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MONTRÉAL - Lorsque Nick Suzuki a déjoué Jack Campbell au terme de l’échappée que lui et Cole Caufield ont reçue en cadeau d’Alex Galchenyuk dès la deuxième minute de la prolongation, leurs coéquipiers et bon nombre de partisans se sont levés d’un trait pour célébrer cette victoire qui ravive l’espoir.

 

Car oui! Il y a toujours de l’espoir pour le Tricolore qui, samedi, devant 2500 partisans, aura l’occasion de pousser la série qui les oppose aux Maple Leafs à la limite des sept parties.

 

Mais l’espoir créé chez les uns par la complicité Caufield-Suzuki n’a d’égal que le désespoir qu’elle a soulevé chez les autres.

 

Et je ne fais pas référence ici aux joueurs des Leafs et à leurs partisans.

 

Loin de lever les bras au ciel aussi vite que Suzuki et Caufield l’ont fait 59 secondes après le début de la période de prolongation, plusieurs partisans du Canadien ont frappé du poing la table qui se trouvait devant eux.
 

Déçus, découragés, désespérés même de voir que leur club favori venait de laisser filer une avance de 3-0 dans le cinquième match d’une série au cours de laquelle le Canadien a plus souvent qu’autrement été dominé par ses rivaux, ces partisans en étaient venus à souhaiter une défaite afin de mousser des changements qu’ils jugeaient nécessaires.

 

Pas besoin d’avoir été bien actifs sur les médias sociaux ou d’avoir prêté une oreille même distraite aux tribunes téléphoniques pour avoir compris que de grands pans d’amateurs – et plusieurs collègues et observateurs – réclamaient depuis deux jours un grand ménage à la tête de l’organisation.

 

De Marc Bergevin à Dominique Ducharme, en passant par Trevor Timmins et tous ses recruteurs amateurs, sans oublier les dépisteurs professionnels, les soigneurs, préparateurs physiques l’état-major au grand complet y passait.

 

Même l’avenir du propriétaire Geoff Molson était remis en cause en raison de la patience frisant la naïveté qu’il affiche depuis des années à l’endroit de son directeur général.

 

Ces partisans qui souhaitaient une élimination expéditive pour célébrer une valse de congédiements à défaut d’un défilé de la coupe Stanley devront donc attendre... au moins jusqu’à samedi.

 

Car si le Canadien est éliminé samedi les appels des derniers jours reprendront de plus belle. De fait, la victoire en prolongation de jeudi ne les calmera peut-être pas tant que ça.

 

Mais si le Canadien gagne samedi pour pousser la série à la limite des sept matchs?

 

Mais si, après avoir perdu trois matchs de suite pour se retrouver face à l’élimination, le Canadien complétait sa remontée pour passer en deuxième ronde et prolonger le calvaire des Maple Leafs en séries?

 

Est-ce que tous ceux et celles – et ils sont nombreux – qui veulent la tête des «décideurs» à la tête de Tricolore maintiendront leurs appels aux changements ou seront forcés au silence jusqu’à la prochaine série de trois revers consécutifs du club?

 

On le saura bien assez vite.

 

Caufield confirme sa place
 

Après avoir vu le Canadien laisser filer son avance de 3-0, je ne donnais pas cher de sa peau en prolongation.

 

Il est important ici de souligner que le Canadien n’avait pas encore perdu cette saison dans les cinq matchs au cours desquels il s’était offert des avances de 3-0.

 

Le Canadien a même été parfait dans les 11 matchs au cours desquels il s’est offert à un moment ou un autre des avances de trois buts.

 

Mais quand même : avec Auston Matthews encore bien discret, avec Mitchell Marner qui n’a toujours pas déjoué Carey Price, avec le capitaine John Tavares assis dans les gradins comme source supplémentaire de motivation, avec le momentum qui soufflait en poupe du côté des Leafs et en proue du côté du Canadien, je me disais que la saison du Tricolore tirait vraiment à sa fin.

 

Le hockey étant un jeu d’erreurs, le Canadien a rapidement obtenu la chance de renverser toutes les probabilités. Alex Galchenyuk, héros offensif du match de mardi avec un but et deux passes, héros encore jeudi alors qu’il a préparé le but qui a permis aux Leafs de compléter leur remontée de trois buts, a effectué une passe désastreuse à la ligne bleue du Canadien. Le nez dans la baie vitrée, Galchenyuk a remis derrière lui croyant que la rondelle surprendrait tout le monde chez le Canadien et aboutirait sur la lame du bâton d’un de ses coéquipiers.

 

C’est toutefois Cole Caufield qui en a hérité. Avec les conséquences qu’on connaît.

 

Écarté de la formation lors des deux premiers matchs, Caufield était sur la patinoire en prolongation dans un match que le Canadien ne pouvait se permettre de perdre.

 

Tout un revirement de situation on en conviendra.

 

Et c’est ce revirement qui a vraiment ouvert la porte à la victoire. Car c’est bien beau recevoir une rondelle en cadeau en cadeau de l’adversaire, mais encore faut-il savoir quoi faire avec.

 

En voyant Suzuki et Caufield partir en échappée, le Canadien avait deux joueurs vraiment susceptibles de pouvoir en profiter. Je vous dirais que je croyais davantage que Caufield marquerait sur une passe de Suzuki plutôt que le contraire, mais quand même. Ce but a permis au Canadien de voir un autre signe d’un avenir meilleur pour leurs favoris. Du moins en attaque.

 

Caufield confirme vraiment sa place au sein de la formation. Pas juste en raison du but gagnant qu’il a contribué à orchestrer. Pas juste par sa vitesse et la qualité de ses tirs. Mais par l’ensemble de son jeu.

 

Jeudi, Caufield a été associé à deux des 12 revirements imputés au Canadien. Les Leafs en ont commis 15 aux yeux des officiels mineurs. Peut-être plus.

 

Les revirements arrivent. C’est ce que tu apprends pour éviter de les répéter qui compte. La manière dont tu tentes de te racheter après les avoir commis compte plus encore. Et à ce titre, Caufield démontre qu’il a ce qu’il faut pour ne pas se laisser abattre par une erreur ici et une autre là. Et ça, c’est crucial, c’est essentiel quand tu tentes de survivre dans la LNH.

 

Mais plus encore, on a vu Caufield gagner des batailles pour des rondelles libres dans les coins de patinoire. Bien qu’il soit haut comme trois pommes, qu’il soit tout petit en poids et en expérience, on a vu Caufield initier un contact avec un adversaire plus gros histoire de le déstabiliser un brin. Il a réussi ça avant d’arriver dans le coin. Une maudite bonne idée, car une fois dans le coin, il aurait été complètement écrasé s’il avait tenté la même manœuvre. Un jeu comme celui-là, aussi banal soit-il, démontre que Caufield comprend ce qu’il doit faire pour survivre dans la grande ligue. Il ne gagnera pas toutes ses batailles un contre un dans les coins. Il ne sera jamais un grand joueur défensif. Mais dans la victoire d’hier, il a été assez solide dans les aspects moins forts de son jeu pour obtenir le feu vert 32 secondes après le début de la prolongation.

 

Et c’est à ce moment qu’il a pu mettre son talent au service de Nick Suzuki. Au service de son équipe.

 

Enfin un club affamé

 

Le Canadien a joué avec le feu en laissant filer l’avance de 3-0 qu’il s’était donnée lors des 25 premières minutes de jeu.

 

Mais ça lui a au moins permis d’égaler lors du cinquième match son total de buts enfilés lors des quatre premières rencontres.

 

Comment il s’y est pris?

 

En affichant de la conviction. En jouant du hockey désespéré. Vous direz, avec raison, qu’avec un pied sur la patinoire et l’autre en vacances, il était normal d’être désespéré. Mais quand même.

 

Le Canadien s’est donné la peine de vraiment mettre de la pression sur une défensive à qui il avait rendu la vie facile lors des premiers matchs de la série. Sur un gardien à qui il avait rendu la vie bien trop facile depuis le début de la série.

 

En obligeant Jack Campbell à bouger sur sa gauche et sa droite, le Canadien a exposé les lacunes de ce gardien qui est bien moins bon que sa fiche le laisse croire. Un gardien qui devient vite vulnérable quand il y a de l’action autour de lui. Un gardien qui met ses défenseurs dans le pétrin en accordant des retours. Mais ces retours, le Canadien n’avait jamais pu en profiter avant le match de jeudi, car il ne prenait pas les moyens pour aller les récupérer, laissant les défenseurs des Leafs en hériter.

 

Ce dynamisme qui faisait tant défaut lors des trois derniers matchs a changé le cours de la cinquième partie.

 

Important ici de souligner que Joel Armia, avec deux buts, et ses compagnons du quatrième trio Eric Staal et Corey Perry ont été particulièrement efficaces lors de ce match.

 

Important aussi de souligner la combativité affichée par Jesperi Kotkaniemi qui a marqué en se bataillant seul contre trois joueurs des Leafs devant la cage défendue par Jack Campbell.

 

Les «gros canons» du Canadien n’ont pas atteint la cible, mais ils ont été plus actifs que lors des derniers matchs.

 

Tout ça est bien beau. Mais il serait malhonnête de passer sous silence le travail une fois encore sensationnel de Carey Price devant la cage du Canadien.

 

Price a stoppé une, deux, trois échappées de Leafs. Il a réalisé quelques très gros arrêts sur des déplacements difficiles pour donner la chance à son équipe de garder espoir.

 

Et comme il le fait quand il est en plein contrôle, quand il est en pleine confiance, quand il est intimidant pour ses adversaires et ô combien rassurant pour ses coéquipiers, Price a fait tout ça avec une facilité déconcertante devant son but.

 

À Toronto jeudi, Nick Suzuki, Jake Muzzin et Joel Armia ont récolté les trois étoiles de la rencontre. Carey Price a été meilleur que ces trois joueurs réunis.

 

S’il maintient le niveau de performance qu’il affiche depuis le début de la série et que ses coéquipiers affichent le même niveau d’intensité qu’ils affichaient jeudi soir à Toronto, oui le Canadien pourrait gagner samedi et qui sait? Peut-être même passer en deuxième ronde.

 

Au grand bonheur des uns, au grand malheur des autres. Ou de certains autres...

 

Entre les lignes

  • Fustigé de critiques pour avoir décidé d’insérer Erik Gustafsson en relève à Brett Kulak plutôt de de permettre à Alexander Romanov de disputer un premier match à la ligne bleue, Dominique Ducharme a été récompensé par le différentiel de plus2 obtenu par le défenseur suédois qui a effectué 15 présences totalisant 10 min 16 s de temps d’utilisation...
     
  • Sheldon Keefe a décidé de réintégrer le jeune défenseur Rasmus Sandin après l’avoir écarté lors du match de mardi. Sandin a été responsable de deux gaffes qui ont mené à des buts du Canadien. Il sera intéressant de voir si Keefe ramènera la recrue lors du match de samedi où s’il lui préférera à nouveau Travis Dermott...
     
  • Phillip Danault s’est encore dressé, avec succès, devant le gros trio des Leafs jeudi. Il s’est aussi signalé aux cercles des mises en jeu en gagnant 19 des 29 mises en jeu qu’il a disputées. Danault a non seulement gagné plus de mises en jeu que tous ses coéquipiers réunis (11), mais il a disputé 29 des 52 mises en jeu déposées au cours du match…
     
  • Jeff Petry connaît une série difficile face aux Leafs comme le confirme l’absence de point à sa fiche. Petry s’est toutefois imposé avec six mises en échec. Petry et Joel Edmundson ont d’ailleurs distribué 12 des 44 mises en échec assénées par le Canadien jeudi à Toronto...
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  • « On sera correct! » C’est avec cette courte réponse que le vétéran défenseur Jake Muzzin a répliqué aux prétentions des collègues de Toronto qui lui demandaient s’il serait difficile de se relever de la défaite en prolongation que lui et ses coéquipiers venaient d’encaisser…