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MONTRÉAL - C’était la fête au Centre Bell alors que les 2500 partisans répartis aux quatre coins de l’amphithéâtre se sont mis à chanter des Olé! Olé! Olé! pour saluer la victoire de 5-1 du Canadien aux dépens des Jets.

Ça faisait longtemps qu’on n’avait pas entendu des Olé! Olé! Olé! au Centre Bell. Longtemps qu’on n’avait pas vu des partisans drapés de bleu, de blanc et de rouge se lever pour danser et faire tourner des banderoles au-dessus de leurs têtes pour accompagner leur chant de victoire.

Et pas juste à cause de la Covid.

Peut-être que les fans ont chanté en 2017. Je ne m’en souviens plus. Mais comme le Canadien s’était fait éliminer en six parties, dès la première ronde, par les Rangers de New York et que c’est en prolongation – lors du deuxième match – que le Tricolore a signé sa seule victoire de la série devant ses partisans, les célébrations avaient été plus brèves que celles qui se sont étendues sur les cinq dernières minutes de la rencontre dimanche.

On a sûrement entendu des Olé! Olé! Olé! nourris en 2014, la dernière fois que le Canadien s’est rendu en finale de l’Est. Une finale qu’il avait perdue aux mains des Blue Shirts.

Mais pour être francs et bien qu’ils n’étaient que 2500 à chanter, les Olé! Olé! Olé! entonnés après que Joel Armia eut marqué dans un filet désert pour couronner son match sensationnel – deux buts, une passe, mais surtout du travail de grande qualité autant en attaque qu’en défensive – et sceller l’issue de la partie, et peut-être de la série, c’est tout droit en 2010, lors du printemps Halak, que je me suis retrouvé.

Parlant de finales d’Associations, le Canadien pourrait les atteindre dès lundi en complétant le balayage des Jets. Bon! Dans le cadre de la saison Covid qui se termine, on ne peut parler de finales d’Associations. Mais peu importe : il ne manque qu’un gain au Canadien pour se retrouver au sein du carré d’as de la LNH.

Un carré d’as où plusieurs les voyaient en janvier dernier.

Un carré d’as où plusieurs ne les voyaient plus en mai dernier alors qu’il a terminé la saison en patinant sur la bottine.

Un carré d’as où personne – ou si peu – ne les voyait il y a deux semaines alors qu’il tirait non seulement de l’arrière 1-3 dans la série l’opposant aux Maple Leafs de Toronto, mais qu’il semblait prêt à aller tout droit en vacances.

Avance insurmontable?

Est-ce que les Jets qui ressemblent en tous points au Canadien qui était en pleine déroute après les quatre premiers matchs de la première ronde pourraient faire taire les Olé! Olé! Olé! et même gâcher la fête?

Est-ce qu’ils pourraient imiter le Tricolore pour non seulement combler le fossé qui sépare les deux clubs, mais sortir gagnant de la série et accéder au carré d’as sous le nez des joueurs du Canadien médusés et de leurs partisans plus médusés encore?

Oui ils pourraient!

Après tout, les clichés du hockey insistent toujours sur le fait que la quatrième victoire est toujours la plus difficile à aller chercher en séries.

Je veux bien. Mais les chances que cela se produise sont minces. Bien minces. Très minces.

Premièrement : le niveau de jeu, la vitesse et la qualité d’exécution du Canadien sont tellement supérieurs à celles des Jets, que même le quatrième gain de la série semble plus à la portée du Tricolore qu’un premier gain pour Winnipeg.

Deuxièmement : les Jets n’affrontent pas Jack Campbell un gardien dont les statistiques étaient loin de représenter ses qualités réelles, mais bien Carey Price. Carey Price qui a maintenant stoppé 83 des 87 tirs obtenus par les Jets lors des trois premiers matchs. Pour ceux et celles qui se posent la question, ces 83 arrêts donnent à Price une efficacité de 95,4 %.

Le pire dans tout ça pour les Jets et leurs partisans, c’est que Price n’est pas aussi fumant qu’il l’a été en première ronde contre les Leafs. Il ne l’est pas parce qu’il n’a pas eu besoin de l’être en ce sens que les Jets sont loin d’être aussi menaçants que l’étaient les Leafs.

Price est aussi solide qu’il est intimidant devant son filet. Mais les Jets ne font rien pour lui rendre la vie dure. Ils sont prévisibles. Ils sont incapables de percer la défensive pour aller se camper devant le but et compliquer la vie de Price. Ou au moins tenter d’y arriver.

Si les Jets continuent de croire qu’ils déjoueront Price avec des tirs de loin, aussi puissants et précis soient-ils, qu’ils déjoueront Price bien qu’il puisse suivre la rondelle dès qu’elle quitte la lame de leurs bâtons, les Jets entendront des Olé! Olé! Olé! très tôt en troisième période lundi soir.

Sans Scheifele point de salut?

Troisièmement : je veux bien croire que l’absence de Mark Scheifele fait mal. On savait tous qu’elle ferait mal. Et c’est pour cette raison que Scheifele aurait dû y penser à deux fois avant de se ruer comme il l’a fait sur Jake Evans.

Mais les Jets ont d’autres solides attaquants. En fait, ils devraient avoir d’autres solides attaquants. Car pour le moment, on les cherche tant les Wheeler, Ehlers, Connor sont bien tranquilles jusqu’ici.

Oui Wheelers et Ehlers ont frappé la barre horizontale dimanche soir. Wheeler a même levé les bras au ciel croyant qu’il avait marqué. Mais comme l’a dit l’entraîneur-chef des Jets Paul Maurice après la rencontre : «Il faudra que la rondelle frappe l’intérieur des poteaux et dévie dans le filet, au lieu de frapper l’extérieur et de dévier dans les coins à un moment donné…»

Pour Connor c’est désolant.

Pour Pierre-Luc Dubois, c’est plus désolant encore. Non seulement est-il incapable de marquer – il est rendu à 23 matchs consécutifs sans but – mais il est visiblement frustré par cette disette au point de perdre sa concentration sur la glace et surtout de perdre les pédales comme il l’a démontré en troisième période en assénant un double-échec dont la seule conséquence a été de passer deux minutes au cachot et de s’attirer les huées des partisans du Canadien.

Paul Stastny est revenu au sein de la formation après avoir raté les deux premiers matchs, mais ça n’a pas donné grand-chose. En fait, cela a surtout donné une passe à Joel Armia pour lui offrir la longue poussée au terme de laquelle il a marqué en désavantage numérique.

À la ligne bleue, les Jets sont encore plus vulnérables que je le croyais. Et je les considérais déjà terriblement vulnérables.

L’équilibre offensif du Canadien

Quatrièmement : le Canadien est un club beaucoup plus équilibré que les Leafs ne l’étaient en première ronde. Ce qui compliquera la tâche déjà très compliquée qui attend les Jets.

L’absence de John Tavares et l’entêtement de l’entraîneur-chef Sheldon Keefe de garder Auston Matthews et Mitch Marner au sein d’un même trio et de ne pas même tenter de soustraire ce trio des griffes de Phillip Danault et de ses ailiers ont permis au Canadien de contenir les gros canons des Leafs. Sans oublier les arrêts de Carey Price bien sûr...

Face au Canadien, la défensive déjà poreuse des Jets doit composer avec quatre trios qui obtiennent pratiquement le même temps d’utilisation et qui sont tous capables de contribuer offensivement.

On en a eu une autre preuve dimanche alors que le trio de l’âge d’or – Eric Staal flanqué de Corey Perry et Joel Armia – a donné le ton au match en donnant les devants au Canadien dès les cinq premières minutes de la rencontre.

Artturi Lehkonen a travaillé comme un forçat à chacune de ses présences sur la glace. Il a tiré 12 fois en direction de la cage des Jets, sept ont atteint la cible, un a déjoué Hellebuyck.

Danault a une fois encore été exceptionnel s’illustrant dans tous les aspects du jeu. Non il n’a pas marqué : mais c’est un revirement en zone neutre qu’il a poussé les Jets à commettre qui a amorcé la séquence complétée par le but de Perry. C’est lui qui a amorcé la séquence qui a conduit au but de Lehkonen. Il a aussi obtenu une bonne occasion. Sans oublier qu’il a disputé 31 des 66 mises jeu déposées dimanche et qu’il en a gagné 17 sur le lot.

Dans la foulée des vétérans qui ont donné le ton, les jeunes continuent d’impressionner. Cole Caufield n’a pas marqué sur les six tirs qu’il a cadrés. Mais s’il maintient le rythme – 11 tirs à ses deux derniers matchs – son premier but en séries viendra bien assez vite. Et d’autres suivront.

Loin de se décourager, Caufield est une véritable boule d’énergie sur la patinoire. Il est partout. Mais il est en plein contrôle en tout temps. Et il a une fois encore démontré dimanche qu’il peut faire plus que marquer des buts servant à Nick Suzuki une passe parfaite dans l’enclave dont le jeune centre a profité pour marquer son quatrième des séries et donner les devants 4-1 à son club.

Est-ce que j’ai parlé de Kotkaniemi? Pas encore? KK a disputé un bon match, mais à ses côtés Josh Anderson et Paul Byron en ont disputé un meilleur encore. Anderson frappait tous les Jets qui entraient dans son champ de vision en première. Il a encore affiché beaucoup d’intensité. Je sais que des partisans attendent des buts d’Anderson, mais le gars donne au Canadien d’autres ingrédients qui sont tout aussi nécessaires pour s’imposer en séries.

Surtout quand des coéquipiers marquent les buts nécessaires pour gagner. Et avec Carey Price en état de grâce, le Canadien n’a pas besoin de beaucoup de buts pour gagner.

Chiarot, Edmundson et Weber tiennent bon

Cinquièmement : les défenseurs du Canadien tiennent bon. L’âge de Weber, sa perte de vitesse et le fait que ni Chiarot ni Edmundson ne sont beaucoup plus rapides ne paraissent pas jusqu’ici dans la série contre les Jets.

De fait, les trois gros arrières du Canadien ont nettement le dessus sur les attaquants des Jets.

Déjà que le top-4 du Tricolore était surutilisé depuis le début de la remontée aux dépens des Leafs, voilà que Jeff Petry a dû quitter le match après que son auriculaire de la main droite se soit coincé dans une petite ouverture dans la baie vitrée pour permettre la prise de photos.

Une malchance vous dites? Mettez-en!

Est-ce que Petry pourra reprendre sa place alors que les deux clubs se croiseront à nouveau dès lundi?

Le Canadien n’a donné aucune indication dans un sens comme dans l’autre.

Mais si Petry doit rater le match, Jon Merrill est disponible sans oublier Alexander Romanov qui doit lui aussi avoir hâte de reprendre sa place à la ligne bleue.

On verra.

Mais peu importe qui remplacera Petry s’il doit être remplacé, Shea Weber, Ben Chiarot et Joel Edmundson seront surutilisés encore lundi.

Mais bon! Si le Canadien gagne et élimine les Jets en quatre, ils auront quelques jours pour bien se reposer.

Si le gagne lundi et élimine les Jets, cela prolongera à sept la série de victoires consécutives sur laquelle le Canadien surfe en ce moment.

La dernière fois qu’un club a signé six gains consécutifs en séries dans la LNH, le bon Jacques Demers était derrière le banc du Tricolore qui avait gagné 11 fois de suite en route vers sa 24e et dernière conquête de la coupe Stanley en 1993.

Entre les lignes

Adam Lowry a été le seul Jet à déjouer Carey Price dimanche. Il a inscrit son deuxième des séries sur réception d’une passe parfaite de Mathieu Perreault en fin de période médiane. Il s’était écoulé 99 min 33 s entre le but de Lowry et celui de Kyle Connor marqué en fin de troisième période lors du premier match.

Lowry a donc privé Carey Price de deux jeux blancs consécutifs. Il faut dire que les Jets n’ont jamais été blanchis deux matchs de suite depuis leur retour à Winnipeg en 20112012.

Adam Lowry a démontré être bien au fait des hauts et des bas de Carey Price l’hiver dernier. «À un moment donné cet hiver, les amateurs voulaient chasser Carey Price de Montréal parce qu’il avait perdu sa confiance. Il l’a maintenant retrouvée et a repris sa place parmi les meilleurs gardiens de la LNH. Il faut trouver une façon de miner sa confiance, car pour le moment, il est très solide devant son but.»

Capitaine des Jets, Blake Wheeler a assuré que le fait que les deux clubs se croisaient à nouveau dès lundi était une bonne nouvelle pour les Jets. «Nous n’aurons pas à ruminer cette défaite pendant une longue journée d’isolement à l’hôtel. On replonge tout de suite dans l’action sachant très bien qu’on n’a d’autre choix que de gagner pour prolonger la saison.»

Blake Wheeler s’est aussi fait rappeler qu’il avait vécu la remontée de quatre victoires de suite des Flyers aux dépens des Bruins de Boston au printemps 2010. Les Flyers avaient aussi comblé un recul de 0-3 en troisième période pour croiser le Canadien en finale de l’association Est. «Ma journée allait déjà assez mal qu’il faut me remettre ce souvenir sous le nez», que le capitaine des Jets a lancé en début de réponse. «Les séries sont une affaire de momentum. On doit marquer le premier but demain soir pour déstabiliser le Canadien et gagner un premier match. Ensuite, on verra. Il faut faire tourner le momentum en notre faveur.»

Le quatrième match de la série CanadienJets devrait débuter peu après 20 h lundi…