Debout dans le fond du vestiaire du Canadien, Nikita Scherbak n’a pas hésité une seconde lorsque je lui ai demandé, après le match de dimanche, si le temps était venu de remplacer une fois pour toutes son sous-vêtement détrempé arborant un logo du Rocket sur sa poitrine pour un autre tout neuf orné du logo du Canadien : « C’est mon objectif et je vais prendre tous les moyens pour l’atteindre ».

 

Il est trop tôt pour dire si Scherbak pourra dorénavant mettre le cap sur Laval simplement pour aller voir jouer ses « chums » du Rocket plutôt que pour les aider à faire gagner le club-école, mais disons qu’avec les performances offertes en fin de semaine, le jeune russe de 22 ans offre enfin du hockey intéressant.

 

Et cette conclusion dépasse de beaucoup les deux passes obtenues au cours du week-end : l’une aux dépens des Ducks d’Anaheim samedi, l’autre contre les Sénateurs d’Ottawa dimanche.

 

Premier choix du Canadien en 2014 (26e sélection), Scherbak a beaucoup mieux joué dimanche que samedi. Il a joué beaucoup plus également, alors que son temps d’utilisation est passé de 10 :41 à 15 :38. Mieux encore, Scherbak qui avait raté la cible trois fois samedi a cadré le lendemain cinq des six rondelles qu’il a tirées en direction de la cage défendue par Mike Condon.

 

Responsable d’un revirement coûteux dès sa première présence, revirement à la ligne bleue défensive, qui a obligé Antti Niemi à réaliser un des huit arrêts qu’il a multipliés en début de rencontre pour empêcher les Ducks de s’offrir une avance rapide, Scherbak semblait beaucoup plus à l’aise contre les Sénateurs.

 

« J’étais beaucoup moins nerveux que samedi. J’ai beaucoup parlé avec Alex (Galchenyuk) après le match samedi et il m’a répété que je devais être plus patient avec la rondelle. Que même si les choses vont beaucoup plus vite dans la LNH, j’ai quand même plus de temps que je peux le croire pour prendre de meilleures décisions, pour réaliser de meilleures passes, décocher de meilleurs tirs », expliquait celui qui espère que son deuxième rappel de la saison, son troisième depuis qu’il a été repêché par le Tricolore, sera le bon.

 

« Il offre des signes encourageants », a indiqué Claude Julien après la victoire aux dépens des Sénateurs. Lorsqu’on lui a demandé si les deux passes récoltées par Scherbak laissaient entendre que le Canadien a attendu trop longtemps avant de rappeler le jeune homme, l’entraîneur-chef du Tricolore s’est rabattu sur les blessures : « La blessure a retardé le processus dans son cas. On peut débattre du meilleur moment pour rappeler un jeune, mais si tu le rappelles trop tôt et qu’il n’est pas prêt à t’offrir le meilleur de ses performances, tu n’es pas en mesure d’effectuer une bonne évaluation de son travail. »

 

Nikita Scherbak, est-il besoin de le rappeler, a été opéré au genou après qu’il se soit blessé le 26 octobre dernier lors de la visite des Kings à Montréal. Une fois remis des contrecoups de l’intervention, il a repris le boulot avec le Rocket. En 24 matchs disputés à Laval cette saison, l’attaquant russe a marqué sept buts et amassé 30 points.

 

Savoir profiter des attaques massives

 

Scherbak a été complice de deux des cinq buts marqués lors d’attaques massives par le Canadien en fin de semaine. Et c’est loin d’être un accident de parcours. Car des 30 points obtenus avec le club-école en 24 matchs, Scherbak a enfilé cinq de ses sept buts et récolté six de ses 23 passes lors de supériorités numériques.

 

Doté de bonnes mains, d’une bonne vision et d’un talent indéniable qu’il n’a malheureusement pas déployé assez souvent lors de ses précédents rappels, Scherbak pourrait profiter de l’espace et du temps supplémentaire offerts lors des attaques massives pour maximiser son potentiel offensif. Ce qui l’aiderait grandement à réaliser son objectif de débarquer à Montréal pour y rester.

 

Bien qu’on puisse facilement lui reprocher les manques d’effort et de conviction remarqués lors de ses précédents essais avec le grand club et aussi lors des camps d’entraînement où il s’est contenté de figurer au lieu de faire bonne figure, Scherbak semble vraiment avoir changé d’attitude. Un changement dont il aura grandement besoin s’il veut combler le retard derrière ses adversaires sélectionnés en première ronde en 2014. Pour n’en nommer que quelques-uns, Aaron Ekblad (1er), Leon Draisaitl (3e), Nikolaj Ehlers (9e), Dylan Larkin (15e) David Pastrnak (22e) sont tous déjà des joueurs importants, voire des vedettes, au sein de leur club respectif. De fait, seulement deux joueurs repêchés en première ronde en 2014 – Micheal Dal Colle, 4e sélection par les Islanders a disputé 4 matchs et Connor Bleackley 23e sélection par l’Avalanche est retourné au repêchage deux ans plus tard (St. Louis) et n’a toujours pas atteint la LNH – ont disputé moins de matchs que Scherbak dans la grande ligue.

 

« J’ai appris beaucoup dans la Ligue américaine. Je crois m’être amélioré et il est important pour moi d’être en mesure de contribuer dans toutes les situations. J’aime bien évoluer en compagnie d’Alex (Galchenyuk) et Jonathan Drouin. Ce sont deux joueurs de talent et je dois profiter de leur expérience. Mais peu importe le trio au sein duquel j’évolue, je dois performer et remplir les rôles qu’on me confie. Je me suis fait plus confiance aujourd’hui qu’hier. J’espère que cette confiance montera au fil des matchs. Il m’a fallu plus de temps que d’autres pour me développer et je n’ai rien contre ça. Je me sens mieux préparé maintenant. Je me sens dans une bien meilleure situation que lors du dernier camp d’entraînement », assurait Scherbak avec conviction dans le vestiaire du Canadien après la victoire de dimanche.

 

Il ne lui reste qu’à afficher la même conviction sur la patinoire. Et de l’afficher sur une base permanente au lieu de se contenter d’étincelles de temps en temps. Aussi brillantes soient-elles.