L’affaire Ray Rice a soulevé plusieurs pierres au cours des derniers jours et la NFL, à la suite de sa gestion maladroite de la crise, essuie une pluie torrentielle de blâmes.

Roger Goodell, au centre de la tempête, est devenu le symptôme d’un grave problème affligeant la plus importante ligue sportive en Amérique.

Mercredi, l’Organisation nationale pour les femmes (NOW, aux États-Unis) a demandé la tête de Goodell dans cette histoire en exigeant une démission de la part du commissaire de la NFL. Terry O’Neill, la présidente de l’organisation, cite en exemple le dossier de Ray Rice comme l’une des nombreuses démonstrations navrantes que la NFL, sous la gouverne de Goodell, ne souhaite pas établir une ligne de conduite ferme contre la violence conjugale.

Malgré les sanctions imposées à Rice (une suspension indéfinie en plus d’un moratoire imposé aux équipes qui souhaiteraient offrir un contrat au demi offensif), plusieurs membres des médias ont accusé la NFL et ses dirigeants d’avoir réagi sur le tard dans le dossier, entretenant du même coup une culture insidieuse protégeant aveuglément les membres de son organisation.

Dans le dossier, on doute notamment du fait que l’extrait vidéo diffusé par le site à potins TMZ n’ait pas été visionné par les instances de la NFL avant de suspendre initialement Ray Rice pour deux matchs seulement.

Confronté par CBS sur le sujet, Roger Goodell maintient qu’il ne croit pas que son poste soit en danger. Il souligne qu’une partie intrinsèque de son mandat est de faire face à la critique des médias et des propriétaires. Bon joueur, le commissaire reconnaît que la NFL a un problème de violence conjugale, car « un cas demeure un cas de trop ».

Si seulement ce n’était qu’un cas.

Au moment d’écrire ses lignes, deux joueurs actifs sur le circuit sont présentement devant les tribunaux pour des cas de violences conjugales. Greg Hardy, des Panthers de la Caroline, et Ray McDonald des 49ers de San Francisco. De plus, le propriétaire des Cowboys Jerry Jones fait l'objet d'une enquête pour un cas d’harcèlement sexuel. Dire sans broncher que la NFL souffre d’un problème en raison d’un cas isolé est l’articulation désolante d’une vieille mentalité que la ligue se doit d’éradiquer sans plus tarder.

Les histoires de violences conjugales ne datent pas d’hier dans la NFL. Pourtant, les sanctions préétablies sont récentes. La nouvelle politique instaurée par Goodell en réaction au dossier Ray Rice est, au mieux, dix ans en retard. Au pire, il s’agit d’une aberration que des sanctions contre les criminelles ne soient pas déjà bien établies sur le circuit dans ces cas.

Depuis plusieurs années, Goodell et son comité disciplinaire alimentent une chasse aux sorcières contre les athlètes utilisant des substances interdites par la ligue. Pour les stéroïdes et les drogues récréatives, même celles décriminalisées aux États-Unis, la NFL maintient le cap avec des suspensions exemplaires contre les récidivistes (voir Josh Gordon cette saison). Dans le cas des joueurs faisant face à des accusations criminelles, on pousse généralement les problèmes sous le tapis jusqu’à ce qu’une sentence soit prononcée par un tribunal, sauf quand les médias s’emparent de l’affaire. Les écarts d’Aaron Hernandez auront aussi permis de voir la gestion réactive du circuit au lieu d’une approche proactive souhaitée par les médias et plusieurs organismes américains.

Bref, Roger Goodell est présentement à la tête d’un « Boy’s Club » qui a le pouvoir de changer le paysage culturelle, mais qui démontre une volonté paresseuse.

La question s’impose : est-ce que Roger Goodell est devenu le cancer de la NFL? Si oui, doit-on le retirer de ses fonctions afin de rétablir l’image de la ligue et enrayer les sanctions à double vitesse qui sont actuellement mises en place?

La réponse à cette question n’est pas simple et elle dépasse largement les activités sportives de la NFL. La ligue sert d’exemple à des milliers de jeunes athlètes, du primaire jusqu’à l’université, et les joueurs sous contrat sont élevés au rang d’idole par une jeunesse se forgeant une identité. La responsabilité de la NFL et de Roger Goodell n’est donc pas seulement d’offrir le meilleur produit possible sur le terrain, mais aussi d’établir le meilleur exemple qui soit pour les générations futures.

Avec des réactions gauches comme celles dans le dossier Ray Rice, la NFL s’ouvre aux critiques fondées et envoie un message plutôt désolant.

En bannissant Ray Rice de la NFL, on ne règle rien. Roger Goodell applique plutôt un timide diachylon sur une plaie ouverte. Les journalistes voudront la vérité dans cette histoire et, dans la foulée, la tête de Goodell risque de rouler. Peut-être même pour le mieux.

Reste à savoir si les vieilles mentalités de la ligue peuvent être redressées ou si on fait plutôt face à une cause perdue d’avance.