Quand un vieil ami m'a parlé du hockeyeur Steve Bossé pour la première fois à la fin de l'année 2006 en me vantant les qualités de guerrier du dur à cuire des Chiefs de St-Jean de l'époque, ma réponse a été sans équivoque: « Pas intéressé ». Mon organisation d'arts martiaux mixtes (AMM) TKO venait de franchir un pas de géant en s'installant au Centre Bell et il n'était certainement pas question de transformer tout cela en cirque en y amenant un « goon » de hockey. Cet ami était acharné et est revenu à la charge à plusieurs reprises en m'invitant à aller assister à un match de hockey à St-Jean, mais ma réponse est demeurée négative.

Les choses allaient rondement pour mon organisation d'AMM et lors de mon deuxième événement au Centre Bell en février 2007, Bossé était présent pour assister au spectacle. C'est à cette occasion que je l'ai rencontré pour la première fois. J'ai serré la pince à un athlète charismatique et fort sympathique, mais surtout à quelqu'un qui avait dans le regard cette lueur que l'on retrouve seulement chez les athlètes d'exception. J'ai donc décidé de céder à la tentation quelques jours plus tard et je suis aller le voir en action au Colisée Isabelle-Brasseur de St-Jean sur Richelieu. Ce soir-là il affrontait celui qui était à ce moment là considéré comme le meilleur bagarreur de la ligue, Jon Mirasty.

Certaines personnes m'avaient même prévenu que je n'avais pas choisi le bon soir pour aller le voir en action puisqu'il risquait d'en manger « toute une » contre Mirasty. Quand je suis arrivé au Colisée une trentaine de minutes avant le match, il y a avait une ambiance électrique dans l'aréna - l'atmosphère était survoltée! Il y avait près de 3 000 personnes entassées dans l'aréna, la plupart avec des chandails no 29 de Steve Bossé, mais surtout une foule qui chantait en chœur son nom... Et le match n'était même pas commencé... Le promoteur en moi a vite réalisé l'effet que le sympathique québécois avait sur ses partisans.

Puis dès le début du match, les gants sont tombés et Steve Bossé a servi une leçon de boxe digne d'un scénario hollywoodien à Jon Mirasty. La foule était en délire et je venais de comprendre que je n'avais pas le choix : je devais lui donner une chance de se faire valoir en arts martiaux mixtes. Partout où Bossé allait dans la Ligue nord-américaine de hockey, le résultat était le même : l'aréna était plein à craquer - et l'émotion était toujours palpable chez ses chauds partisans qui l'aimaient d'amour. Avant de le mettre sous contrat, j'ai eu une rencontre avec Steve et je lui ai expliqué que si je le signais, je ne voulais pas le faire dans le cadre d'une spectacle de cirque mais seulement si il me prouvait son désir d'apprendre les rudiments des arts martiaux mixtes et d'être très sérieux dans sa démarche.

Les premiers entraîneurs que je lui ai attitré, Mark Colangelo, Stéphane Dubé et Yanick Bergeron, m'ont tous dit la même chose après seulement quelques séances d'entraînement : « Stéphane, ce gars-là est une éponge et il apprend très vite ». Sans compter sa force physique herculéenne et la puissance de sa main droite : j'était désormais convaincu à 100 % que le vieil ami avait raison...

Baptême de feu au Centre Bell

C'est finalement en juin 2007, après une préparation d'un peu plus de trois mois que Steve Bossé est monté dans l'octogone la première fois en plein Centre Bell. Les assistances qui étaient d'environ 5 000 spectateurs depuis notre arrivée au Centre Bell, est passée à plus de 7 000 spectateurs ce soir-là pour le baptême de feu du solide cogneur de St-Jean. Il n'a déçu personne avec une victoire expéditive par K.-O. face à un adversaire plus expérimenté que lui. C'est finalement cinq combats qu'il a effectués au Centre Bell avant que l'organisation TKO ne ferme ses portes. Cinq combats au cours desquels il a cumulé une fiche de 4-1-0 (3 K.-O.), tout en permettant à l'organisation d'établir un record historique le 14 décembre 2007 avec une foule de 8 904 spectateurs.

La route se poursuit

Depuis ses débuts en AMM en juin 2007, Bossé s'est forgé une fiche de 10 victoires et une seule défaite - incluant 8 victoires par K.-O. Toutes ces victoires auront fait taire ses nombreux dénigreurs puisque trois d'entre elles ont été obtenues face à des vétérans de l'UFC (Wes Sims, Marvin Eastman et Houston Alexander). À chaque percutant K.-O., la liste des adversaires qui préféraient éviter « Le Boss » a continué de s'allonger : sa force de frappe inspirait beaucoup de crainte dans la division des 205 livres.

Le premier appel du UFC est venu au printemps 2014 et il devait faire ses débuts dans l'organisation de ses rêves au Colisée Pepsi à Québec en avril de la même année. Quelques blessures à l'entraînement sont venues miner son moral et son enthousiasme et malgré une entente de quelques combats avec l'organisation américaine, Steve prend la difficile décision de se retirer des AMM - principalement en raison des nombreuses blessures. La décision prend tout le monde par surprise, mais elle est sans équivoque. Bossé prend son baluchon et quitte un sport qui le passionnait pourtant tellement.

Après avoir fait un retour au hockey avec les Prédateurs de Laval de la Ligue nord-américaine de hockey pour la saison 2014-2015, Bossé retrouve la piqûre et l'adrénaline des sports de combat et décide de reprendre l'entraînement en vue d'un combat de boxe professionnelle face à l'expérimenté Eric Barrak. C'est à ce moment que Steve m'a demandé qu'on revienne à la belle époque et que je m'occupe de sa carrière en devenant son promoteur. Il était clair que mon mandat avec Steve, outre lui signer dénicher des ententes corporatives et m'occuper de ses partenaires publicitaires, était de faire la promotion de ses futurs combats - et ça se limitait à la boxe et au kickboxing full contact, Steve n'avait plus aucun intérêt pour les AMM.

La flamme se rallume!

Alors que les négociations allaient bon train avec plusieurs commanditaires et annonceurs pour son éventuel combat de boxe, j'ai reçu il y a environ une semaine le plus surprenant des appels et c'est Steve Bossé d'un ton excité au bout du fil qui me dit: « As-tu entendu la nouvelle Stéphane? Rampage Jackson ne peut plus se battre au Centre Bell, je veux le remplacer ». J'ai été très surpris de cet appel et j'ai même fait répéter Steve trois fois. « Le Boss » venait de reprendre le goût à l'octogone et l'adversaire y était pour beaucoup : le Brésilien Fabio Maldonado (22-7-0, 14 K.-O. et 22-0-0, 21 K.-O. en boxe), un guerrier, spécialiste des combats debout qui tout comme Steve adore les combats enlevants où les coups pleuvent. L'opportunité ne pouvait être meilleure, compte tenu que Steve était déjà en pleine forme et en camp d'entraînement de boxe.

La négociation n'a pas été de tout repos puisque l'UFC avait un goût amer dans la bouche au sujet de la décision qu'avait pris Steve de se retirer du sport un an auparavant avant même d'avoir fait un seul combat avec eux, mais finalement une entente sur un nouveau contrat de quatre combats est survenue, qui permet aujourd'hui à Steve Bossé de finalement vivre son plus grand rêve et monter dans l'octogone de l'UFC et en bonus, chez lui au Centre Bell!

Pour ceux qui s'inquiètent de sa préparation, comme je mentionnais plus tôt, Steve était déjà en camp d'entraînement pour la boxe et il avait repris la forme depuis un bon bout de temps pour sa saison de hockey. On parle ici d'un athlète qui sera plus que prêt quand la cloche sonnera le 25 avril. Depuis la signature de l'entente il est retourné à l'entraînement spécifique aux AMM et le timing est rapidement revenu au niveau des aspects qui touchent la transition, la boxe thaïlandaise et les réactions au sol.

Fabio Maldonado a promis lors d'une entrevue accordée au site spécialisé MMAFighting.com qu'il y aurait beaucoup de sang samedi soir prochain au Centre Bell, et j'ose espérer qu'il réalise qu'il aura devant lui un vrai guerrier, quelqu'un qui sait autant que lui ce que c'est que d'aller à la guerre, mais surtout quelqu'un qui a la capacité, en un seul coup de poing, de lui faire perdre le son et l'image. Le Boss est de retour et une chose est certaine avec le puissant cogneur de St-Jean : les amateurs en auront pour leur argent et les fans du UFC risquent d'en redemander encore et encore! Steve Bossé a enfin la chance de prouver, et ce sur la plus grande scène mondiale en sports de combat, pourquoi j'ai toujours pensé qu'il était un athlète très spécial, un athlète d'exception.