Avec le début de la saison dans la NFL vient également le retour de mes chroniques sur le RDS.ca. Je suis très heureux de partager avec vous mon univers avec les Chiefs de Kansas City une fois de plus cette année. C’est la moindre des choses après tous les mots d’encouragements que j’ai reçus de votre part et je vous en remercie.

C’est incroyable comment tout défile à une vitesse hallucinante. On est passé du retour à Kansas City, au camp d’entraînement en peu de temps et maintenant, on monte déjà l’intensité d’un cran pour le début de la saison régulière. Nous sommes tous prêts pour ce coup d’envoi qui sera donné en plus contre un adversaire de division. Il s’agit déjà d’un match avec un enjeu de la plus haute importance contre un rival direct dans l’Ouest de l’Américaine.

Le camp d’entraînement est bien évidemment une période charnière pour nous. Coach Reid est reconnu pour nous soumettre à un camp très intense avec de longues séances d’entraînement en épaulette. C’est un défi en soi, d’autant plus que nous vivons isolés durant cette période dans des dortoirs à l’extérieur de Kansas City. Cette approche est préconisée afin de créer la chimie au sein de notre groupe et pour éliminer les distractions au maximum.

Ceux qui ont suivi les dernières semaines d’activités savent déjà que mon camp a été chamboulé. Je me suis entraîné lors des trois premières semaines et après le premier match préparatoire contre les Texans de Houston, j’ai encaissé un coup lors d’un entraînement qui m’a tenu à l’écart pour une semaine et demie. Il faut dire que c’était davantage par précaution que je me suis retrouvé sur le protocole en vue d’un retour au jeu, car on ne voulait pas prendre de chances lors du camp d’entraînement.

On s’est demandé si je devais revenir au jeu lors du dernier match préparatoire. Il faut savoir qu’habituellement, les partants ne jouent pas cette rencontre. Les entraîneurs ont jugé qu’avec mon ancienneté et ma connaissance du livre de jeux, il n’y avait pas de risque à prendre dans mon cas et ce n’était donc pas nécessaire que je sois sur le terrain.

En étant à l’écart du jeu pendant cette période, il est évident que je n’ai pas vécu le camp comme mes coéquipiers alors qu’ils ont pris part à plusieurs matchs avant le coup d’envoi officiel.

Je tiens à relativiser l’impact de mon absence en ce qui concerne ma préparation. En fait, je n’ai surtout pas eu la possibilité d’affronter une aussi grande diversité de joueurs que mes coéquipiers. Les matchs préparatoires servent à ça également. On est confronté à des styles différents chez les joueurs de ligne défensive, qui varient non seulement de match en match, mais au cours de la même partie également. On est par exemple confronté à de multiples variétés de pression. Cet élément nous permet de développer notre capacité à réagir selon certaines situations et de pouvoir apporter des ajustements en cours de route. C’est certain que je n’ai pas eu cette préparation cette année, mais les Chargers sont un adversaire qu’on affronte deux fois par saison, et les ayant déjà affronté six fois comme partant, je ne m’en fais pas trop de ce côté.

Si je ne suis pas inquiet en ce qui a trait à ma préparation, c’est en raison de mes coéquipiers avec qui j’ai travaillé au cours des dernières semaines. La qualité de notre ligne défensive avec Chris Jones, Allen Bailey, Xavier Williams, Justin Houston et Dee Ford fait en sorte qu’on s’entraide et chacun peut alors se surpasser. Coach Reid est très fort sur cette approche alors que nous parvenons à nous améliorer lors de nos confrontations. C'est avec ses défis à l’interne qu’on est en mesure de le faire. C’est certain que ça donne des entraînements à haute intensité, mais c’est ainsi qu’on peut progresser en tant qu’équipe.

Ça fait quand même un petit moment que je n’ai pas foulé le terrain dans le cadre d’un match et je dois vous avouer que je suis fébrile en vue du début de la saison.

Une attaque avec les bons outils

Ce qui me rend aussi enthousiaste également, c’est la composition de notre équipe. Je pense que nous avons beaucoup à prouver avec les changements qui sont survenus et on pense immédiatement au poste de quart avec la présence de Patrick Mahomes. Certains perçoivent le changement comme étant négatif, mais je ne suis pas de cet avis.

On a passé deux mois à s’entraîner en mai dernier ensemble et j’étais présent au début du camp également jusqu’au premier match préparatoire. Je sais donc comment évoluer avec Pat dans la pochette. Oui, il n’est qu’un joueur de deuxième année, mais plus le camp progressait, plus on le voyait prendre du galon et devenir encore un meilleur leader. On ne s’attend à rien de moins d’un quart partant, car au cours d’un match c’est lui qui doit énoncer les jeux et il a besoin d’avoir cette attitude de meneur lorsque la situation se corse. Pat le fait et on ne voit jamais d’hésitation ou d’insécurité dans ses yeux. C’est ce qui m’épate le plus venant de lui alors qu’il en sera à sa première année comme partant.

Mahomes n’est pas laissé à lui seul non plus comme il dispose de bons outils sous la main pour que l’on produise offensivement. On a qu’à penser à Tyreek Hill, Travis Kelce et Kareem Hunt qui sont de retour. À ce groupe, on ajoute maintenant le receveur Sammy Watkins qui sera une autre cible de choix pour notre quart. Nul doute que cette profondeur à l’attaque nous sera utile dès la première semaine devant les Chargers.

C’est une équipe très talentueuse et ils ont eux aussi les éléments pour marquer beaucoup de points sur le plan offensif. De notre côté à l’attaque, ce sera d’autant plus important de les mettre sous pression en inscrivant des points sur le plus de possessions possible.

Nous devrons trouver un moyen de neutraliser leurs excellents chasseurs de quart. Même avec l’absence de Joey Bosa, ils peuvent miser sur Melvin Ingram qui est l’un des meilleurs dans la Ligue. Il ne faut donc pas les sous-estimer. La meilleure façon de se protéger contre cette pression, c’est de se tenir à l’avant des chaînes. On utilise cette expression pour exprimer notre quête des troisièmes essais avec un court gain à franchir, donc un 3e et 2 verges, et non se retrouver constamment dans des situations de 3e et 7 où on devient plus prévisible comme attaque. L’unité défensive sait à ce moment que le jeu de passes est plus que probable.

Avec le début de la saison viennent les attentes de chacun envers celle-ci. Autant j’ai hâte à ce premier match de la saison, autant je ne veux pas me projeter trop loin dans l’avenir. Chaque semaine, on doit se concentrer à fond sur une seule équipe afin de l’étudier et connaître les tendances des différentes unités sur le bout de nos doigts. Je n’avais donc que les Chargers en tête pour un moment et c’est tout récemment que j’ai réalisé qui allait être notre adversaire lors de la deuxième semaine d’activités, les Steelers de Pittsburgh.

Ça peut paraître bizarre, de le dire ainsi, mais c’est la réalité du football je pense. J’ai la même réaction lorsque quelqu’un vient me dire par exemple qu’il viendra voir le match contre les Patriots; je ne sais pas quand ce match a lieu et c’est la vérité. On ne regarde pas trop loin devant nous et je pense que c’est la clé dans ce sport.

Évidemment, je ne vous cacherai pas que l’objectif en tant qu’équipe serait d’être champion de division pour une troisième année consécutive et ensuite prolonger notre parcours en éliminatoires, ce que nous avons eu des difficultés à accomplir dans les dernières années. Mais c’est encore très loin alors que toute l’équipe n’a que les Chargers en tête pour le moment.

Loin d'être mission accomplie

J’aimerais conclure cette première chronique en partageant avec vous ce que j’ai vécu après ma graduation. C’était vraiment touchant de voir que mes coéquipiers étaient derrière moi dans cette histoire.

Autant au départ  ils venaient me poser des questions sur la médecine et sur le fait que je venais de Montréal, autant quand je suis revenu à Kansas City au lendemain de ma graduation, qui a eu lieu le 29 mai, j’ai reçu de nombreuses félicitations de la part de mes coéquipiers. Même Coach Reid a dit un mot pour l’occasion. De recevoir tout ce support était évidemment grandement apprécié.

Certains d’entre vous ont peut-être visionné le reportage de TSN qui trace mon parcours aux études à McGill et mes premiers pas dans la NFL jusqu’à ma graduation. Dans ce reportage intitulé Improbable, on m’entend dire que mon souhait est de repousser les limites en ce qui concerne les caractéristiques d’un athlète étudiant. Même si je suis en effet maintenant diplômé et que j’évolue dans la NFL, vous ne m’entendrez pas dire « mission accomplie », car ce n’est qu’un début si vous voulez mon avis.

De dire que quelque chose est accompli à 28 ans, ça me paraît prématuré. Je ne veux pas m’asseoir sur mes lauriers et je souhaite être toujours prêt pour les nouveaux défis qui se présenteront à moi. Je désire m’améliorer au niveau académique ou au niveau du football. Il y a la fondation également qui aura plusieurs beaux projets.

Je n’aime pas la formulation de « mission accomplie » parce que mon idéal je le perfectionne et le repousse chaque jour.

Mes coéquipiers savent à quel point je suis dédié à la cause des Chiefs et que même si c’était un moment merveilleux que de recevoir mon diplôme, j’ai rapidement tourné la page afin de me concentrer uniquement sur le football. Depuis juin, je ne pense qu’au football à 100% afin d’être le meilleur possible.

*Propos recueillis par Maxime Tousignant