Parce que son équipe affrontait des Sabres vraiment poreux en défensive, vendredi soir, à Buffalo, j’ai qualifié d’intéressante la décision de Dominique Ducharme de prendre la chance de regrouper Jonathan Drouin, Nick Suzuki et Cole Caufield au sein d’un même trio.

Contre une bonne équipe défensive, cette décision aurait été suicidaire tant ces trois joueurs sont vulnérables dès qu’ils perdent la rondelle. Mais contre Buffalo, Ducharme méritait le bénéfice du doute en marge de cette décision.

Après tout, c’est ça le travail d’un coach : ajuster sa formation en fonction des réalités de son club et de celles de ses adversaires.

Malgré les bonnes intentions qui ont mené à la composition de ce trio, les résultats ont été désastreux. Drouin a mal joué. Caufield a démontré plusieurs fois que c’est dans la Ligue américaine et non dans la LNH qu’il doit jouer. Et Suzuki, une fois encore, a été incapable de se démarquer sur une patinoire ennemie.

Pourquoi ne pas avoir démembré ce trio?

Pourquoi ne pas avoir espacé les présences au banc pour Caufield? Pour Drouin?

Pourquoi ne pas avoir profité du fait qu’il comptait sur sept défenseurs pour garder Chris Wideman, Sami Niku et Jeff Petry au banc plus souvent tant ils jouaient mal?

Pourquoi avoir attendu la troisième période, alors que l’issue du match était scellée pour donner de la glace à Mattias Norlinder qui a certainement plus d’avenir avec le Canadien que Wideman et Niku réunis?

Ducharme n’est pas responsable des revirements inacceptables et coûteux qui ont mené aux quatre buts des Sabres.

Mais à titre d’entraîneur-chef, il est le grand responsable de la gestion du temps de glace. Il est le grand responsable de l’imputabilité des 18 joueurs qu’il insère au sein de sa formation.

En acceptant que les erreurs commises à répétition depuis le début de la saison, des erreurs qui ont mené à plusieurs des 17 défaites que son équipe a encaissées, des erreurs qui ont des allures d’autodestruction comme il a lui-même qualifié la performance de son club vendredi à Buffalo, Ducharme se rend aussi coupable que ces joueurs.

Car en ne lançant pas un message clair à son équipe que les erreurs grossières, que les erreurs de paresse, que les abandons dont se rendent coupables les joueurs qui refusent de payer le prix pour racheter leurs bévues ou celles de leurs compagnons de trio, que les manques flagrants de conviction affichés par ses joueurs qui refusent d’encaisser des mises en échec en zone ennemie et qui refusent d’au moins compliquer le travail des adversaires en zone défensive entraîneront des réductions de temps d’utilisation, Ducharme laisse entendre qu’il est prêt à les accepter.

Et cela contribue à l’autodestruction qui mène tout droit à des revers en séries. À commencer par celui de vendredi encaissé à Buffalo.

Ducharme dirige une équipe décimée par les blessures. Tout le monde en convient.

Ducharme dirige une équipe qui manque de talent, de profondeur, de caractère et de leadership. Tout le monde en convient aussi.

Ducharme n’est donc pas responsable, ou l’unique responsable, du fait que le Canadien soit la pire équipe de la LNH sur la route (1-9-1). Qu’après 22 matchs, ses 12 points au classement représentent la pire récolte de son histoire 22 rencontres après le début d’une saison.

Mais à un moment donné, le coach devra serrer la vis pour asseoir son autorité et reprendre le contrôle de son équipe en sanctionnant les joueurs qui méritent et doivent être sanctionnés.

Un contrôle qui sera toujours remis en question quand une équipe s’autodétruit comme le Canadien s’est autodétruit vendredi en jouant plus mal encore qu’une très mauvaise équipe de hockey.

Je suis loin d’être convaincu qu’un changement d’entraîneur permettrait au Canadien de sortir du marasme dans lequel il s’enlise un peu plus chaque match. Mais en acceptant ce qui arrive à son équipe sans serrer la vis, ou du moins en donnant l’impression qu’il accepte ce qui arrive, Ducharme ne fait rien pour éviter qu’il soit sacrifié simplement parce qu’il sera toujours plus facile de congédier un coach que d’échanger 20 joueurs.

Cela dit, tant que le climat d’incertitude dans lequel le Canadien est plongé en raison du mutisme du propriétaire quant à l’avenir de son directeur général à la tête de l’équipe, il est difficile d’envisager que le Geoff Molson soit prêt à payer deux coachs à ne rien faire puisque Claude Julien écoule la dernière année du contrat lui garantissant un salaire annuel de 5 millions $.

Mais si le club devait continuer à perdre, à perdre souvent, à perdre beaucoup plus souvent qu’il ne gagne, un changement pourrait devenir inévitable.

Au-delà le résultat final, j’ai bien hâte de voir comment le Canadien réagira samedi, à Pittsburgh, contre des Penguins qui l’ont blanchi 6-0 il y a tout juste une semaine au Centre Bell.

Une autre séance d’autodestruction pourrait forcer la main de la haute direction. À moins que le propriétaire se dise que son équipe profitera, lundi, de la visite des Canucks de Vancouver, un autre club qui en arrache, pour rebondir et peut-être enfin trouver une façon de gagner deux matchs de suite.

Mais bon! Pour ça : il faudrait d’abord commencer par en gagner un...