthier, le troisième-but Raphaël Gladu, le lanceur William Sierra sont aussi des Québécois qui pourraient être sélectionnés.

Les artilleurs Iannick Rémillard et Guillaume Blanchette sont dans la même situation que Toro et Pelletier, soit d’être dans la catégorie des joueurs du Québec qui ont de petites chances d’être repêchés.