Pendant cinq ans, Lucian Bute a transporté les amateurs de boxe du Québec. De 2007 à 2012, alors qu’il portait fièrement la ceinture de champion du monde IBF des super-moyens, ses combats ont fait courir les foules, au Centre Bell de Montréal et également au Colisée Pepsi de Québec. Bute portait le flambeau de la boxe professionnelle comme d’autres, les Lucas, Ouellet, Bonnamie, Hilton, l’ont fait avant lui. Cette place est malheureusement libre et David Lemieux est prêt à s’en emparer. Mais pour porter le flambeau, Lemieux doit d’abord vaincre Hassan N’Dam samedi au Centre Bell, et ajouter à sa taille la ceinture IBF des poids moyens.

« On veut que David prenne la place de Lucian », confirme le gérant de Lemieux, Camille Estephan, qui s’empresse d’ajouter qu’il ne croit pas que la carrière de Bute soit terminée. « Depuis que Bute a perdu contre Froch et Pascal, il y a un vide, et David peut remplir ce vide. »

Si la place de Bute est « malheureusement » libre, ce n’est pas faute de talent. Malgré leurs succès, force est d’admettre que Jean Pascal et Adonis Stevenson n’ont pas réussi (encore du moins) à se tailler une grande place dans le cœur des amateurs. Est-ce une question de couleur de peau? Possible, mais si c’est le cas, c’est déplorable. Est-ce en raison de l'attitude de Jean? Du passé d'Adonis?

Artur Beterbiev, un blanc, est quant à lui encore peu connu, mais il ne parle pas français. Lemieux, lui, parle français et est blanc.

« David possède toutes les caractéristiques pour faire déplacer les foules », estime Jean Bédard, d’Interbox. C’est un peu pour cette raison que Golden Boy Promotions a mis Lemieux sous contrat en janvier dernier. Oscar De La Hoya voyait en Lemieux la même recette qui a fait son propre succès. Un look, un charisme et un boxeur spectaculaire.

Une faible foule

Pour l’instant le clan Lemieux se doit de jouer la carte de la modestie.

1) Les Québécois aiment ce trait de caractère.

2) La foule sera modeste samedi au Centre Bell. On parle d’une foule entre 6000 et 8000 spectateurs.

En comparaison, lorsque Bute est devenu champion du monde en octobre 2007 contre Alejandro Berrio, il y avait plus de 13 000 spectateurs au Centre Bell. Lorsque Lemieux a perdu contre Marco Antonio Rubio en avril 2011, c’était devant 4600 spectateurs au Centre Bell. Huit mois plus tard, 3000 personnes ont été témoins de l’autre défaite de Lemieux, contre Joachim Alcine, alors que la tête d’affiche du gala était Adonis Stevenson.

Personnellement, la foule pour le gala de samedi me déçoit étant donné l’importance de l’enjeu, la qualité de l’adversaire, la présence de nombreux Québécois en sous-carte et la participation d’Evenko qui appuie Eye of The Tiger Management et Golden Boy Promotions pour l’organisation du gala.

Les organisateurs étaient toutefois aux prises avec une date loin d’être idéale. « Nous aurions préféré présenter ce gala au mois de septembre, mais l’IBF nous pressait d’organiser ce combat au plus tard en juillet », explique monsieur Estephan.

« L’équipe de Camille fait du bon travail, mais c’est difficile d’organiser un gala en juin ou en juillet », constate Jean Bédard. « Quand Éric Lucas est devenu champion du monde contre Glenn Catley en juillet 2001, il y avait une foule décevante de 8000 spectateurs.  Mais à son combat suivant, en novembre, il y avait 13 000 spectateurs. »

La boxe en transformation

Si les amateurs de boxe peuvent être échaudés par des événements de boxe prometteurs qui deviennent des pétards mouillés, monsieur Bédard constate également que le monde de la boxe est en transformation. « Auparavant les recettes provenaient à 75 % de la vente de billets et le reste provenait des droits de télé. Maintenant ces proportions sont presque inversées. »

Les gens préfèrent maintenant se réunir à domicile, entre amis, et regarder le combat en haute définition sur de superbes téléviseurs géants. « Pour le combat entre Pascal et Kovalev, nous avons connu de bonnes ventes à la télé à la carte, mais nous étions loin du record généré par le combat entre Bute et Pascal », explique Jean Bédard. « Mais une chose est certaine, lors des grands événements, les gens vont toujours vouloir être sur place. »

Quelques notes :

- Le ring sera d’une grandeur de 20 x 20 pieds. À son dernier combat contre Curtis Stevens, le clan N’Dam avait noté des irrégularités à propos du ring, qui était de 16 x 16 avant le début du gala. Il a été légèrement agrandi pour correspondre aux normes, mais même dans la petite boîte de 17 x 17, N’Dam avait réussi à éviter juste assez les frappes de Stevens pour gagner son pari par décision unanime.

- Marlon B. Wright sera le troisième homme dans le ring. Les juges seront Benoit Roussel (Qc) ainsi qu’un juge du New Jersey et un juge français.

- Hassan N’Dam avait participé au tournoi olympique de 2004. Avec le recul, il est fascinant de constater le tableau dans la division des poids moyens

Ainsi, N’Dam, a battu Andy Lee au 1er tour. Lors de cette 1re ronde, Jean Pascal s’était incliné contre le Cubain Yordanis Despaigne, qui a vaincu Karoly Balzay au 2e tour, avant de plier bagage contre Andre Dirrell, médaillé de bronze. Quant à N’Dam, il a perdu en 3e ronde, contre l’éventuel champion olympique, Gaydarbek Gaydarbekov, de la Russie. Ce dernier, qui n’a pas poursuivi sa carrière professionnelle, a vaincu nul autre que Gennady Golovkin en finale.