Opportunité de développer le golf? Compétiteur qui va – tristement – contribuer à diluer le talent du golf dans différentes ligues, en route vers un produit moins intéressant? Difficile encore de déterminer quel impact aura l’arrivée de la toute nouvelle Série LIV pour l’univers du golf. Ce qu’on connaît toutefois, c’est que les membres de la Série LIV retrouveront déjà leurs anciens compatriotes de la PGA cette semaine, pour l’Omnium des États-Unis, disputé au Country Club de Brookline.

Si on sait d’entrée de jeu qu’ils ne seront assurément pas invités à souper par le commissaire de la PGA Jay Monahan, il sera tout de même intéressant de voir l’accueil que les partisans réserveront aux joueurs de la Série LIV jeudi, pour la première ronde. Les départs controversés de Dustin Johnson, Phil Mickelson, Bryson DeChambeau et Patrick Reed, entre autres, ont sans l’ombre d’un doute laissé un goût amer aux fervents amateurs de golf.

Des modèles pour certains et des sources d’inspiration pour d’autres qui tournent le dos à l’organisation qui les a propulsés au sommet, en participant à ce qui est de plus en plus décrit comme une tactique de sportswashing en échange de sommes monétaires astronomiques.

Alors que Johnson et Mickelson ont déjà été suspendus par la PGA, ce n’est pas encore le cas pour DeChambeau et Reed, qui le seront toutefois dès qu’ils fouleront le gazon pour un évènement de la Série LIV.

Jeudi, lorsque ces hommes s’amèneront sur le premier tertre de départ, les acclamations risquent de se faire rares, voire même inexistantes. Ce sera toutefois une première occasion pour les partisans de faire entendre leurs opinions sur ces décisions prises par des ténors du monde du golf. Après de nombreuses semaines à défendre leurs positions et leurs décisions, les nouvelles têtes d’affiche de la Série LIV sont sans doute prêtes à absorber tout type d’accueil de la part des partisans, quel qu’il soit.

Mickelson s’est toutefois montré très élogieux envers les partisans du Massachusetts lundi, dans un point de presse d’environ 25 minutes.

« Le Country club est l’un des cinq terrains fondateurs de la USGA. Les partisans ici sont parmi les meilleurs au monde. Ils offrent une atmosphère inégalée, tous sports confondus. »

Ceci dit, avouons-le : cette opinion de Lefty pourrait être bien différente dans quelques heures et c’est une éventualité à laquelle il est prêt à faire face.

« Les foules de Boston sont parmi les meilleures dans le sport. Ils m’ont donné beaucoup de soutien et je l’ai beaucoup apprécié au fil des années. Je crois que leur énergie crée une belle atmosphère. Que ce soit positif ou négatif à mon égard, je crois que ça va contribuer à une bonne atmosphère cette semaine », a ajouté Mickelson sur la possibilité qu’il soit hué dans les prochains jours.

« Si les partisans quittent [et ne me soutiennent plus], je vais respecter et comprendre leur opinion. Je comprends qu’ils ont de forts sentiments envers cette décision et je respecte ça. »

Une motivation pour « les membres fidèles » ?

Si jamais certains golfeurs ont encore soif de motivation, la présence de ceux qui incarnent  visiblement le rôle de « méchants revenants » devrait suffire pour alimenter leurs performances. Après tout, Monahan l’a dit dimanche : ceux qui restent sur le circuit de la PGA « sont des membres fidèles ». La dernière chose qu’ils voudront, c’est de voir les Johnson et Mickelson de ce monde connaître davantage de succès que ceux pour qui les principes sont plus importants que l’argent.

Le premier acte de cette motivation a été l’œuvre de Rory McIlroy la semaine dernière, lorsqu’il a triomphé à l’Omnium Canadien RBC. Il l’a lui-même affirmé après sa victoire : la simple idée de devancer le promoteur de la Série LIV Greg Norman avec une 21e victoire sur le circuit de la PGA rend ce sacre encore plus magique qu’il ne l’aurait été sans toute cette tourmente.

D’autres sont plus nuancés dans leurs opinions et dans leurs propos, même s’ils partagent un fort sentiment de tristesse et d’amertume. Dans l’œil de Justin Thomas, rien ne sert de s’emporter et de lancer des commentaires dont tout le monde pourrait se passer.

« Pour les gens à la maison qui pourraient dire que ‘Dustin Johnson est maintenant une mauvaise personne’, ce n’est pas juste. Je l’ai dit la semaine dernière, j’aurais espéré qu’il ne se joigne pas à la Série LIV et je suis un peu triste de son départ. Mais il faut aller de l’avant. »

Une fois de plus, Mickelson s’est montré vague, voire même évasif sur les relations et les interactions qui l’attendent cette semaine, avec des amis et d’anciens compatriotes.

« J’ai le plus grand respect pour les joueurs sur le circuit de la PGA. J’ai développé beaucoup d’amitiés depuis plusieurs décennies. Nous partageons beaucoup de souvenirs. Plusieurs joueurs sur la PGA sont des personnes que j’admire et que je respecte. Je les respecte s’ils sont en désaccord, mais en ce moment, c’était la meilleure décision. »

À sa 31e participation à l’Omnium des États-Unis, Mickelson aura l’occasion de compléter son grand chelem. C’est le seul tournoi majeur qui manque à son tableau de chasse pour qu’il devienne le 6e golfeur de l’histoire à réaliser l’exploit.

Une ombre au tableau

Bien rares sont les points sur lesquels peuvent s’entendre les acteurs de la PGA et de la Série LIV, mais tous pourront s’entendre sur ce qui suit : l’éclipse autour du conflit entre les deux ligues fait assurément ombrage à l’un des plus grands évènements de l’année dans l’univers du golf.

Fran Quinn s’est qualifié pour le tournoi à l’âge de 57 ans. Scottie Scheffler tente de poursuivre l’une des saisons les plus prolifiques des dernières années. Mickelson pourrait compléter son grand chelem. Et pourtant, les projecteurs de Brookline sont tournés vers cette dispute.

« C’est triste. C’est l’Omnium des États-Unis, c’est un endroit avec tellement d’histoire, et tout ce dont on semble parler, c’est de ça [la situation avec la Série LIV et la PGA]. C’est dommage. Ce n’est pas juste pour l’USGA, ce n’est pas juste pour l’Omnium des États-Unis et ce n’est pas juste pour les joueurs, mais c’est malheureusement où nous en sommes », s’est désolé Thomas.

Mais sagement, Thomas a sauté sur la controverse pour lancer un message aux générations futures... et peut-être une flèche à certains golfeurs qui ont pu quitter le circuit de la PGA pour les mauvaises raisons.

« Il faut aimer ce qu’on fait. Il n’y a pas de montant monétaire suffisamment élevé si on n’aime pas ce qu’on fait. Tu seras toujours malheureux, tu n’aimeras pas plus ce que tu fais. Même si tu es malheureux dans une plus grande maison ou une plus belle voiture, ça ne veut pas dire que ta vie sera meilleure. C’est important pour les joueurs juniors d’être passionnés par ce qu’ils font et de jouer pour les bonnes raisons, vouloir devenir meilleurs. »

Et à titre purement informatif, le gagnant du tournoi touchera une bourse de 2,25 M$ dimanche.