Il n'était même pas encore adolescent quand il a annoncé à ses parents qu'il deviendrait le meilleur golfeur au monde. Dans la petite ville d'Hollywood est Irlande du Nord, Rory McIlroy avait déjà ses rêves bien en mire. Depuis, il a trôné au sommet du classement mondial dès l'âge de 22 ans pour une période de 95 semaines. Vainqueur de quatre tournois majeur, sa carrière lui garantit déjà une place au Temple de la Renommée du golf.  Reste que sa quête d'excellence sera toujours incomplète sans une victoire au Tournoi des Maîtres.

En l'emportant au Augusta National cette semaine, le Nord-Irlandais deviendrait seulement le sixième golfeur de l'histoire à gagner les quatre tournois majeurs après Gene Sarazen, Ben Hogan, Gary Player, Jack Nicklaus et Tiger Woods.

Masters : l'année de Rory McIlroy?

« Je joindrais un groupe de légendes du sport dont je suis tombé en amour quand j'étais enfant, a avoué McIlroy au quotidien The Gardian en début de semaine. Ce serait incroyablement cool. »

Le Sud-Africain Gary Player avait 29 ans, tout comme Rory, quand il a complété le Grand Chelem en 1965. Pour lui, ce n'est qu'une question de temps avant que McIlroy s'impose au Tournoi des Maîtres.

« Rory est mon choix pour l'emporter depuis qu'il a la chance de compléter le Grand Chelem. C'est l'accomplissement le plus célébré dans notre sport. Il y a seulement cinq hommes dans ce club sélect. C'est vraiment le plus grand exploit au golf », a déclaré l'homme de 83 ans qui sera encore une fois aux côtés de Nicklaus pour procéder aux coups de départ qui lanceront officiellement l'action du tournoi jeudi matin.

Il reste amplement de temps à McIlroy pour compléter sa quête, mais nombreux sont ceux qui ont essayé de compléter le grand chelem sans jamais y arriver. Des légendes comme Arnold Palmer, Lee Trevino, Tom Watson et Phil Mickelson n'ont jamais été en mesure de remporter le titre majeur qui manquait à leur collection.

La quête du grand chelem peut vraiment peser lourd dans la psychologie d'un golfeur, mais plus les années passent, plus Rory semble aborder ce défi avec légèreté.

Si près, mais si loin

McIlroy participera à son 11e Tournoi des Maîtres. Le talentueux athlète est passé bien près à quelques reprises de remporter son premier Veston Vert, mais à chaque fois, il n'a pu terminer le travail.

La première fois, c'était en 2011. Meneur par quatre coups à l'amorce de la ronde finale, « Rors » s'est complètement écroulé. Alors âgé de 21 ans, les choses tournaient rondement pour McIlroy jusqu'à son arrivée sur le neuf de retour. Auteur d'un triple boguey sur le 10e trou, McIlroy a enchainé avec un boguey et un double boguey sur les deux trous suivants en route vers une ronde de 80, la pire de sa carrière à Augusta, pour finalement terminer à 10 coups du vainqueur Charl Schwartzel.

Une performance qui a fait grandir le jeune golfeur. Quelques mois plus tard, McIlroy s'imposait par huit coups à l'Omnium des États-Unis pour mettre la main sur son premier titre majeur. Les années ont passé et McIlroy a été en mesure de l'emporter dans deux autres tournois majeurs, au Championnat de la PGA en 2012 puis en 2014, ainsi qu' à l'Omnium Britannique en 2014. Les mémoires de sa performance de 2011 semblent continuer de le pourchasser quand il retourne sur le parcours d'Augusta.

« Je veux désespérément gagner le Tournoi des Maîtres, car je veux ressentir cette satisfaction après avoir travaillé si fort, après avoir autant perséveré et persisté. Huit ans après avoir eu la chance de l'emporter, je pourrais accomplir quelque chose que j'ai toujours échoué à réussir. », a candidement avoué McIlroy.

Même s'il venait de terminer dans le top-10 dans les quatre dernières éditions du tournoi (8e en 2014, 4e en 2015, 10e en 2016 et 8e en 2017), McIlroy n'a jamais vraiment passé proche de gagner avant l'année dernière.

Avant le tournoi 2018, McIlroy a avoué se mettre beaucoup trop de pressions sur les épaules pour effacer les mémoires de sa déconfiture. Avec une attitude beaucoup plus posée, Rory s'est redonné une chance de l'emporter sept ans plus tard.

S'élançant dans le dernier groupe aux côtés de Patrick Reed en ronde finale, on pensait que le moment était venu pour McIlroy. Même s'il accusait trois coups de retard sur le Texan, tout le monde voyait Rory faire une charge pour rejoindre Reed qui ne s'était jamais retrouvé dans une telle position auparavant.

Auteur d'une incroyable carte de 65 en troisième ronde, tout semblait en place pour la grande consécration, mais non. Son fer droit l'a complètement laissé tomber en ronde finale. Rory a joué neuf coups de plus que la veille pour finalement terminer en cinquième place.

« Dès le départ, j'ai senti que je ne l'avais pas et j'ai du me battre toute la ronde », avait avoué McIlroy après un autre rendez-vous manqué avec l'histoire.

Une autre performance décevante amplifiée par le fait d'assister au triomphe de Reed, qui a mis la main sur son premier titre majeur.

McIlroy n'est pas le premier golfeur avoir souvent passé si près du but. Certes, Augusta a couronné et glorifié un grand nombre de golfeurs, mais le parcours u golf a également brisé plusieurs coeurs. Parlez-en à Greg Norman, trois fois 2e et trois fois 3e, sans jamais pouvoir l'emporter, ou à Tom Weiskopf qui a terminé au 2e échelon à quatre reprises.

Rory a connu le succès partout et il est déjà reconnu comme l'un des grands. Il y a un seul endroit au monde ou McIlroy est mieux connu pour ses insuccès, et c'est à Augusta. Le temps est peut-être finalement venu de changer cette perception.

Le vent dans les voiles

Pourquoi cette année serait donc la bonne pour McIlroy? Pourquoi, après toutes les déceptions et les espoirs déçcus, Rory serait-il couronné cette année?

Grand favori des preneurs au livre avant l'amorce du tournoi, le jeu de McIlroy démontre tous les signes nécessaires pour qu'il puisse enfin aspirer à gagner le tournoi qui lui échappe encore, et encore.

Jamais dans sa carrière, le golfeur n'a connu un aussi bon début de saison. Sa décision de passer toute la saison en Amérique pour la première fois semble rapporter. En sept tournois depuis le début 2019, McIlroy n'a pas fait pire qu'une 9e place. Rory McIlroy

Il y a trois semaines, McIlroy s'est imposé au Championnat des joueurs, pour signer sa 15e victoire sur le circuit de la PGA. Dans ce qui est considéré comme le cinquième tournoi majeur, Rory a fait une démonstration de sa puissance, mais aussi de sa finesse. McIlroy vient au quatrième rang du circuit avec une moyenne de 312,4 verges, mais c'est surtout grâce à son jeu court qu'il connaît un si bon début de saison. Son 56e rang au niveau des coups gagnés grâce à des roulés n'a rien de tape à l'oeil, mais c'est de loin sa meilleure performance depuis plusieurs années.

En travaillant avec l'entraîneur Brad Faxon, McIlroy est devenu plus régulier avec son fer droit depuis le début de la campagne et s'il veut l'emporter cette semaine, il se devra de maîtriser les verts tortueux et ondulés du mythique parcours dessiné par Bobby Jones.

Une attitude différente

« Si je remporte le Tournoi des Maîtres, je ne me léverai pas le lundi matin comme une personne différente. Je serai le même Rory, avec les mêmes parents, la même femme et le même groupe de personnes autour de moi. Rien ne va changer. »

McIlroy ne se met plus le même genre de pression qu'à l'époque à l'approche du plus important rendez-vous de golf de la saison. Il y a quelques années, Rory se présentait à Augusta plus d'une semaine avant l'amorce du championnat. Il consacrait énormément de temps à l'analyse du parcours avec son équipe. Aujourd'hui, McIlroy se présente en Géorgie en début de semaine seulement. Après 10 visites, il connaît certainement mieux le parcours, mais il veut avant tout aborder le tournoi comme n'importe quel autre.

« Il y a quelques années, je vous aurais dit ''Je dois gagner le Masters. Je dois gagner le Veston Vert.'' Maintenant, c'est différent. '' Je veux le gagner. c'est un désir''. J'aimerais tellement gagner, mais si ça n'arrive pas, je suis ok avec ça. C'est ça la différence aujourd'hui. »Rory McIlroy

Avec les années, le jeune golfeur avec une pointe d'arrogance est devenu un homme beaucoup plus mature et réfléchi. Cette évolution rend McIlroy plus dangeureux que jamais sur le parcours. Ses opposants le savent très bien, bien que les prétendants soient nombreux et immensément talentueux, Rory est l'homme à battre cette semaine à Augusta. Tous les signes pointent de son côté. Qualité de son jeu, feuille de route, succès récent et facteur intimidant, tout semble favoriser le golfeur d'Hollywood en Irlande du Nord.

Cette semaine au Tournoi des Maîtres, Rory a encore une fois rendez-vous avec son destin. McIlroy ne sera pas en quête de gloire ou de popularité. Dimanche à Augusta, Rory McIlroy sera en quête d'immortalité.

Le veston vert, emblème de suprématie du golf