MONTRÉAL - L'euphorie était à son comble, jeudi soir, dans les rues de Montréal où se sont rassemblées de façon relativement paisible des dizaines de milliers de personnes alors que le Canadien a éliminé les Golden Knights de Vegas pour accéder à la finale de la Coupe Stanley pour la première fois depuis 1993.

C'est un intense cri de joie qui a retenti dans les rues du centre-ville alors qu'Artturi Lehkonen a inscrit le but vainqueur en prolongation.

Des partisans en liesse se sont mis à danser et à chanter des cris de ralliement. Des feux d'artifice qui étaient déjà projetés par centaines dans le ciel de Montréal se sont faits d'autant plus nombreux. Au moins un véhicule de la police a été renversé.

«Je me sens surexcité. En plus, c'est la Saint-Jean, la fête du Québec. C'est contagieux, c'est trop beau», raconte Aldo Ntandikiye, en plein milieu du boulevard René-Lévesque pris d'assaut par une foule de partisans.

Il y a deux générations qui vivent un moment différent, a résumé Jean-François Meilleur: il y a ceux qui attendent ça depuis 1993 et il y a ceux, comme moi, qui sont nés après 1993 et qui attendent ça depuis toute leur vie".

Au même moment, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) déclarait, sur Twitter, que des «projectiles étaient lancés en direction des policiers et des méfaits sont commis. Veuillez éviter le secteur. Interventions ciblées en cours».

La Presse Canadienne a constaté que des individus avaient effectivement profité de l'affluence dans les rues du centre-ville pour lancer des projectiles aux policiers.

À l'intérieur du Centre Bell, où c'était aussi l'euphorie, le propriétaire du Canadien de Montréal Geoff Molson s'est adressé aux spectateurs dès la fin de la partie en leur demandant de ne pas quitter l'endroit.

«Pour votre sécurité, la police nous a demandé de rester à l'intérieur du Centre Bell», a déclaré au micro le propriétaire des Glorieux qui était dans les gradins.

Les quelque trois mille spectateurs ont pu quitter l'amphithéâtre un peu avant minuit.

Une trentaine de minutes après la fin de la partie, les policiers du SPVM avaient réussi à évacuer les alentours du Centre Bell.

Gaz lacrymogènes

Pendant plus d'une heure, les policiers de l'escouade antiémeute ont utilisé des gaz lacrymogènes pour tenter de disperser les foules un peu partout au centre-ville et de rétablir la circulation sur les grandes artères, créant d'importants mouvements de foule.

Jonathan Morales, un partisan du Tricolore, a raconté à La Presse Canadienne qu'il tentait d'immortaliser l'euphorie des fêtards sur le boulevard René-Lévesque lorsqu'il a été incommodé par les gaz. «Je faisais juste prendre des photos et voir ce qui se passait, mais ce n'est pas très agréable, parce ça vient (les gaz) de toutes les directions».

Deux amis ont raconté avoir craint d'être pris au piège par le mouvement de foule. «On était en train de célébrer lorsque les policiers ont lancé les gaz», a expliqué Mikhal Andriuschenko. «On a eu peur de la foule alors on est parti par peur de se faire écraser», a ajouté son amie Bohdana Synychenko.

Du matériel urbain et des poteaux de signalisation ont été endommagés, a recensé le SPVM, qui affirme que des agents ont été ciblés: des personnes leur ont lancé des roches, des bouteilles de vitre et des canettes. Certains auraient même été frappés.

Les policiers ont effectué plusieurs arrestations et remis un bon nombre de constats d'infraction, a indiqué le SPVM en milieu de nuit. Un bilan viendra en matinée.

Les Montréalais ont été somme toute relativement paisibles. La Presse Canadienne n'a d'ailleurs pas été témoin de dommages subis par des commerces, d'arrestations massives ou de bagarres.

Sur sa page Facebook, la mairesse Valérie Plante avait d'ailleurs demandé aux Montréalais de célébrer la Fête nationale et le match «avec passion, mais aussi dans le respect» estimant qu'«on doit bien ça à nos commerçantes et commerçants».

«N'eût été notre intervention rapide, je pense que ça aurait pu dégénérer beaucoup plus que ça», a commenté l'agent Couture.

Les ambulanciers ont réalisé une vingtaine d'interventions au centre-ville de Montréal en lien avec les festivités.

Deux personnes ont été transportées pour des blessures sérieuses à la suite d'une bagarre, a indiqué le superviseur Benjamin Dansereau. Le reste était essentiellement des malaises, notamment des intoxications.

L'euphorie avant les débordements

«C'est la folie furieuse», a résumé durant la partie Samuel Desrochers, un jeune homme venu de Lévis avec son oncle pour vivre l'ambiance dans les rues du centre-ville de Montréal. À l'intersection du boulevard René-Lévesque et de la rue Drummond, il était bien servi avec une foule compacte qui retenait mal sa joie.

Non loin, Alex Valiquette, brandissait un drapeau du Québec. «On a fêté au parc Laurier. On a fait un jam. Il y avait de la musique Puis, la police est venue. On a dit on vient ici fêter la Saint-Jean avec les Canadiens de Montréal. C'est une euphorie totale. On mélange les deux.»

Légèrement en retrait, des centaines de personnes étaient rassemblées dans un stationnement du centre-ville converti pour l'occasion en lieu de diffusion improvisé de la partie.

«L'ambiance est incroyable», a résumé Margaux Caron. «Ça fait vraiment du bien de vivre ça après un confinement de plus d'un an», a renchéri son frère Antonin, un commentaire fréquent répété par les partisans.

L'écran de cette «installation citoyenne» est si petit que «c'est impossible» de suivre l'action témoigne Anthony Leblanc qui vit néanmoins un sentiment "fantastique".

Le premier but, marqué par Shea Weber, a levé la foule. «Les feux d'artifice qui explosaient partout à travers la ville, c'est vraiment une ambiance qu'on n'a pas vue depuis très longtemps», a témoigné un homme à ses côtés.

Et à chaque but du Tricolore, l'excitation était partout à son comble. C'est «la pleine lune, les Canadiens, la Saint-Jean», a raconté Isabelle Lepage qui ne peut rêver d'une plus belle soirée. «Trop cool», s'exalte son fils, Xavier.