Déjà amèrement déçus de leur équipe et des joueurs vedettes qui sous-performent cette année, plusieurs partisans du Canadien déplorent « l’immobilisme » de Marc Bergevin dans le dernier sprint qui a mené à la fin de la période des transactions lundi.

 

Avec une transaction impopulaire comme celle qui a envoyé P.K. Subban à Nashville, avec le départ presque aussi impopulaire d’Alexander Radulov vers Dallas l’été dernier, avec la transaction Drouin-Sergachev qui est pour le moment tout à l’avantage de Tampa Bay, avec les erreurs d’évaluation et/ou de stratégie qui ont ouvert la voie au désastre que le Canadien connaît avec sa brigade défensive cette année – on ne reprochera quand même pas au DG la blessure qui prive le Canadien de Shea Weber... du moins je l’espère – Marc Bergevin s’est exposé aux critiques qu’il essuie depuis des mois.

 

Des critiques qui sont devenues de plus en plus véhémentes au cours des dernières semaines.

 

Des critiques qui cèdent aujourd’hui le pas à des appels pas même voilés à son congédiement.

 

Lundi, alors que plusieurs amateurs attendaient un grand chambardement de la formation, Bergevin n’a rien fait pour calmer la grogne populaire en résistant à la tentation de liquider des joueurs. Une fois le couperet tombé sur la période des transactions, Bergevin s’est retrouvé à nouveau cloué au pilori où il est lapidé depuis de critiques lancées par les partisans les plus polis, d’insultes et d’injures par les partisans les moins polis.

 

À moins de croire que Marc Bergevin devait échanger Carey Price, Shea Weber, Max Pacioretty et Alex Galchenyuk pour repartir sur des bases nouvelles l’an prochain, il est permis de se demander pourquoi les amateurs affichent autant haine à l’endroit de la stratégie du patron de leur club.

 

Il faut dire que cela aiderait un peu d’en savoir plus sur le plan précis. Car pour le moment, le Canadien assure être à la recherche de joueurs plus jeunes, plus rapides, plus talentueux et avec plus de caractères pour relancer l’équipe et reprendre une lente ascension vers le sommet du classement de la Ligue nationale. Et je ne parle pas encore ici de la coupe Stanley.

 

Ce plan, ai-je besoin de vous le souligner, est identique à celui des 30 autres équipes qui tiennent toutes à faire le plein de joueurs plus jeunes et meilleurs.

 

C’est la stratégie qu’entend utiliser Bergevin qu’on aimerait connaître davantage.

 

Bon! On sait déjà que les grands pans de cette stratégie passent et passeront toujours par le repêchage. Car il l’a dit. Il l’a même répété souvent.

 

Dans l’ombre des Rangers

 

Pendant que le Canadien maximisait la valeur de Tomas Plekanec et se contentait de petites transactions bien mineures considérant l’ampleur de la tâche associée à la relance, rénovation ou reconstruction du club, les Rangers de New York géraient d’une façon bien plus agressive leur décroissance.

 

Comme je l’ai établi dans la chronique qui fait le survol des dernières transactions, les Rangers et le Lightning ont comploté ensemble – tout cela était bien légal cela dit – et sortent tous les deux grandis et gagnants du sprint final de la saison 2017-2018.

 

Les succès de son homologue Jeff Gorton et de ses Rangers n’aident en rien Marc Bergevin. C’est clair.

 

Mais personnellement, je vous suggère que ce n’est pas lundi ou dans les jours qui ont précédé la fin de la période des transactions que Bergevin pouvait, comme les Rangers l’ont fait, donner un bon coup de barre pour raffermir les bases de son club.

 

Cette tâche a débuté mardi et elle s’intensifiera au fil des prochaines semaines pour atteindre les points culminants au repêchage de la fin du mois de juin et l’ouverture du marché des joueurs autonomes le 1er juillet.

 

Parce que Max Pacioretty était beaucoup moins alléchant que Ryan McDonagh – le Canadien n’a pas reçu d’offres officielles pour Pacioretty alors que seuls les Panthers de la Floride ont fait plus qu’ouvrir le capot, regarder la couleur du bolide et demander furtivement un prix approximatif – Bergevin ne pouvait se permettre de larguer son capitaine simplement pour faire plaisir aux fans en colère.

 

Les autres? Si vous croyez que le Canadien doit échanger Price, Weber et tous ses plus précieux atouts sur le plan hockey dès maintenant, c’est que le pessimisme vous a trop atteint et qu’il serait grand temps de prendre congé de quelques matchs.

 

Remarquez que l’exode des fans est déjà commencé. Il est d’ailleurs remarqué. Mais bon! Les partisans devraient quand même garder un œil sur la patinoire, parce que les jeunes Mete, Juulsen, Lindgren, Hudon, Lehkonen méritent qu’on les regarde aller et qu’on tente de faire des projections sur ce qu’ils pourront donner l’an prochain, dans deux ans, dans cinq ans.

 

Marc Bergevin a obtenu une très bonne valeur en retour de Tomas Plekanec. Il est d’ailleurs ironique que voir que le bon Tomas qui était l’objet de railleries en raison de la baisse de sa production combinée à la hausse de son salaire, est maintenant parti pour pas assez cher aux yeux de certains et n’aurait pas même dû partir aux yeux des autres. Curieux comme les sentiments changent vite à Montréal quand ils sont rattachés au Canadien et à ses joueurs.

 

Les autres transactions ne sont qu’accessoires.

 

Vrai que Marc Bergevin aurait pu utiliser l’espace qu’il avait sous le plafond pour offrir une oasis de millions à des équipes qui désiraient acquérir un joueur sans pouvoir assumer la totalité de son contrat.

 

Les Golden Knights l’ont fait avec succès à Las Vegas. Le Canadien l’aurait fait aussi si des clubs avaient eu besoin de cette zone tampon. Mais personne n’en a fait la demande.

 

Est-ce la faute au boss des opérations hockey?

 

Je sais : tout, ou presque, est de sa faute.

 

L’heure de la dernière chance

 

Bien que les appels au congédiement de Bergevin fusent à l’unisson autour, et à l’intérieur, du Centre Bell, le temps du jugement final sur ses compétences n’est pas encore arrivé. Du moins c’est mon opinion.

 

Mais il approche.

 

Pendant que Max Pacioretty, Jonathan Drouin et les autres vedettes – ou prétendues vedettes – doivent redonner espoirs aux partisans, Bergevin et ses associés doivent reprendre l’évaluation minutieuse de tous les joueurs de leur organisation.

 

Ils doivent identifier rapidement ceux autour de qui ils doivent bâtir, ceux dont ils devront se débarrasser même au prix de pertes sèches, ceux dont ils oseront se servir pour maximiser les chances de conclure une grosse transaction susceptible de survolter – positivement – la reconstruction du club.

 

Si c’est Pacioretty qui doit partir, qu’il parte. Mais le Canadien doit sortir gagnant, ou au moins kif kif, avec l’autre club dans le cadre de cette transaction.

 

Si c’est Galchenyuk : même chose. Si c’est Gallagher, Price, Weber : il faudra y penser. Car en ce moment, peut-on vraiment prétendre que le Canadien doit compter sur des intouchables?

 

C’est ce que je me dis aussi.

 

Le repêchage devra être solide. Bien sûr.

 

Et il faudra, une fois le marché des joueurs autonomes ouvert, que Bergevin utilise tous les millions $ disponibles sous le plafond avec plus de clairvoyance qu’il ne l’a fait l’été dernier dans le cadre de l’embauche de Karl Alzner. Il faudra aussi qu’il évite de trop attendre pour se retrouver à l’aube de la saison avec des millions disponibles, mais aucun joueur intéressant à qui les offrir.

 

Ah oui! Ce serait aussi une bonne idée de tout de suite dire aux gestionnaires du Canadien qu’ils ne feront pas d’argent sur le dos des partisans et des joueurs en multipliant de façon inutile et périlleuse des matchs préparatoires. Des matchs préparatoires qui ont miné le début de saison au lieu de bien le préparer. Pourquoi? Parce que Claude Julien a dû garder trop de joueurs qui n’allaient pas amorcer la saison avec le Grand Club en raison des parties qui se succédaient tous les soirs, ce qui a empêché le vrai club d’arriver en même temps à la ligne de départ.

 

Marc Bergevin ne pouvait faire de miracles lundi et dans les semaines qui ont précédé la date limite des transactions.

 

J’en demeure convaincu.

 

Mais à compter d’aujourd’hui, non seulement n’a-t-il plus droit à la moindre erreur, mais il est condamné à non seulement frappé un coup de circuit, mais à transformer ce coup de circuit en grand chelem pour qu’il puisse offrir à Claude Julien des matériaux de qualité pour reconstruire. Pour qu’il puisse offrir un brin d’optimisme à des partisans qui en ont grand besoin. Car pour le moment, ils n’en ont plus, mais alors là plus du tout…

 

Si Bergevin est passé dans la mitaine au cours de l’été et que les premières semaines de la prochaine saison sont à l’image des premières semaines de la saison qui s’achève?

 

Il aura pris ses dernières décisions importantes et devra être remplacé.

 

Mais j’insiste sur ce point, Bergevin devra être remis en question pas seulement s’il est passé dans la mitaine, mais aussi s’il se contente d’un petit simple à l’avant-champ ou d’un but sur balle.

 

À compter d’aujourd’hui, il doit frapper solidement et à tous les champs : que ce soit en matière d’évaluation de ses joueurs, d’évaluation des jeunes qui seront repêchés, de leur développement autant dans les mineures qu’avec le grand club, en matière de transactions et d’embauches de joueurs autonomes.

 

Peut-être aurait-il besoin de yeux nouveaux au sein de sa garde rapprochée afin de maximiser ses chances de frapper de grands coups.

 

Mais peu importe les décisions qu’il prendra et les moyens qu’il adoptera pour les prendre, Marc Bergevin n’a plus de marge d’erreur : il doit maintenant gagner.

 

Un point c’est tout.